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Dans un quartier de Londres, nommé Tower hill, il imagine de se donner pour un charlatan italien, fait dresser un théâtre de planches, et sous le nom d'Alexandre Bendo, débite une harangue très-plaisante, conservée dans les éditions non épurées de ses œuvres. Le lendemain, une foule de malades assiégeaient la porte de l'auberge où il avait donné, son adresse; mais il n'y avait jamais parų. Quel déplorable abus des talens les plus heureux! Bientôt la double, passion des femmes et du vin altéra sa santé. Brouillé avec Buckingham pour une bagatelle, il fut appelé en duel. Arrivé au lieu du rendez-vous, il refusa de se battre, et perdit sa réputation de bravoure. Alors, âgé de trente ans, il donna dans tous les excès, de la débauche, ne passa plus un jour sans être ivre, et mourut d'épuisement trois ans après.

Telle fut la courte et triste existence

d'un homme que la nature et la fortune avaient comblé de leurs faveurs. Avec une autre conduite, Rochester eût peutêtre été le plus grand poëte de l'Angleterre. Ses satires brillent de pensées fines ou profondes. Dans la haute poésie, il a de la force et de l'élévation; dans la poésie légère, de l'aisance et de la gaieté; jamais un vers faible, jamais une ligne insignifiante. Son génie, et le terme n'est pas trop fort, était une mine inépuisable d'idées et de saillies.

cette

On remarque, dans ses vers grâce paresseuse, cette aisance de cour, cette gaieté originale, ce sarcasme piquant d'un jeune courtisan débauché. Ses pièces les plus sérieuses ont toujours le cachet d'une muse enjouée et libertine. J'ai dû, en traduisant la satire sur l'homme et celle contre le mariage, adoucir quelques traits de pinceau un peu trop hardis.

Son poëme, intitulé Nothing (Rien), passe pour son chef-d'œuvre : il est

fortement pensé et largement écrit. J'en citerai deux strophes pour inspirer le desir de le lire en entier :

NOTHING.

NOTHING, thou elder brother ev'n to shade, Thou had'st a being ere the world was made, And, well fix'd, art alone of ending not afraid.

SOMETHING, the nat'ral attribute of all Sever'd from thee, it's sole original, Into thy boundless self must undistinguish'd fall.

ROCHESTER, nothing.

RIEN.

*Rien, toi frère aîné même de l'ombre,

tu avais une existence avant que le monde fût fait, bien déterminé, toi seul ne crains pas de finir.

et,

Quelque chose, le naturel attribut de tout, séparé de toi, son seul original,

doit tomber indistinctement dans ton immensité.

DRYDE N.

See great Dryden, whose tuneful muse affords
The sweetest numbers and the fittest words.
Whether in comic sounds, or tragic airs,
She forms her voice, she moves our smiles and tears.
If satire or heroic strains she writes,

Her hero pleases, or her satire bites.

From her no harsh, unartful numbers fall,

She wears all dresses, and she charms in all.*

ADDISON, on the english poets.

*Voyez le grand Dryden, dont la muse harmonieuse fait entendre.

les plus doux sons et les plus justes expressions.

Soit qu'en rimes comiques ou en vers tragiques,

sa voix s'exprime, elle excite nos sourires ou nos larmes,

Si elle écrit des vers héroïques ou satiriques,

son héros plaît, ou sa satire mord.

De sa bouche ne tombent aucuns chants durs ou

sans art;

elle porte tous les costumes, et dans tous elle charme.

How long, great poet, shall thy sacred lays Provoke our wonder, and transcend our praise? Thou mak'st the beauties of the Romans known, And England boasts of riches not her own; Thy lines have heighten'd Virgil's majesty, And Horace wonders at himself in thee. Thou teachest Persius to inform our isle In smoother numbers, and a clearer style; And Juvenal, instructed in thy page, Edges his satire, and improves his rage; Now Ovid boasts th'avantage of thy song, And tells his story in the british tongue.

*Jusques à quand, grand poëte, tes chants sacrés exciteront-ils notre étonnement, ou surpasseront-ils nos louanges?

Tu fais connaitre les beautés des romains,

et l'Angleterre se vante de richesses qui ne sont pas les

siennes.

Tes lignes ont rehaussé la majesté de Virgile,

et Horace s'admire lui-même en toi.

Tu apprends Perse à réformer notre île,

dans des vers plus doux et dans un style plus clair. Et Juvénal, instruit dans tes pages,

aiguise sa satire et redouble son ardeur;

aujourd'hui Ovide s'enorgueillit de tes chants,

et raconte ses histoires en langue anglaise.

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