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et la liberté de leurs opinions ne pourra être gênée par aucun mandat, soit des assemblées primaires, soit des électeurs. »

M. Lanjuinais. « Je crois que les mots ne pourra étre génée ne peuvent rester; il est évident que les esprits subtils ne manqueraient pas de tirer des conséquences de cet article. Je demande qu'il soit dit: et il ne pourra leur étre donné aucun mandat. (Adopté. Voyez la Constitution.)

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La troisième section était décrétée; le rapporteur des comités allait passer à la suivante lorsque M. Saint-Martin rappela à l'Assemblée le décret du 7 avril, qui défend aux membres des législatures de recevoir du pouvoir exécutif ni dons, ni pensions, ni traitemens, ni emplois, etc., pendant la durée de leurs fonctions ni pendant quatre ans après en avoir cessé l'exercice. M. Saint-Martin demandait que ces dispositions fussent placées dans la section qui venait d'être décrétée. M. Thouret s'y opposa, les regardant «< comme des mesures bonnes en révolution, lorsqu'après un long despotisme une nation s'éveille et se reconstitue, lorsque son principal ennemi est le pouvoir 'exécutif, parce que c'est lui qui a corrompu et qui a opprimé, et que c'est contre lui que la nation reprend l'exercice de ses droits; mais, ajouta M. Thouret, quand la révolution est terminée, quand après avoir tout détruit il faut tout rétablir, quand il faut former un gouvernement qui donne le mouvement et la vie au corps politique; alors c'est une erreur profonde que de traiter encore le pouvoir exécutif en ennemi de la chose publique. » Le rapporteur finit en déclarant que les comités s'étaient determinés à ne pas employer le décret du 7 avril « parce qu'il leur avait paru mettre dans un état permanent d'hostilité les deux pouvoirs constitutionnels qui doivent le plus fraterniser. Ces puissans motifs ne purent convaincre les esprits les dispositions que rejetaient les comités avaient de nombreux partisans ; déjà deux fois accueillies (1)

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(1) En novembre 1789, proposées en partie par M. Lanjuinais, et ajournées; décrétées en avril 1791, sur la motion de Robespierre, et presque sans discussion. (Voyez tome V, Organisation du ministère. )

dans l'Assemblée, elles y retrouvèrent des défenseurs qui les soutinrent avec opiniâtreté, soit en se renfermant dans ce seul argument qu'elles avaient été décrétées constitutionnellement, soit en s'attachant à détruire les objections faites par les comités. Les motifs donnés pour et contre se trouvent réunis dans les discours de MM. Duport et Ræderer.

M. Duport. (Séance du 13 août .1791.) « La France entière a été témoin de la rapidité avec laquelle la question la plus essentielle pour la liberté a été enlevée. Je demande que cette question soit mûrement examinée... (Murmures.) S'il est vrai qu'un acte de genérosité, je veux bien l'appeler ainsi, ait porté les membres de l'Assemblée actuelle à renoncer à toutes les places du pouvoir exécutif, je demande si les mêmes motifs peuvent être allégués dans la question qui vous est présentée pour qu'il soit interdit à jamais au pouvoir exécutifque vous désirez être populaire, actif, de choisir ses agens dans les législatures! Avec cette interdiction le pouvoir exécutif deviendra votre ennemi et vous détruira; il détruira la liberté... ( Allons donc ! Oui, oui, Ecoutez.)

» Le pouvoir exécutif détruira votre liberté; je le répète, ou vous le détruirez vous-mêmes (murmures), et votre liberté est alors également en danger. Je dis que s'il y a des hommes assez méprisables pour porter leurs ressentimens dans le cœur des autres, ou qui croient voir dans une opinion infiniment raisonnable un désir qui regarde quelques individus de cette Assemblée, ces hommes ne sont pas dignes de siéger ici; je dis que des hommes qui depuis plus de deux ans, et même avant ce temps, ont toujours travaillé pour la liberté de leur pays (murmures), qui y ont tout sacrifié, que ces hommes-là ont le droit d'être écoutés; je dis que si la colère, la haine ou toute autre passion préside à la délìbération sage qui doit établir un gouvernement solide dans ce pays-ci, ce gouvernement ne sera pas établi (on ri); et personne ne me niera qu'il ne faille examiner une question de cette importance avec tout le sang froid qu'elle exige, et que la France vous demanderait un jour compte des momens que vous avez employés à des questions bien autrement

futiles les raisons qui appuient celle-ci sont très courtes et très simples.

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On vous a déjà donné le principe de la question; on vous a dit qu'il était nécessaire dans un pays constitué que toutes les parties de l'administration publique eussent une chaîne commune dans l'intérêt commun de l'État; que s'il y avait un pouvoir qui fût l'ennemi de la société, il faudrait se hâter de le détruire : lorsqu'on a reconnu cette nécessité il faut organiser le pouvoir exécutif de manière qu'il ne soit pas ennemi de la liberté... (Murmures.)

