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plade, composée d'environ quatrevingt mille ames, passa le détroit sur les vaisseaux que Boniface lui avait envoyés, débarqua dans le mois de mai 428, et prit possession des trois Mauritanies, qui, en vertu de l'alliance qu'il venait de contracter, lui furent cédées en toute propriété. La paix ne régna pas long-temps entre un rebelle et un barbare, qui avaient eu d'abord des intérêts communs à défendre, mais qui, dans leur ambition, mauifestèrent bientôt des vues différentes. Boniface, trompé dans la sienne, se réconcilia avec l'empereur, et promit de réparer le mal qu'il avait fait. Il offrit à Genseric les moyens de conquérir toute l'Espagne; mais celui-ci, aussi ru sé que son ancien complice, lui signifia qu'il conserverait par la force ce qu'il tenait de la trahison. La guerre éclata aussitôt, et fut affreuse. Genseric, naturellement féroce, et de plus offensé, entra dans les provinces romaines, et y mit tout à feu et à sang. Ses soldats, Ariens comme lui, haïssaient mortellement les catholiques, et joignaient les tourments aux massacres. La plus riante contrée de l'univers, la plus fertile et la plus peuplée, ne fut bientôt plus qu'un désert. Ni le rang, ni la naissance, ni l'âge, pi le sexe, ne trouvèrent grâce auprès de ces cœurs impitoyables. Ils chargeaient de fardeaux énormes les femmes les plus délicates, et les forçaient de marcher à coups de fouet ou d'aiguillon; ils arrachaient les enfants des bras de leurs mères, pour les écraser sous leurs pieds. Mais il est permis de croire qu'il y a de l'exagération dans ces récits, qui tous nous ont été transmis par des catholiques, si cruellement traités par les Ariens, et qui en ont conservé de longs ressentiments. Genseric, après avoir pil,

lé et dévasté toutes les campagnes, s'empara de toutes les villes, excepté de Cirthe, d'Hippone et de Carthage. Boniface, au dés spoir, hasarda une bataille avec des forces très inférieures, fut défait, et contraint de se renfermer dans Hippone, ville forte, que le vainqueur assiégea vainement pendant quatorze mois. L'année suivante, Boniface reçut d'Orient un puissant secours, qui le mit en état de tenir la campagne, et de prendre l'offensive. Il attaqua Genseric, et fut battu cette seconde fois plus complètement encore que la première. Les habitants d'Hippone, effrayés de sa défaite, abandonnèrent leur ville qu'ils avaient défendue si vaillamment l'année précédente. Les Vandales n'y entrèrent que pour y mettre le feu. Genseric était cependant trop bon politique pour se laisser éblouir par des succès qu'il ne devait qu'à la terreur qu'il inspifait. Il ne se refusa point aux offres de paix que lui firent les Romais. Par le traité qui fut signé le 11 février 430, les Romains lui cédaient la proconsulaire, à l'exception de Carthage et de son territoire; la Bysacène, et ce qu'i'avait conquis dans la Numidie : à ces conditions, il s'engagea, par serment, à ne rien entreprendre contre le reste de l'Afrique; et, poor sûreté de sa parole, il don na son fils Huneric en otage. Tranquille possesseur des plus belles contrées d'Afrique, Genseric les gouverna avec vigueur et sévérité. Il crut cette sévérité nécessaire à sa propre sûreté et au repos de ses états, que menaçaient de troubler à chaque instant les querelles religieuses, si vives et si fréquentes dans ce malheureux siècle. Mais il se voyait avec peine privé de la possession de Carthage, capitale du pays dont il était le maître. Le traité ne put-l'arrêter :

