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assurer ce droit, ou plutôt le moyen légal d'en user; mais je demande que le droit de changer la Constitution tout, entière ne soit pas essentiellement inhérent au droit de la réformer en partie; je demande que le peuple ne soit pas forcé de donner à ses représentans le droit de détruire lorsqu'il ne veut leur départir, lorsqu'il convient à son intérêt de ne leur départir d'autre droit que celui de réformer ; je demande enfin que le peuple sache ce qu'il donne, qu'il mesure sa délégation selon sa volonté et ses besoins, de telle sorte en un mot que ses représentans ne puissent en abuser.

» Ce n'est pas tout encore; le changement total ou les réformes partielles de la Constitution dépendant uniquement de la volonté du peuple, il faut non seulement qu'il sache lequel de ces deux pouvoirs il délègue à ses représentans, mais de plus il doit connaître pourquoi il le leur donne ; et dans le cas de la réformation partielle c'est à lui d'indiquer l'objet à réformer.

» La bonne solution du problème se trouvera donc dans le projet qui remplira les conditions suivantes :

» 1. Un moyen de réformer partiellement la Constitution sans mettre nécessairement la totalité de la Constitution en péril; 2o un moyen de connaître la volonté du peuple pour cette réforme; 3. un moyen légal de changer entièrement la Constitution; 4° un moyen de connaître le vœu du peuple pour ce changement.

» Si tel doit être le véritable sens de la loi que nous cherchons, il en résulte :

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Premièrement qu'on ne peut s'arrêter à l'idée de cumuler nécessairement dans le même corps de représentans la souveraine réformatrice de la souveraineté constituante; car, je le répète, toutes les fois que ce corps s'assemble, même pour le plus léger changement, la Constitution tout entière est menacée secondement que le rassemblement de ce corps ne peut être placé à des époques périodiques certaines, telles que la révolution d'un certain nombre d'années, le commencement ou le milieu d'un siècle; ni à des époques périodiques incertaines, telles que des changemens de règne.

:

» D'abord la périodicité certaine aurait ce terrible incon

vénient de donner longtemps à l'avance à tous les partis le signal de l'insurrection; ce serait marquer périodiquement dans la Constitution les jours destinés au trouble, et avertir les factieux d'être prêts à cette époque.

>> La périodicité incertaine ne présente, il est vrai, ni les mêmes dangers ni les mêmes calculs; subordonnée à la mort d'un roi, c'est à dire à un événement dont l'époque précise est impossible à prévoir, je conçois que tout reste calme jusqu'alors; mais comptez-vous pour rien les dangers de la circonstance? Et qu'importe ce calme antérieur si l'époque est fatale en elle-même ? Vainement la loi de l'hérédité peut donner lieu de feindre qu'en France le roi ne meurt pas ; fin d'un règne et le commencement d'un autre n'en présentent pas moins à l'esprit l'idée d'un interrègne, couvert si l'on veut par la fiction de la loi, mais réel par le fait; et quel moment, messieurs, que celui d'un interrègne pour revoir la Constitution! Quel moment surtout pour mettre à l'ordre du jour l'existence de la royauté !

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>> Je consentirais pourtant à risquer une partie de ces dangers si l'on pouvait me démontrer d'aillenrs l'avantage réel de l'un ou de l'autre de ces systèmes; mais je cherche en vain à les justifier par la raison; la raison les repousse : la périodicité certaine n'est que l'effet du caprice, et non le résultat d'une combinaison calculée sur les besoins de réforme ou de changement; la périodicité incertaine n'est qu'un jeu du hasard, et la raison ne permet pas de donner en garde à de telles chances la Constitution des empires.

>> Mais remarquez surtout, messieurs, les dangers du système qui admettrait nécessairement la révision à la fin de chaque règne. Plusieurs règnes peuvent passer successivement et en très peu de temps sous les yeux de la même génération : la voilà donc livrée sans cesse aux troubles inséparables de la présence du corps constituant, sans cesse occupée à combattre pour sa liberté, et plus exposée que jamais à la voir envahir! Enfin, messieurs, si vous mettiez à ce prix la rassemblement du corps constiutant, redoutez que la main des factieux n'en accélère le retour... Je frémis d'y penser; mais je le dis pour le présent, et je le dis pour l'avenir.

>> A ces considérations générales permettez-moi, messieurs, d'en ajouter une particulière au temps et aux circonstances où nous sommes, et qui ne s'applique pas seulement aux divers systèmes de périodicité, mais à tout autre système qui, semblable à celui des comités, placerait à une époque fixe le premier rassemblement du corps réviseur de la Constitution, ou qui déterminerait dès aujourd'hui l'époque avant laquelle il ne pourrait être question de le rassembler.

» Nos ennemis, je veux dire les ennemis de la Constitution, feignent de méconnaître l'existence de la souveraineté nationale; cependant offrez-leur un moyen d'abuser de ce principe, et bientôt ils le professeront à leur manière.