» Je serais fâché d'être réduit malgré moi à discuter les moyens de forme lorsque je pensais que l'Assemblée voudrait entendre les véritables motifs qui ont déterminé les comités, et sur lesquels la France jugera.... (Ah, ah, ah! dans l'extrémité gauche.) M. Thouret vous a dit, et avec raison, que si les deux pouvoirs étaient tellement divisés que par là la nation fût séparée en deux classes différentes, ceux qui appartiennent au pouvoir exécutif et ceux qui appartiennent au pouvoir législatif, ce serait substituer à l'esprit national, au véritable esprit public, un esprit d'opposition et de contrariété. Si cette opposition n'existait que dans le corps législatif cela pourrait y être sans danger; elle y serait même utile à la liberté ; il est important pour le peuple qu'il existe une opposition ouverte dans l'Assemblée nationale; elle est la source des bonnes discussions; par là toutes les causes ont des défenseurs, les questions se débattent, les autorités sont surveillées, les principes maintenus: la corruption dangereuse c'est la destruction de l'opposition dans le corps législatif. Mais quand cette opposition se prolonge dans la nation entière, quand elle la coupe en deux partis distincts; lorsque l'un dit : nous sommes pour le roi; et l'autre: nous sommes pour le corps législatif; alors il n'y a plus de tranquillité publique, plus de bonheur, plus de liberté ; c'est une guerre continuelle.

» Au moment de la révolution l'Assemblée a désiré que le pouvoir exécutif fût plus populaire et plus actif: en effet il n'y a jamais que ces deux choses à craindre, qu'il ne soit pas populaire ou qu'il soit inactif. Si le pouvoir exécutif entre

prend sur la liberté il est possible de le retenir par les moyens que vous avez inventés; mais si le pouvoir exécutif est inactif il n'y a aucun moyen possible, et la Constitution n'en présente aucun il faut donc lui donner intérêt pour agir dans la Constitution; il ne faut pas le dépopulariser. Or maintenant il est évident que le pouvoir exécutif ce sont les ministres, car ce ne sont point les volontés du roi, ce ne sont point ses opinions, ses sentimens qu'il faut faire entrer pour composition de la liberté publique; c'est la manière dont il s'entoure, ce sont les agens qu'il emploie : ainsi le pouvoir exécutif ce sont les ministres; dès lors je vous dis que vous prenez le moyen le plus sûr, le plus certain pour que le pouvoir exécutif ne soit jamais populaire.

>> Entrons dans quelques détails. Vous désirez que l'armée soit populaire; vons désirez que les officiers surtout se rallient à la cause générale de la nation et au corps législatif: hé bien, messieurs, tous officiers de la classe de ceux qui, ayant des talens, peuvent désirer et demander un avancement prompt, fuiront les élections populaires comme une rencontre terrible pour eux. Ceux qui ont plu au peuple, ayant fait quelque chose pour lui, s'ils sont nommés par lui, ont perdu leur carrière, leur avancement, leur fortune! Dès lors leurs talens sont nuls pour la cause du peuple; ils les éloignent de l'intérêt national: ils sont opposés au peuple ; ils évitent le corps législatif.

» Ensuite vous avez désiré et vous désirez sans doute que tous les agens que vous employez au dehors pour vos négociations soient dans l'intérêt national, et certes il n'y a pas un membre de cette Assemblée qui n'ait regretté que la nation soit représentée au dehors par des hommes qui ont un intérêt opposé à ceux qu'ils représentent : hé bien, vous prenez le moyen évident pour que cela soit toujours ainsi. Voilà donc, dans la partie militaire ainsi que dans la partie diplomatique, des hommes qui, par la loi qui les exclut six ans de toute possibilité soit d'entrer dans ces carrières, soit de s'y avancer, se mettent dans la ligne du pouvoir exécutif! Cela peut se pousser jusqu'au point de vous faire frémir : si jamais l'ennemi était à vos portes; si, comme il y a beaucoup d'hommes capables

d'être officiers, máis très-peu d'être généraux; si, comme dans ce moment on peut le reconnaître, le destin des armées françaises pouvait tenir à quelques individus ; si vous teniez ces individus dans votre sein nous serions obligés ou de manquer à notre Constitution ou d'empêcher que l'homme qui peut sauver son pays aille le sauver ! Et vous sacrifieriez la chose publique à une vaine délicatesse !

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» Voilà les inconvéniens incalculables du décret qu'on vous propose maintenant prenons les moyens plus directs du pouvoir exécutif, je veux dire les ministres. Qu'y a-t-il à désije ne dis pas pour l'orgueil de quelques individus, mais pour l'intérêt du peuple français ? C'est que les lois soient observées, et que ceux qui sont à la tête du pouvoir exécutif soient dignes de la confiance publique : c'est ce défaut qui a si souvent mis en péril la Constitution et qui l'y mettra toujours. Quelques hommes que je vois ici en opposition à nos principes ont demandé que le peuple nommât les ministres; ils ont certainement été guidés par de bons principes; mais des inconvéniens sans nombre ont repoussé cette idée: hé bien, ils vont tout de suite à l'idée la plus opposée, à ce que le peuple ne puisse avoir aucune espèce d'influence dans le choix des ministres ! Dans le système que nous proposons, en prenant les ministres dans les personnes que l'opinion chérira, que le peuple aura déjà choisies, c'est alors qu'il aura confiance en eux; il connaîtra leurs principes, leurs talens, leur probité : l'opinion publique aura une telle action sur le pouvoir exécutif que c'est alors qu'elle le forcera à être populaire. Mais forcer le roi à prendre ses ministres dans une classe d'hommes sur lesquels le peuple n'a jamais eu d'action, qui ont refusé constamment de se présenter dans les assemblées populaires, qui les ont méprisées, ou qui, s'y étant présentés, en ont été exclus! Hé bien, messieurs, voilà les seuls hommes que le pouvoir exécutif peut choisir. Je défie qu'on me réponde à cela. Quelle ineptie, quelle ignorance des premiers principes du gouvernement! quelle conspiration funeste contre l'intérêt du peuple! Est-ce à l'Assemblée nationale à la consommer!

» Ce n'est pas là le seul inconvénient, quoiqu'il soit évidens

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