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il s'en empara par surprise, le rg.oc tobre de la même année; et cette cité fameuse, dont la conquête avait coûté tant de sang aux Rom ins, et qu'ils possédaient depuis 585 ans, passa sans difficulté au pouvoir des Vandales. Genseric, en y entrant, défendit le massacre et le pillage; mais c'était pour se réserver à lui seul le droit de disposer des habitants et de leur fortune. Il se fit apporter tout ce qu'ils avaient d'or, d'argent, de bijoux et de meubles précieux; et, après les avoir entièrement dépouillés de tout ce qu'ils possédaient, il relégua les uns dans le désert, et fit embarquer les autres sur des vaisseaux brises et prêts à faire naufrage. Quelques-uns de ces infortunés se jetèrent à ses pieds pour lui crier merci! « J'ai résolu, leur répondit i en colère, d'exterminer votre nation toute entière. » La chute de Carthage retentit dans tout l'univers; et les débris de cette ville opulente couvrirent en quelque sorte la surface de l'ancien monde. Genseric avait trois fils, Huneric, Genton et Théodoric, auxquels il abandonna les meilleures terres de sa nouvelle conquête: il partagea les autres entre ses capitaines. Ce fut alors que, se croyant invincible et supérieur à la fortune, il se laissa enivrer d'adulations, et prit le titre de Roi de la terre et de la mer. Les conquérants qui veulent former un établissement durable, songent ordinairement à s'y fortifier et à se mettre hors d'insulte. Par une politique toute contraire, Genseric fit démanteler toutes les villes d'Afrique, de peur que les Romains, venant à prendre leur revanche contre lui, ne trouvassent dans les places fortes des boulevards contre ses armées, et que les peuples, mal affermis dans son obéissance, n'y cherchassent un asile contre sa tyrannie. Cette conduite,

qui parut alors fort sage, causa dans la suite la ruine prompte et totale de l'empire des Vandales. Aucune place ne fut en état d'arrêter Bélisaire, lorsqu'il descendit en Afrique. Genseric, maître de Carthage, songea à tirer parti du port avantageux de cette ville: il acheta des vaisseaux, en construisit de neufs, eurôla des matelots étrangers, exe: ça ses troupes aux opérations de la mer ; en un mot, il créa en très peu de temps une marine formidable, et en état de porter au-delà des mers la terreur de ses armes. Pour premier essai de ses forces maritimes, il fit une descente en Sicile, ravagea le pays, et assiégea Panorme aujourd'hui Palerme). Une expédition plus importante appela bientôt son attention, et combla ses vœux; voici à quelle occasion. Maxis me, meurtrier et successeur de Valentinien II, avait contraint Eudoxie, sa veuve, à l'épouser celle-ci, pour se défaire du tyran qu'elle abhorrait, ne craignit pas d'avoir recours à Gen❤ seric, et lui écrivit pour le prier « de » venir la délivrer de l'affreuse cap»tivité dans laquelle elle gémissait, » étant forcée de recevoir les embras>> sements d'un monstre encore souillé » du sang de son époux. » Genseric n'hésita pas, promit de la délivrer, se mit en mer avec une puissante armée, et vint débarquer à l'embouchure du Tibre. Le lâche Maxime, en apprenant cette nouvelle, eut une frayeur extrême, abandonna son palais, et se disposait à quitter la ville, lorsqu'un de ses propres soldats, indigné de sa lâcheté, le perça d'un coup d'épée. Trois jours après, Genseric entra dans Rome, qui ne lui opposa aucune résistance. Le pape S. Léon alla au-devant de lui, et en obtint la promesse qu'il épargnerait les habitants et les maisons. Le pillage néanmoins dura 14

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jours, et le butin fut immense. Tous les trésors du palais, les meubles précieux, les vases d'or et d'argent des églises et des particuliers, les richesses entassées dans la capitale du monde, deviurent la proie des brigands. Un de leurs vaisseaux, chargé de statues grecques et de vases antiques, fut englouti dans la mer avec sa riche cargaison. Ils emportèrent jusqu'à la couverture du temple de Jupiter Capitolin : elle était d'un cuivre très fin, et doré à une grande épaisseur. Les dépouilles du temple de Jérusalem, que Titus avait fait conduire à Rome, furent transportées en Afrique. Parmi les habitants des deux sexes, les Vandales enlevèrent ceux dont la jeunesse ou l'industrie leur promettaient plus de plaisirs ou plus de profits. Eudoxie elle-même, qui les avait appelés à son secours, ne fut pas à l'abri de leurs violences; elle fut emmenée en captivité avec ses enfants, et renfermée pendant plusieurs années dans une étroite prison à Carthage. Sous prétexte de réclamer les biens de Valentinien, qu'il retenait contre le droit des gens, Genseric infestait, tous les ans, les côtes de Sicile et d'Italie. Les prétextes ne manquent jamais ni aux pirates, ni aux conquérants pour justifier leurs conquêtes et leur brigandage. La guerre et le pillage étaient devenus le premier besoin de celui-ci. Tous les ans il s'embarquait au printemps, pour aller porter la désolation tantôt sur un rivage et tantôt sur un autre, brûlant les villes, et traînant les habitants en esclavage. Un jour qu'il sortait du port de Carthage, le pilote lui ayant demandé de quel côté il devait cingler : -- · Du côté des peuples que Dieu veut punir, répondit Genseric, qui se rendit justice saus le savoir, en se regardant comme le fléau dont la Providence se

