Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

signer lui-même, il ouvrit une école qui attira un grand nombre de disciples, et lui fournit des revenus assez considérables. Craignaut le danger des richesses et de la vaine gloire, il portait déjà un cilice sous ses habits, priait, jeûnait, veillait, se levait quelquefois pendant la nuit, et se plongeait dans l'eau jusqu'à ce que son corps fût transi par le froid. Il résolut enfin de quitter le monde, et entra dans l'ermitage de FontAvellana, que le B. Ludolphe avait naguère fondé dans l'Ombrie, au pied de l'Apennin. Gui, abbé de Pomposie, le demanda pour instruire ses disciples; il passa deux ans dans cemonastère, et fut élu abbé de FontAvellana en 1041. Il fonda divers ermitages, eut pour disciple S. Rhou et S. Jean de Lodi, qui devinrent évêques de Gubbio, et S. Dominique surnommé l'encuirassé. Il avait rendu de grands services aux papes Grégoire VI, Clément II, Léon IX et Victor II, lorsqu'Étienne IX le créa cardinal- évêque d'Ostie, en 1057. Mais pour décider son acceptation, il fallut le menacer des foudres del'église. L'année suivante, Jean évêque de Velletri, ayant été élu pape contre toutes les règles, prit le nom de Benoit X. Pierre Damien s'opposa de toutes ses forces à l'intrusion violente et simoniaque de ce prélat, le décida enfin à renoncer à son élection, et fit agréer celle de Nicolas II. Bientôt après, il fut envoyé avec Anselme, évêque de Lucques, en qualité de legat à Milan, où sa vie fut menacée tandis qu'il sévissait contre les prêtres coupables de simonie. En 1062, il prit le parti d'Alexandre H contre l'empereur qui soutenait l'anti - pape Cadalous. Ce dernier céda aussi aux instances de l'évêque d'Ostie et se désista de ses prétentious.

Cependant Pierre Damien ne cessait de soupirer après la solitude, et son aversion pour le monde était augmentée par les désordres et l'esprit de simonie qui régnaient alors dans le clergé. Il obtint enfin, après beaucoup de difficultés, la permission d'abdiquer, et rentra dans le désert de Font-Avallana, où il voulait vivre désormais en simple religieux. Mais en 1063, il fut envoyé en France en qualité de legat, chargé de fixer la juridiction de quelques évêques, et de juger ceux qui s'étaient rendus coupables de simonie. Sa conduite réunit tous les suffrages. En 1069, il sortit encore de sa cellule pour aller, avec le titre de legat, s'opposer au divorce que demandait Henri IV, roi de Germanie. Ce prince se rendit aux prières de Damien, qui retourna dans son désert, et en sortit encore en 1071, chargé d'aller rétablir l'ordre à Ravenne, dont l'archevêque venait d'être excommunié pour des crimes énormes. Epuisé par la fatigue de ce dernier voyage, et affaibli par de longues austérités, Pierre Damien mourut à Faenza le 22 février 1072, à l'âge d'environ quatre-vingttrois ans. « Ses austérités, dit Baillet, » le suivaient partout. Il ne quittait »> nulle part les cilices, les chaînes de » fer, les disciplines; il priait, jeû»> nait, veillait dans les villes et dans » ses voyages comme dans son er» mitage. » Une natte étendue par terre lui servait de lit; il ne prenait aucune nourriture pendant les trois premiers jours de l'avent et du carême. Dans ces temps de jeûne, il ne mange it rien de cuit, et ne vivait que d'herbes crues trempées dans l'eau. I composa de nombreux écrits dans sa cellule, où il se renfermait comme dans une prison. Le travail des mains lui servait de délassement.

tion assez étendue pour le siècle où il vivait; mais son style est diffus et embarrassé; ses raisonnements manquent souvent de justesse; ses preu ves sont, pour la plupart, des explications arbitraires des livres saints, des apparitions de morts, ou d'autres histoires invraisemblables. Il se déclara le défenseur zèle de plusieurs devotions nouvelles, surtout des flgellations et des compensations de pénitence. «S'il est permis, dit-il, de se donner cinquante coups de discipline, pourquoi ne s'en donnerait-on point soixante ou cent? Et si l'on peut s'en donner cent, pourquoi se rait-il défendu de s'en donner mille? Ce qui est bon ne peut être pousse trop loin. Si le jeûne d'un jour est bon, celui de deux ou trois jours est me leurs encore. » — « Suivant ce prin»cipe, dit le rédacteur du Diction

