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dimensions et la force des bâtiments étaient déjà telles, que les amiraux sentirent la nécessité de prendre un ordre de marche propre au combat et de faire, préalablement, un bon dispositif de défense. Malheureusement, ces idées avancées qui étaient celles de Barbavera, ne purent prévaloir sur l'obstination de ses collègues. La première application de cette idée appartient donc à Édouard III et à ses amiraux. Jusqu'à cette époque, l'ordre de front était seul en usage pour les vaisseaux ronds, et voici comment Pantero Pantera (1) rend compte de la raison qui faisait préférer cet ordre à tout autre : « Quant à l'ordonnance des << vaisseaux ronds, dit-il, celle qui les range sur un seul << front étendu fut toujours regardée comme la meilleure << par tous les habiles praticiens de la marine et par les « hommes qui se sont battus sur mer, non-seulement parce

qu'elle occupe un grand espace, et qu'ainsi les nefs ne « s'embarrassent pas l'une l'autre, et que la flotte ne peut « être attaquée par le flanc, un seul navire pouvant re«< cevoir le choc, mais encore, parce que sous l'in«<fluence d'un même vent, toute l'armée peut se porter à «la fois sur l'ennemi. Et cela, elle ne pourrait le faire si << elle était rangée en demi-lune, parce que les nefs des << deux cornes n'ayant pas le corps dans la même direction << que la bataille, et les proues se trouvant opposées l'une « à l'autre, le même vent ne pourrait servir les cornes et « la bataille dans une attaque contre une flotte ennemie « qu'on voudrait envelopper. Pour cette raison, dans l'or« donnance des vaisseaux ronds, les deux cornes ne seront « d'aucun secours, ne pouvant envelopper l'ennemi à cause «< du vent qui, bon pour l'un, serait contraire à l'autre ; << elles seraient une cause de désordre et de confusion pour une flotte qui voudrait adopter cet ordre. Quant aux «< bâtiments à rames, au contraire, l'ordre en demi-lune

(1) Armata uavale.

« est estimé le meilleur parce que, portant pour ainsi dire «<le vent en main, c'est-à-dire, pouvant naviguer à la rame, (( ils peuvent, par diverses routes et dans le même temps, << aller attaquer de front et sans obstacle le corps d'armée << de la flotte ennemie et, avec les cornes droite et gauche, « le prendre en flanc. Ils peuvent aussi l'envelopper et se « retirer de la mêlée si le danger devient trop grand. »

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Voici maintenant, selon le même auteur, l'ordre que les vaisseaux ronds devaient tenir dans une armée navale. «Si <«<les vaisseaux ronds sont nombreux, il faut que ceux de «< chaque escadre suivent leur chef et soient répartis selon « leurs qualités particulières. Au besoin, on pourra per« mettre que les vaisseaux s'entremêlent, grands et petits, « quand ils seront de la même corne ou du corps de ba<< taille. Et comme le front sera très-étendu quand l'armée «< sera nombreuse, l'amiral qui doit être au centre ne

pourra donner des ordres à toute sa flotte. Il mettra « alors les navires les plus forts et les plus grands sous les << ordres de personnes graves et prudentes qui les guide«ront, conformément aux ordres émanés du bâtiment ami«ral, pour le plus grand bien du service. Les navires les « plus grands et les mieux armés seront placés aux deux « flancs et particulièrement à celui qui est au vent; ils se«ront comme des remparts défendant les navires moins. « forts de toute agression. On fera en sorte que, dans l'or«<dre de bataille, les vaisseaux ronds se tiennent éloignés « les uns des autres d'une distance égale seulement à trois «< ou quatre fois la largeur d'une nef. Cet espace est à la « fois nécessaire pour rendre les mouvements faciles et << pour que, dans la mêlée, un seul vaisseau n'ait pas affaire « à deux ennemis, et l'on gardera en réserve quelques na« vires, en dehors de la ligne de bataille, pour aller pen«dant l'action porter secours à ceux qui pourraient en << avoir besoin. Les petits navires, comme les pataches, les «< caravelles, etc., ne devront jamais prendre place sur le «front de bataille, mais rester derrière la ligne principale,

<< soit au centre, soit aux cornes. Comme ce sont des bâti«ments légers, ils pourront se porter partout où le besoin «<les appellera, inquiéter l'ennemi, le harceler, quelque «vent qu'il fasse, et pendant le combat lui faire beau<coup de mal sans porter le trouble dans la ligne. »

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« S'il arrive qu'une flotte de vaisseaux ronds prévoie

qu'elle sera attaquée en calme par des galères, et si ses « navires sont épars et fort éloignés les uns des autres, « elle devra mettre promptement ses chaloupes à la mer, << ainsi que ses autres embarcations, et se faire remorquer << par elles pour se rapprocher d'un centre commun. En<< suite, chacun des navires ralliés se mettra en ligne de flanc, présentant le travers à l'ennemi, afin de le tenir à « distance avec l'artillerie. Chaque vaisseau portera aide « et secours aux autres, et par ce moyen la flotte des bâ<«<timents ronds pourra lutter avec avantage contre les galères dont le tir, voisin de l'eau et s'attaquant à la flottaison des nefs, est dangereux pour elles (1). »

La piace des gros navires variait cependant selon les circonstances et, lorsqu'on combattait près de terre, on avait grand soin que la corne la plus rapprochée du rivage serrât la côte d'assez près pour que l'ennemi ne pût passer entre la terre et la flotte.