servait pour punir et humilier les hommes. Lorsque les côtes d'Occident cessèrent d'offrir un appât à sa cupidité, il porta ses vues et ses ravages sur celles d'Orient. Léon, qui régnait alors à Constantinople, le fit menacer d'une vengeance éclatante, s'il ne cessait ses pirateries : — J'irai audevant de lui, répondit le fier Vandale; et, en même temps, il envoya tous ses corsaires ravager les côtes de la Thrace, celles d'Égypte, de l'Asie mineure, et porter l'alarme jusque dans la capitale. Léon, irrité au dernier point de tant d'audace, jura d'en punir l'auteur, mit sur pied toutes ses forces de terre et de mer, équipa une flotte de cent trcize galères, qu'il fit monter par cent mille soldats, et dont il donna, pour son malheur, le com mandement à Basilisque, frère de l'impératrice. Un armement si formidable devait écraser Genseric; il le fit au moins trembler. Au défaut de la for

ce, celui-ci appela la ruse et la trahison à son secours. Basilisque avait dejà débarqué une partie de ses troupes à Tripoli, et marchait sur Carthage, lorsqu'il s'arrêta tout à coup, revint sur ses pas, et accorda une suspension d'armes. C'était l'effet des présents et des promesses de Genseric. Pendant ce temps-là, le roi des Vandales fit armer en brûlots tout ce qu'il avait de vaisseaux dans le port de Carthage, les fit conduire pendant la nuit au milieu de la flotte des Romains, qui, en peu d'instants, n'offrit plus qu'un immense océan de feu: dans le désordre de l'incendie, Genseric tomba sur la partie de l'armée qui était débarquée, et la tailla en pièces. Tel fut le succès de la dernière expédition des Romains contre lui. Ni Léon, ni aucun autre empereur n'osa plus l'attaquer. Zénon, qui succéda à Léon,

lui demanda la paix; elle fut signée en 475. Genseric vécut encore deux ans, et mourut en 477, dans la soixanteonzième année de son âge, et la cinquantième de son règne, comblé de la gloire des conquérants, c'est-à-dire couvert du sang des peuples, et poursuivi par la malédiction de ses contemporains. Ce fut sans doute le plus grand prince de son siècle : vainqueur dans toutes les batailles où il se trouva en personne, créateur d'une marine redoutable, maître de Carthage et de l'Afrique, fondateur d'un empire; aussi ferme dans le gouvernement de ses états qu'habile à troubler ceux de ses ennemis, mais cruel et farouche, se complaisant au milieu des pleurs et du sang. Après s'être établi par la guerre, il laissa son royaume puissamment affermi par la paix, et mourut, sinon sans remords, au moins sans trouble, au sein d'une famille nombreuse et soumise. Il n'était pas moins cruel chez lui que chez les autres. S'étant imaginé que sa bru voulait l'empoisonner pour régner un peu plus tôt, sans autre information, il lui fit couper le nez et les oreilles, et la renvoya dans cet état an roi Théodemer, son père. Le nom de Genseric fut long-temps un objet d'effroi parmi les peuples d'Occident; et celui de sa nation est encore aujourd'hui synonyme de barbare, ennemi des arts et de l'humanité. Mme. Deshoulières a fait une tragédie de Genseric. G-s. GENSFLEISCH. Voy. GUTTEM