Il faisait alors des cuillers de bois ou d'autres petits ouvrages du même genre. En même temps, « il était le >> principal organe des souverains » pontifes, auxquels il prêtait le mi>>nistère de sa plume pour écrire aux » princes sur les affaires les plus im»portantes de la religion. Il en était >> aussi le conseiller et le guide; de sor» te qu'on peut dire qu'il avait sous » leur nom presque toute l'administra» tion de l'église universelle. » (Baillet. Quoique Pierre Damien n'ait point été canonisé dans les formes ordinaires, il est honoré le 23 fevrier avec le titre de patron à Faenza et à FontAvellana. Il y a plusieurs éditions de ses œuvres avec des notes de Constantin Cajetan; les plus amples sont celles de Paris, 1642 et 1663, divisées en quatre tomes qu'on relie en un seul volume in-fol., et qui contiennent: I. cent cinquante-huit let-»naire des auteurs ecclésiastiques,ļa tres distribuées en huit livres; II. Soixante-quinze sermons; II. les Vies de S. Odilon de (luni, de S. Maur, évêque de Césène, de S. Romuald, de S. Rhou ou Rodolphe de Gubbio, de S. Dominique, dit l'Encuirasse, de Ste. Lucile, et de Ste. Flore, vierges et martyres dont on ne sait rien de certain; IV. soixante opuscules on distingue ceux où l'auteur traite des devoirs des ecclésiastiques, et ceux qui ont pour titre Tractatus de correctione episcopi et papa; et Disceptatio synodalis inter imperii romani advocatum et ecclesiæ romanæ defensorem, de electione principis romani. Ces deux traités ont été imprimés à Francfort en 1614 et 1621. On remarque en général dans les écrits de Pierre Damien, qui sont utiles pour la connaissance de l'histoire ecclésiastique du 11o. siècle, un grand zèle pour la réformation des mœurs, et une érudi

» perfection serait de se laisser mou» rir de faim, ou d'expirer sous les » coups de discipline. » La vie du B. Pierre Damien a été écrite par Jean de Lodi, son disciple, et p bliée par Mabillon (Voy. les Bol landistes, D. Ceillier et Fleury.)

V-VE.

DAMIENS (ROBERT-FRANÇOIS régicide, naquit à Tieulloy, dans le diocèse d'Arras. Son père était portier à la prévôté d'Arc, près de St. Omer. Les inclinations vicieuses de Damiens le firent appeler, dès sa jeunesse, Robert le diable. Un de ses oncles, ca baretier à Béthune, lui fit apprendre à lire et à écrire, et le mit en appren tissage chez un serrurier. Bientôt après Damiens s'enrôla: son oncle acheta son congé; il s'enrôla une se conde fois, déserta, et entra dans l'abbaye de St.-Waast d'Arras pour y apprendre la cuisine. Il n'y resta pas long-temps, et servit, cn

qualité

» mence. » A cette époque, la cour était divisée. La marquise de Pompadour avait son parti; le dauphin en avait un autre. La querelle née du refus des sacrements agitait tous les esprits. Les parlements, occupés d'af faires religieuses, étaient comme en insurrection; cent quatre-vingts membres du parlement de Paris avaient donné leur démission. La guerre embrasait l'Europe; le peuple souffrait et murmurait les discours étaient violents, et Damiens put facilement s'exa!ter. Il servait depuis quelques jours un négociant de Pétersbourg, lorsque le 14 juillet 1756, il lui vola 240 louis, et s'enfuit en poste à Arras. Son sigualement fut envoyé dans l'Artois. le sut, tomba dans un accès de fureur, et essaya de se détruire à force d'émétique ou de poison. Il se rendit ensuite à St.-Venant, se fit saigner plusieurs fois, et, se trouvant un jour à Poperingue, il dit : « Si je reviens » en France... oui, j'y reviendrai; j'y » mourrai, et le plus grand de la terre » mourra aussi, et vous entendrez par»ler de moi. » Il se fit saiguer le 4 novembre à Austreville, et le 20 décembre à Arras. Il prit pendant plusieurs jours de l'opium. On l'entendit parler seul et se plaindre des malheurs où il allait plonger sa femme et sa fille. li avait successivement pris le nom de Lefèbre, de Flamant, et il portait celui de Guillemant, lorsque le 25 décembre, il se fit enregistrer au bureau des carosses, sous le nom de Bréval. Il arriva le 31 dans la capitale. Il se hata de visiter son frère, sa femme et sa fille, qui lui reprochèrent son imprudence. I promit de quitter bientôt Paris, annon

