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notoire; mais à présent que tout homme est égal devant la loi, négociant ou non, les débiteurs infidèles ou inexacts pourront indistinctement être traduits devant les tribunaux ; et leur insolvabilité légalement constatée. Je conclus donc d'abord à ce que le failli ne puisse exercer ses droits de cité jusqu'à ce qu'il ait intégralement satisfait à ses obligations.

» A l'égard des enfans M. Thouret s'est récrié contre cette loi de Genève qui les exclut de toute magistrature, et même de l'entrée au grand conseil, lorsqu'ils n'ont pas payé les dettes de leur père. Cette loi serait en effet trop rigoureuse dans un grand état, en ce qu'elle prononce indistinctement cette suspension des droits politiques contre le fils du failli, soit qu'il ait ou non recueilli quelque chose de la succession de son père; mais rien n'est plus sage que la même disposition lorsqu'elle est limitée aux enfans qui, sans payer leur part virile des dettes de leur père mort insolvable, retiennent une partie de ses biens.

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S'il y a une présomption de fraude ou de négligence contre le failli qui n'a pu être que malheureux, il y a une preuve complète de mauvaise foi contre l'enfant qui garde au préjudice des créanciers de son père des biens qui étaient le gage de ses dettes. Je demande donc encore le maintien de cette loi,

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Enfin, si ces dispositions sont justes, si loin d'avoir les inconvéniens qu'on leur suppose leur effet doit être d'étendre nos relations commerciales, de purifier nos assemblées primaires, et d'inspirer un plus grand respect pour la représentation nationale, il n'y a par cela même aucun inconvénient à les comprendre dans l'acte constitutionnel; mais il y a de plus une indispensable nécessité à ce qu'elles en fassent partie, parce que tout ce qui peut étendre ou restreindre nos droits politiques est essentiellement de la Constitution, et qu'il serait extrêmement dangerenx de laisser quelque chose à faire en ce genre aux simples législatures, ou de nous régler nous-mêmes à autre titre que de corps constituant. » (Applaudissemens.) ́

Après une une longue discussion, qui ne fit que reproduire

les mêmes argumens pour et contre, on s'arrêta à cette question, relativement à l'article 5 du titre III, chapitre Ier, section II : «< l'article sera-t-il mis dans la Constitution ou rapporté ? » et l'Assemblée décida qu'il serait mis dans la Constitution. Quant à la disposition concernant les enfans, et dont on avait aussi demandé le rétablissement dans l'acte constitutionnel, M. Tronchet fit observer que les principes qui avaient déterminé la délibération actuelle de l'Assemblée devaient l'engager à ne pas laisser cet objet imparfait; qu'il était indispensable de prononcer constitutionnellement sur le sort des enfans; qu'il ne demandait pas que l'exclusion prononcée contre les pères s'étendît jusque sur la tête de leurs enfans, mais au contraire qu'il fût dit dans le procèsverbal qu'au moyen de la délibération qui venait d'être acceptée les dispositions des articles 5, 6 et 7 de la première section du décret du 22 décembre 1789 demeurent réduites à ce qui venait d'être décrété pour être compris dans la Constitution. » (Extrait du procès-verbal de la séance du 11 août 1791.)-L'Assemblée admit et décréta la proposition de M. Tronchet.

L'article 6 de la même section fut décrété sans discussion; mais sur l'article 7 il s'éleva de longs débats.

Sur la condition du marc d'argent.

C'est au mois d'octobre 1789 que l'Assemblée statua qu'il serait exigé une contribution directe de la valeur de trois journées de travail pour être citoyen actif; de dix journées pour être électeur, et d'un marc d'argent pour être éligible à l'assemblée nationale: pour ce dernier degré elle avait en outre exigé qu'on justifiât d'une propriété foncière quelconque (r). Ces dispositions, proposées et fortement soutenues par le comité de constitution, ne furent décrétées qu'après une vive opposition de la minorité du côté gauche; MM. Grégoire, Roderer, Dupont

(1) Ces dispositions et autres, décrétées au mois d'octobre 1789, sont réunies et comprises dans le décret du 22 décembre de la même année, concernant la formation des assemblées administratives et représentatives.

de Nemours, Buzot, Pétion, Robespierre, etc., les combattirent tour à tour comme portant atteinte à l'égalité des droits, garantie par la déclaration, et comme protégeant l'aristocratie des richesses. En demandant que tout citoyen indistinctement fût reconnu citoyen actif et admis dans les assemblées primaires pourvu qu'il eût un jugement sain et un cœur français, ils convenaient que la qualité de propriétaire était indispensable à celle d'électeur, par la raison que l'administration des affaires concerne généralement la propriété, que chacun a le droit de se mêler de ses affaires, et que nul n'a d'affaires à confier que lorsqu'il est propriétaire; mais ils rejetaient toute condition d'éligibilité à l'Assemblée nationale: pour être élu, disaient-ils, il suffit d'être choisi. M. Prieur voulait qu'à la condition du marc d'argent on substituât celle de la confiance des électeurs.....« J'appuie eet amendement, s'était écrié Mirabeau; c'es' le seul conforme aux principes. » Le comité n'opposa à ces objections que la nécessité prétendue d'éloigner des assemblées les hommes sans aucune fortune, et par là trop accessibles à la corruption; et le comité l'emporta. Chacune de ces trois dispositions devint dès lors le motif de reproches adressés aux représentans par les sociétés populaires, et souvent élevés au sein même de l'Assemblée nationale, dans les discussions qui touchaient les classes pauvres du peuple; mais ce fut la condition du marc d'argent qui essuya partout le plus de censure et de critique; vingt fois on en demanda la suppression, soit par des pétitions, soit par des motions faites à la tribune, et constamment écartées par l'ordre du jour. Vaincus par l'expression si générale d'un même vœu, les comités de constitution et de révision se décidèrent enfin à proposer formellement cette suppression, en adoptant d'une part les motifs combattus par le premier de ces comités, mais de l'autre en rejetant sur les électeurs ce qu'ils ôtaient aux éligibles de sorte que, pour obtenir la suppression tant réclamée de la condition du marc d'argent, ils retrouvèrent pour adversaires les mêmes orateurs qui deux ans auparavant s'étaient opposés à son adoption.

