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LES ARCHIVES DU HAVRE

Le Duc Armand-Jean de Richelieu. Lettres de Louis XIV

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et d'Anne d'Autriche.

Par M. E. BORÉLY

Membre Résidant.

La Société d'Etudes Diverses a reçu, à la fin de l'année dernière, une circulaire de son Excellence Monsieur le Ministre de l'Instruction Publique, datée du 26 avril 1856 et relative à la correspondance du cardinal Mazarin.

Le comité de la langue, de l'histoire et des arts de la France, a déjà publié, ou publie en ce moment, une collection très importante pour notre histoire nationale, des correspondances de Catherine de Médicis, des Princes de la Maison de Lorraine, de Henri IV, de Richelieu, la correspondance administrative de Louis XIV et les négociations relatives à la succession d'Espagne.

La circulaire signalait dans cette série de correspondances historiques, une lacune de dix-huit ans, de 1643 à 1661, époque, comme on le sait, pendant laquelle Mazarin a gouverné la France. La Société était invitée à rechercher les documents qui pourraient entrer dans cette publication et à contribuer ainsi, pour sa part, si ses investigations étaient couronnées de succès, à l'achèvement de ce magnifique recueil,

véritable monument national dont les matériaux sont rassemblés, jour par jour, de tous les points de l'Empire, appréciés et mis en ordre sous les auspices de Son Excellence le Ministre.

La circulaire officielle dirigeait nos recherches et signalait comme sources auxquelles nous pourrions appliquer, peutêtre avec succès, nos investigations: 4° Les archives judiciaires et municipales des départements; 2o les bibliothèques publiques; 3° les archives des anciennes familles. De 1648 à 1653 surtout la correspondance de Mazarin avec les intendants, les gouverneurs, les commandants des places fortes, les parlements et les administrations municipales fut très active; pendant cette déplorable période des troubles de la Fronde il eut constamment à exciter le zèle de ses partisans, et à défendre, bien moins encore son gouvernement, que le pouvoir lui-même si violemment attaqué dans sa personne et dans celle de la Reine-mère régente du royaume, Anné d'Autriche.

La Société m'a confié la mission laborieuse de la suppléer pour ces recherches auxquelles nous conviait Son Excellence le Ministre, et je viens aujourd'hui lui rendre compte des résultats auxquels m'ont conduit mes premières explorations.

Des divers dépôts auxquels nous adresse la circulaire, je n'ai pu consulter encore que les seules archives municipales, et ici, je dois tout d'abord rendre mille actions de grâce à la bienveillante complaisance avec laquelle Monsieur J.-B. Dorey a mis à ma disposition les collections et les documents relatifs aux années que j'avais particulièrement à interroger.

Les archives municipales du Havre étaient naguère dans un désordre qu'on eût pu croire inextricable. Quelques heureuses tentatives avaient, dit-on, été faites pour mettre un terme à ce regrettable état de choses, quand, sur l'invitation du gouvernement, un remaniement général dut être fait, d'après un nouvel ordre de classification tracé par le Ministre lui-même le soin de répondre à cet appel fut confié à M. Dorey qui s'est acquitté de cette ingrate tâche avec beau

coup de méthode et d'ardeur, et aujourd'hui, grâce surtout au patient et intelligent archiviste, rien de plus lucide que ce trésor des vieux âges, si longtemps obscur et négligé.

Désormais on pourra sans fatigue et presque sans peine, puiser à ce précieux dépôt : on y trouvera, dans leur ordre chronologique, une foule de documents relatifs à l'administration municipale du vieux Havre, aux rapports des magistrats locaux avec le pouvoir central, aux exigences du fisc suivies quelquefois de réclamations respectueuses, mais fermes, de la part des bourgeois de la bonne ville; - on y verra figurer, parmi les notables citoyens de la cité, des marchands du xvre ou du xvIIe siècle, dont les descendants, encore parmi nous, ajoutent par leur mérite personnel, à la juste considération d'un nom depuis des siècles honoré; un fait frappera surtout : c'est l'importance qu'avait déjà Le Havre, dès le commencement du XVIIe siècle; aux yeux du Gouvernement, sous Louis XIII, sous Louis XIV, votre ville est déjà des plus considérables du Royaume, et comme ville de commerce, et comme place forte à l'embouchure de la

Seine.

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Enfin, vos archives, comme toutes les archives locales, peuvent révéler d'une manière éclatante, combien les rapports de l'autorité avec les bourgeoisies, étaient empreints de bienveillance et d'estime de la part du pouvoir, de respect et de dévouement de la part des sujets droits et devoirs réciproquement bien sentis, mœurs fortes, vertus publiques, naïf et intrépide sacrifice de la personnalité en présence de l'intérêt public, en présence de la loi, de l'autorité. Elles témoignent de toutes ces conditions vitales des grandes nations et qui, dans la vieille France et sous cette ancienne Monarchie si outrageusement dénigrée par l'ignorance ou l'esprit de parti, avaient, pour les diriger, un sentiment élevé et profond, dominant tous les autres et pouvant même les suppléer : le dévouement absolu à la personne du Souverain, comme expression la plus haute du pays, et noble et auguste personnification de la France notre chère patrie.