>>

Si par exemple, adoptant un système de périodicité ou tout autre, vous déterminiez dès aujourd'hui l'époque certaine de la première Assemblée constituante, soit qu'elle fût indiquée pour le commencement du siècle prochain, à la fin du règne actuel ou à tout autre terme invariablement fixé; ou si enfin, ne voulant pas déclarer positivement le jour de sa réunion, vous indiquiez pourtant l'époque avant laquelle cette réunion ne pourrait être effectuée, vous verriez alors tous ces détracteurs de la souveraineté du peuple, empruntant l'attitude de défenseurs de ses droits, argumenter de cette limitation en faveur du système ratificateur; ils prétendraient que la souveraineté ne peut être ainsi comprimée pendant un éspace déterminé ; que c'est enlever au peuple le droit de s'expliquer à l'instant sur la Constitution nouvelle, ou que du moins cet engagement doit être précédé d'une ratification.

» Et ne croyez pas, messieurs, que cette supposition soit de ma part une légèreté; vos ennemis s'attendent bien à la réaliser; c'est encore une des chimères dont leur imagination est la plus agréablement remplie.

>> Je sais que dans les principes du gouvernement représentatif le système des ratifications n'est pas soutenable; mais enfin la masse des citoyens est-elle assez imbue des vérités politiques pour repousser par la force du raisonnement ce qu'une telle proposition pourrait avoir de captieux? Et s'il était vrai qu'on pût abuser de cette loi pour séduire un plus ou moins grand nombre de citoyens, ou seulement les pour

agiter pendant quelques jours, pourquoi ne pas épargner au corps politique jusqu'au prétexte de cette agitation?

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Rejetons loin de nous, messieurs, toutes ces idées de périodicité, et gardons-nous surtout d'interpréter la volonté nationale future sur l'époque de la prochaine Assemblée constituante.

» La raison vaut mieux que les chances de la prévision ou du hasard; elle ne dit pas de faire telle chose en tel temps si elle est inutile alors, mais elle dit de la faire quand il en est besoin; elle dit surtout de coordonner ses lois à un même système, et de chercher dans les lois déjà faites, dans les principes déjà adoptés, la base de celles qui sont à faire, de sorte que tout dans la machine politique s'enlace, se tienne et se corresponde parfaitement.

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Ainsi, messieurs, sans aller chercher dans des combinaisons puériles s'il vaut mieux que le corps constituant soit rassemblé deux fois plutôt qu'une seule dans la révolution d'un siècle, s'il est préférable de le convoquer à chaque renouvellement de règne, ou si enfin la réunion de ce corps ne doit pas même être possible avant l'année 1800, au lieu de cela, dis-je, remontons au principe.

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C'est pour le peuple qu'il convient de réformer la Constitution ou de la changer, et c'est à lui qu'il appartient de décider s'il faut la réformer et la changer, et quand il faut le faire.

» Si donc il existe un moyen de connaître le vœu du peuple à cet égard, ce moyen doit être adopté préférablement à tout autre système.

Je rappelle d'abord ici, messieurs, la distinction que je vous ai proposée entre le corps réformateur et le corps pour ainsi dire destructeur de la Constitution.

» Je désigne le premier sous le nom de Convention nationale, le second sous le nom de corps constituant; et je les définis ainsi :

» La Convention nationale est l'Assemblée des représentans ayant le droit de revoir et le pouvoir de réformer par des changemens, suppressions ou additions, une ou plusieurs parties déterminées de la Constitution.

» Le corps constituant est l'Assemblée des représentans ayant le droit de revoir la Constitution dans son ensemble, de changer la distribution des pouvoirs politiques, et de créer une Constitution nouvelle.

Cette définition admise, voyons comment le peuple obtiendra le rassemblement de l'un ou de l'autre de ces corps, selon sa volonté actuelle et bien déterminée.

» C'est dans les principes fondamentaux de notre gouvernement que je dois chercher à résoudre la question.

» La France est un gouvernement représentatif.

» On n'y connaît qu'un seul corps essentiellement délibérant, et des pétitionnaires individuels.

» Le corps législatif délibère.

» Les citoyens adressent des pétitions.

» Le corps législatif exprime la volonté générale.

» Les citoyens n'expriment que des volontés particulières. » L'acte de rassembler la Convention nationale ou le corps constituant est un acte essentiel de la volonté générale.

>>

Or il n'existe véritablement d'acte de la volonté générale que là où il y a eu délibération de toutes les parties, et il ne peut y avoir de délibération que là où la réunion est effective.

» Ainsi, à moins de détruire tous les principes du gouvernement représentatif, il est évident qu'aucun corps adminis→ tratif, aucune collection de citoyens épars ne peuvent pas plus, dans le cas particulier que dans tout autre, exprimer cette volonté.

» Cette série de raisonnemens, puisés dans votre Constitution elle-même, conduit à cette dernière conséquence: la volonté générale sur le fait du rassemblement d'une Convention nationale ou du corps constituant ne peut être exprimée que par les représentans du peuple.

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J'adopte cette conséquence; elle devient la base du plan que je vous proposerai.

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Cependant le corps législatif n'exprime pas tellement la volonté générale qu'il soit toujours présumé l'avoir exactement prononcée; aussi dans les actes de législation est-il arrêté par le veto du roi.

» La déclaration du corps législatif par laquelle il demanderait une Convention nationale ou la présence du corps cons

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