Voici ce que les comités avaient imprimé dans le projet de Constitution, en laissant en blanc la valeur de la contribution directe exigée des électeurs :

« Les comités de constitution et de révision ont pensé que pour conserver la pureté de la représentation nationale, qui dans notre Constitution est la première base de la liberté, il importait d'assurer autant qu'il est possible

l'indépendance et les lumières dans les assemblées électorales, et de né mettre ensuite aucune borne à leur confiance et à la liberté des choix qu'elles sont chargées de faire; en conséquence ils proposent à l'Assemblée de supprimer la condition du marc d'argent attachée à l'éligibilité des membres du corps législatif, et d'augmenter la contribution exigée pour les électeurs. »

Les comités s'étaient réservé de proposer le taux proproportionnel de cette contribution.pendant la discussion. Suivant l'ordre de la délibération, M. Thouret porta ainsi la parole avant de donner lecture de l'article 7 ( titre III, chap. I, section II).

nous

M. Thouret. (Séance du 11 août 1791.) « Ici se présentent les développemens de la proposition que les deux comités ont eu l'honneur de vous faire relativement à la condition d'éligibilité pour être représentant de la nation et à celle pour être électeur. L'Assemblée n'ignore pas que d'une part le décret qui exige la contribution du marc d'argent des représentans de la nation a reçu d'une manière positive l'improbation de la ville de Paris, et que la demande de son rapport a été faite; elle ne peut pas ignorer non plus que ce décret d'autre part a reçu l'assentiment d'une partie de la nation. En nous occupant de la révision nous sommes trouvés provoqués par ces deux impulsions à considérer quel pouvait être définitivement le meilleur système de la représentation nationale. Il y a une première base incontestable; c'est que quand un peuple ne se réunit pas pour élire, et qu'il est obligé d'élire par sections, chacune de ces sections, même en élisant immédiatement, n'élit pas pour elle-même, mais élit pour la nation entière; par con- * séquent la nation a intérêt et droit de s'assurer contre les méprises, les erreurs qui peuvent être commises par le résultat des sections partielles. Aussi n'y a-t-il pas de constitution, même dans celles qui ont adopté le système de la nomination immédiate, il n'y a pas de constitution qui n'ait établi des règles et des conditions d'éligibilité : l'Angleterre, l'Amérique même plus récemment, en ont constitué de beaucoup plus sévères que nous. Cette nécessité devient plus forte chez un très grand peuple, lorsque non seulement il est forcé

d'élire par sections, mais quand il est forcé d'admettre une élection médiate, qui est par conséquent confiée à des délégués intermédiaires chargés d'élire au nom de ceux qui les commettent, et d'élire pour la nation.

» Alors la qualité d'électeur est fondée sur une commission publique, dont la puissance publique du pays a le droit de régler la délégation. Là, messieurs, il y a une alternative entre les deux partis qu'on peut adopter, ou de rendre la qualité très facile à obtenir, et elle ne présente pas alors une garantie très certaine de l'indépendance personnelle de chacun de ceux qui la remplissent, de l'intérêt très efficace qu'ils prennent au succès de la chose publique; on est alors obligé de renforcer la précaution contre les méprises : ou bien l'on peut rendre la qualité d'électeur plus difficile à obtenir, et parvenir par là à avoir des électeurs qui présentent à la société une plus grande garantie de leur indépendance personnelle et de l'intérêt très réel qu'ils prennent à la chose publique, et alors le ineilleur parti est de leur abandonner l'exercice libre de la confiance.

» Il ne nous a pas paru douteux que la plus grande sûreté sociale, objet de notre travail, serait dans ce dernier parti、 si l'Assemblée se décide à l'adopter. Prenons pour exemple ce que nous avons fait. Nous admettons des électeurs qui ne nous présentent pas d'autre garantie que celle qui peut être portée, à raison de la valeur des propriétés, soit foncières, soit mobilières, au taux de la valeur de dix journées de travail : nous avons bien senti que cette garantie ne remplissait · pas suffisamment tout ce que l'Assemblée devait attendre du résultat des élections; et alors, précautionnant la nation contre ces élections, nous avons mis des entraves à la liberté des électeurs, et au lieu de leur laisser le libre exercice de leurs fonctions nous les avons obligés d'élire dans une certaine classe de citoyens, le mot classe est impropre, mais dans le nombre des citoyens qui présentent cette garantie plus étendue et de leur indépendance dans les délibérations du corps législatif et de l'intérêt qu'ils prennent au succès de la chose publique. Ceci, messieurs, n'assure pas bien le grand objet que nous voulons garantir; car d'une part on

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