Pour ma part, j'abordai vos archives avec confiance, j'espé

rais y trouver quelque document, quelque pièce historique se rapportant à l'Administration du Cardinal Mazarin; j'espérais y trouver quelque trace de la captivité de Condé, de l'apparition au Havre du grand Ministre d'Anne d'Autriche : j'ai été, sous ce rapport, complétement désappointé.

Les Princes de Condé, de Conti et le Duc de Longueville furent arrêtés le 18 Janvier 1650 et enfermés à Vincennes; en Juin de la même année, l'armée des Espagnols qui s'était emparée dans le Nord, du Catelet, de Vervins et de Rethel, pousse une avant-garde pour surprendre Vincennes; les Princes sont alors transférés à Marcoussis et de là au Havre.— J'espérais trouver, datés de cette époque, quelques documents, comme appel fait au zèle des officiers municipaux, demande du concours des milices bourgeoises, etc.

La nouvelle Fronde vaincue, la vieille Fronde ou le parti parlementaire, non moins antipathique à Mazarin, s'allie à la première, entraîne le Duc d'Orléans, veut imposer à la Régente l'abandon de son Ministre; le Parlement demande formellement le renvoi du Cardinal, la liberté des Princes; le peuple se soulève, se porte à des violences extrêmes et menace la vie même de Mazarin. Anne d'Autriche qui, disait-elle, ne voulait pas, comme Charles Ier, abandonner son Ministre à la rage populaire, prend la résolution de se retirer au Havre avec le Cardinal, afin d'y délivrer les Princes et de marcher ensuite avec eux contre Paris. Les préparatifs de départ furent faits et Mazarin prit toutes dispositions militaires à cet égard: il dut nécessairement, dans cette circonstance encore, écrire au Havre, faire prendre aussi dans cette ville des mesures propres à assurer la réussite de ce nouveau projet. — J'espérais donc ici encore trouver quelque pièce importante.

Enfin, au commencement de Février 1654, la Reine se trouve prisonnière des deux Frondes, et Mazarin, qui est sorti de Paris et contre lequel le Parlement a prononcé un arrêt de bannissement, se rend au Havre, et y vient lui-même mettre les Princes en liberté, le 14 Février 4654. — J'avais donc ici une troisième espérance.

Or, voici ce qui existe, ou plutôt ce qui n'existe pas dans vos

archives de Janvier 1650 à Mars 1651 environ, pièces et documents de tout genre ont disparu. Cette lacune, ce me semble, ne peut avoir été occasionnée par un accident fortuit. ` La collection des archives a été divisée et ordonnée sous quatre chefs principaux, que je puis formuler ainsi :

4o Registres et actes municipaux;

2o Actes royaux, ordonnances, décrets etc.; 3o Livres et actes de la police, etc.;

4o Correspondances de toute nature.

J'ai vérifié, sous ces quatre chefs de classification, les dossiers, registres et cartons se rapportant à l'époque, objet spécial de mes recherches; dans chaque division, quand je suis arrivé à la fin de Décembre 1649 ou à Janvier 4650, lacune complète; sous chaque chef, les pièces recommencent à Mars ou Avril 1651.

J'ai de la peine à croire que cette quadruple lacune soit le fait du hasard; je serais au contraire disposé à en conclure que des documents, sans nul doute importants, ont été ravis, à une époque inconnue, par une main inconnue, à vos archives municipales; et on ne saurait trop déplorer une perte si regrettable.

Je n'aurais pourtant pas voulu revenir de mes excursions sous les combles de la Mairie, sans le moindre butin, et j'ai été assez heureux, dans une inspection si rapide, pour mettre la main sur quelques documents qui ne sont peut-être pas sans importance. Ils appartiennent d'ailleurs à la correspondance administrative de Louis XIV et rentrent ainsi, en partie du moins, dans l'objet de la circulaire ministérielle.

Il s'agit d'une lettre de Louis XIV, dès son avénement au trône, et d'une lettre d'Anne d'Autriche, écrite trois jours après la mort de Louis XIII. Louis XIV, qui n'était âgé que de quatre ans et demi, n'a évidemment pas écrit la lettre qui est sous son nom; est-ce Anne d'Autriche qui l'a dictée, ou bien est-ce Mazarin qui déjà avait toute la confiance de la Reine-Mère? On peut, ce me semble, admettre avec quelque raison, l'une ou l'autre hypothèse. Quant à la lettre de la nou

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