de domestique, un officier suisse, avec lequel il se trouva au siége de Philisbourg. Il passa bientôt au serVice du comte de Raymond, et fit avec la un voyage en Bavière. Un de ses oncles, maître-d'hôtel au college de Louis-le-Grand, à Paris, le fit recevoir en qualité d'un de ces valets de réfectoire appeles cuistres. Quinze mois s'étaient écoulés, lorsqu'ayant refusé de se soumettre à une punition, sans doute méritée, Damiens fat congedie; mais après avoir servi dans diverses maisons pendant l'espace d'une année, il rentra comme domestique dans le même college. On remarqua qu'il était taciturne, emporté, toujours disposé à s'élever contre ses supérieurs. En 1739, il épousa une des femmes de la comtesse de Crussol, et sortit du college. I continua de servir des maîtres de toutes conditions, des jansenistes, des molinistes, des parlementaires; la Bourdonnaye, à qui il vola cinquante louis; Beze de Lys, conseiller au parlement, qui le garda pendant deux ans; la maréchale de Montmorenci, qui le congédia comme ivrogne et que relleur; Me, de Ste.-Rheuse, qui le chassa, après lui avoir prédit qu'il serait rompu vif, etc. Dimiens changeait souvent de nom. Son inconstance et la sombre inquiétude de son caractère ne lui permettaient guère de rester long-temps dans la même maison. Il était vain, curieux, nouvel liste, frondeur, hardi et dissimulé; il s'apercevait lui-même de l'effervescence de son sang, et cherchait à la caliner par de fréquentes saignées. Sa taille était assez élevée; il avait le visage un peu alongé, le nez aquilin, le regard perçant et la bouche enfonça à sa fille qu'elle ne le reverrait plus, cee. « C'était un homme, dit Voltaire, et que la démission des membres du » dont l'humeur sombre et ardente parlement était le motif de son retour. » avait toujours ressemble à la dé- Le 3 janvier 1757, à onze heures

apercevant Damiens qui avait conse ve son chapeau sur la tête : « C'est

de la nuit, il prit une chaise au bureau des voitures de la cour, et ar iva seul à Versailles sur les trois heu-homme-là, dit-il, qui m'a frappe; res du matin. Il descendit dans une auberge, se coucha, et dormit jusqu'à deux heures de l'après-midi. Il sortit ensuite, se promena dans le parc et dans les cours, passa quelque temps au cabaret, et revint à son auberge à onze heures du soir. Le lendemain il était encore au lit à deux heures après midi. Il demanda un chirurgien, et voulut être saigué, mais on crut qu'il plaisantait, et cette demande resta sans suite. Damiens soutint depuis, dans tous ses interrogatoires, que, si on lui avait tire du sang, il n'aurait point attente à la vie du roi. Il sortit sur les trois heures par un froid rigoureux. On le vit rôder dans les cours du château. Un garde de la porte entendit un inconnu qui, l'abordant sous la voûte de la chapelle, lui dit : « Eh bien!» et Damiens qui répondit : « Eh bien! j'attends.» Louis XV était revenu dans l'après-midi de Trianon, pour voir Me. Victoire qui était malade. Sur les six heures, il sortit de l'appartement de la princesse, accompagne du dauphin et des grands officiers de la couronne. Damiens s'était caché dans un petit enfoncement au bas de l'escalier. Le roi allait monter en carrosse, lorsque, pénétrant à tra vers la haie des gardes du corps et des cent-suisses, le monstre se précipite au milieu des courtisans, heurte en passant le dauphin et le duc d'Ayen, capitaine des gardes, et, armé d'un couteau, frappe le monarque au côté droit, au-dessus de la cinquième côte, Louis s'écrie: « On m'a donné un