L'ordre de bataille pour les nefs variait, du reste, suivant l'occurrence. Tite-Live raconte que Scipion ayant à repousser une attaque de bâtiments de guerre contre lesquels il ne voulait pas commettre imprudemment les navires à rames qu'il réservait pour la fin du combat, fit placer ses navires de charge sur quatre files de profondeur, en avant de ses galères, afin que leur quadruple épaisseur fût comme un mur protecteur entre lui et l'ennemi. Mais il ne les abandonna pas un à un aux caprices du vent et de la mer; il eut soin que ces quatre rangs ne fissent qu'une

(1) J'ai emprunté ces détails et plusieurs autres relatifs aux navires des premières époques à l'Architecture navale de M. Jal.

seule masse; et pour que tous les navires de charge restassent bien à leurs postes respectifs, il fit jeter de l'un à l'autre les mâts et les vergues de chacun. Sur ces mâts et vergues fortement attachés aux plats bords, il fit poser des planches, de telle sorte que ce corps de navire fût comme une vaste place d'armes où les machines à jet fussent commodément placées et où les soldats pussent agir comme sur les larges plates-formes des fortifications.

La tradition de cet ordre de bataille n'était pas perdue au quinzième siècle, et nous voyons les Vénitiens en appliquer les principes à la bataille de Durazzo. Anne Comnène (1) décrivant les apprêts des grandes nefs de Venise dit que, le vent leur ayant manqué, elles se mirent sur un rang et se lièrent l'une à l'autre. Cette manière de combattre se trouve également consignée dans Torfeus (2).

L'ordre de bataille choisi par Édouard III au combat de l'Écluse devint pour ainsi dire la règle. C'était encore celui en usage au commencement du xvIIe siècle. Nous verrons cependant qu'on dérogeait parfois à cette habitude et que l'amiral d'Annebault, en 1545, marcha à l'ennemi sur trois colonnes.

1342. La guerre était à peine terminée en Flandres, qu'elle fut transportée en Bretagne. Jean de Montfort et Charles de Blois se disputaient cette province, et chacun des deux compétiteurs mit la France ou l'Angleterre de son parti. Édouard se déclara pour le comte de Montfort et Philippe pour Charles de Blois. On sait que lorsque le comte de Montfort eut été fait prisonnier, la comtesse sa femme, bloquée dans Hennebon par les Français, défendit cette ville jusqu'à ce qu'une flotte anglaise fût venue la

(1) Annæ Comnena Porphyrogenitæ, etc.

(2) Historia rerum norvegicarum.

dégager. Voyant le parti de Charles de Blois supérieur au sien dans toute la Bretagne, elle alla en Angleterre solliciter un nouveau secours qu'elle obtint facilementet revint, à la fin de juillet, avec 45 bâtiments dont le commandement avait été donné à Robert d'Artois. A la hauteur de l'île Guernesey, elle rencontra la flotte française composée de 32 voiles dont 9 gros vaisseaux; Louis d'Espagne la commandait et sous lui, Aithon Doria pour les Génois et Charles Grimaut pour les Français. Le combat fut opiniâtre; la nuit le fit cesser; les Anglais avaient perdu 4 navires. De part et d'autre on avait l'intention de recommencer le lendemain; mais un coup de vent sépara les deux flottes; les Français prirent le large et les Anglais purent atteindre Vannes.

1346. -Les Français ne furent pas heureux dans une rencontre qu'ils eurent cette année avec les Anglais. Le 12 juillet, Édouard entra à la Hougue avec une flotte de plus de 1000 navires, s'empara des principales villes de Normandie, gagna la bataille de Crécy et mit le siége devant Calais. Cette ville arrêta un moment le cours de ses succès. Forcé d'avoir recours à l'Espagne, Philippe de Valois conclut avec l'amiral de Castille un traité d'après lequel celui-ci s'engageait à lui fournir 200 bâtiments montés chacun par 100 hommes de guerre dont 25 devaient être arbalétriers. Il ne put cependant envoyer au secours de Calais que 70 bâtiments et 12 galères qui furent défaits par la flotte anglaise. Philippe ne réussit pas mieux sur terre; il fit retirer ses troupes, et Calais capitula.

1372.

Édouard III qui appréciait l'importance de la Rochelle alors occupée par ses troupes, ayant été informé que Charles V allait faire le siége de cette ville, chargea le comte de Pembroke de la ravitailler. L'épuisement du royaume ne permettait pas au roi de France d'avoir un ar

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