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dation de ce tribunal. Quand il fallut ensuite nommer des députés à la seconde assemblée nationale, Gensonné obtint facilement les suffrages de ses compatriotes. Il forma, dès ce moment, avec ses collègues Guadet et Vergniaud, une espèce de triumvirat Bordelais (Voy. GUADET et VERGNIAUD). connu sous le nom de faction de la Gironde ou des Girondins: parti malheureux, qui, après avoir été la principale cause de l'entière destruction de la monarchie, devait périr bientôt lui-même de la manière la plus déplorable. La population de Bordeaux qui, au moment où nous écrivons, montre tant d'attachement au gouvernement monarchique sous ses rois légitimes, manifestait alors des idées très voisines du système républicain. Forts de cet assentiment, ces députés, ou du moins les trois personnages que nous venons de nommer, et auxquels il faut joindre un autre de leurs collègues, nommé Grangeneuve, firent serment d'établir ce système, et prouvèrent, par leur conduite, qu'ils voulaient y être fidèles. Le commerce des Colonies, et particulièrement de Saint-Domingue, faisait la prospérité de Bordeaux. Avant d'être député, Gensonné avait adressé à l'assemblée constituante, au nom des Bordelais, un factum, dans lequel il prétendait prouver que l'indépendance des hommes de couleur ne pouvait qu'être favorable aux Colonies. Cette opinion qu'on cita dans l'assemblée constituante, lorsqu'elle s'occupait de leur sort, contribua beaucoup aux déterminations funestes qu'elle prit sur cet objet important. Avant d'entrer dans l'assemblée législative, Gensonné avait, en exécution d'un décret de l'assemblée constituante, été envoyé dans les

départements de l'Ouest, pour voir quel était l'esprit des habitants, relativement à la nouvelle constitution civile du clergé. Il fit son rapport à l'assemblée législative, dans les premiers jours de son installation, et déclara que presque personne ne reconnaissait les prêtres qui avaient prêté serment à cette constitution, en faisant sentir qu'il serait impossible de la faire adopter. Malgré cette déclaration, Gensonné prit part à toutes les mesures de rigueur, à tous les actes tyranniques dont les prêtres fidèles furent les victimes. Il fut membre du comite diplomatique que l'assemblée législative créa aussi dans son sein, comme un de ses moyens pour renverser l'autorité royale, et qui, en effet, y contribua beaucoup. Ce député discutait avec assez d'art, et suivait, avec opiniâtreté, les opinions qu'il voulait faire triompher. Railleur et caustique, il saisissait à propos les moyens qui produisent de l'effet dans une grande assemblée; et il obtint, de cette manière, un certain ascendant. Ce fut lui qui, au nom du comité diplomatique, proposa un décret d'accusation contre les deux princes, frères du Roi, le prince de Condé, le vicomte de Mirabeau et le marquis de Laqueille. Ce décret fut rendu, le 1. janvier 1792, à l'unanimité des voix: il n'y eut pas une seule opposition directe. Après cette victoire, Gensonné, d'accord avec les députés de son parti, qui formaient alors la faction véritablement républicaine, continua d'adopter toutes les mesures qui pouvaient provoquer à la guerre, telles que des interpellations à l'empereur d'Allemagne, de continuelles attaques contre les ministres du Roi, et surtout contre le pacifique Delessart. (Voyez BRISSOT.) Ce fut Gensonné qui, toujours au nom du comité di

plomatique, présenta, le 21 avril 1792, dans une séance du soir, le texte du décret qui déclarait la guerre à l'empereur d'Allemagne, comme souverain d'Autriche, de Bohème et de Hongrie. Cette résolution, qui a été suivie de tant de désastres, fut adoptée à la presque unanimité des voix : sept députés seulement se levèrent contre. Il

est remarquable cependant que le parti de Robespierre repoussa la guerre, et prit de là occasion pour attaquer le parti des Girondins, qui curent bientôt à se défendre contre ces nouveaux adversaires: Gensonné, Guadet et Brissot furent les premiers en butte aux traits de ce parti. Alors ils employèrent tous leurs moyens pour conserver, en leur faveur, l'opinion populaire; ils imaginèrent mille ruses pour exalter les passions de la multitude. A peine la guerre fut-elle déclarée qu'ils s'efforcèrent de faire croire à l'existence, à Paris, d'un comité autrichien, dans lequel ils firent entrer leurs adversaires, les royalistes de toutes les couleurs. Ils répandirent que, d'accord avec la cour, ce comité s'occupait d'opérer là contre-révolution, et de faire arriver l'armée de l'empereur en France. Gensonné s'engagea à prouver la réalité du projet; mais il ne fit que répéter les articles des gazettes, que ses amis et lui-même avaient composés. Il voulut faire décréter d'accusation MM. de Montmorin et Bertrand de Moleville, ministres du Roi; mais il ne put alors y parvenir: Après les événements séditieux du 20 juin 1792, il attaqua vivement M. de la Fayette, qui demandait que les auteurs de cette journée fussent punis: cependant comme Gensonné et son parti redoutaient surtout Danton et Robespierre, ils pensèrent un moment à se rapprocher de la cour,' et employèrent, pour faire parvenir

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