[ocr errors]

»coup de coude; » puis, passant la main sons sa veste, il la retire ensanglantée, et dit : « Je suis blessé; » au même instant, il se retourne, et,

» qu'on l'arrête, et qu'on ne lui five » point de mal. » Damiens aurait s'évader dans la foule, au milieu d désordre. Mais il estait immobile lc: qu'il fut saisi par un des valets & pied, et conduit dans la salle d gardes. On trouva sur lui une sour d'or assez considérable (huit à cents francs); un livre intitulé: La tructions et Prières chrétiennes, le couteau, instrument de son cr Il était composé de deux lames, fase large et pointue, l'autre en forme de canif, longue de quatre à cinq poate Damiens s'était servi de cette dernier.. Tandis que l'effroi régnait dansk château, qu'on cherchait des chir giens et un confesseur, qu'on ignérait si la blessure, profonde de qu tre travers de doigt, n'était point mtelle, et si elle n'avait point ete f avec une arme empoisonnée, le regicide répéta plusieurs fois: « Q » prenne garde à M. le dauphin qe » M. le dauphin ne sorte point da » journée!» L'alarme devint al générale, et les esprits troubles cr rent qu'il existait une conspirati contre la famille royale. Le garde des sceaux (J. B. de Machault), 2 sissant lui-même Dainiens au colet le fit tenailler aux jambes avec pinces rougies à un feu ardent; il donna qu'on apportât plusieurs figs, et menaça l'assassin de le faire jetr dans les flammes, s'il ne nom ses complices Ils sont bien lo » dit-il, et si je les déclarais, to » serait fini. » Depuis, il avoua ph sieurs fois qu'il avait des complices On lui offrit sa grâce s'il voulait la nommer, il répondit : « Je ne le pu » ni ne le dois. » Une autre f pressé de parler, il s'écria: « Qu

:

[ocr errors]

de monde dans l'embarras ! » Mais dans la suite il se rétracta, soutint jusqu'a la mort qu'il n'avait point de comlices, et répondit à toutes les promess de grâce: » Je ne puis y compter. Je dois mourir, et je veux mourir › comme J.-C., dans les douleurs et les tourments. » Ou pourrait croire, l'après cette réponse, que le fanatisme eligieux avait armé son bras; mais il at appris au procès, par ses aveux t par divers moignages, qu'il déclaait souvent contre le clergé, et que, ix mois avant de commettre son crine, il refusait d'aller à la messe. Le préot de l'hôtel s'empara du coupable t commença contre lui une première rocedure. En même temps le prince e Croy se rendit à Arras, et fit faire e longues informations qu'il dirigea i-même. Dès que la nouvelle de l'asassinat du roi se fut répandue dans Paris, on fut généralement étonné t révolté d'un crime qui ne s'était pas enouvelé depuis un siècle et demi. amiens osa écrire au roi une lettre ingulière que Voltaire a insérée dans on Précis du siècle de Louis XV. Iue restait du parlement de Paris ue la grand'chambre; le 15 janvier, es lettres - patentes lui attribuèrent instruction du procès. Cette instrucon fut dirigée par le premier, préident (de Maupeou) et le second résident (Molé). Le doyen Severt ut nommé rapporteur, et le conseiler (Pasquier), second rapporteur. Damiens fut transféré à la Conciererie, le 18, à deux heures de la tuit. On avait pris des précautions nouïes, et l'apareil fut extraordiaire. Il y avait défense à qui que e fût de se mettre aux fenêtres pour voir passer ce misérable. Il était dans in carosse à quatre chevaux, acompagné d'un chirurgien du roi, et le de deux gardes de la prévôté. Six ser

gents marchaient à chaque portière; de nombreux detachements formaient l'escorte; d'autres battaient les avenues; d'autres étaient placés de distance en distance depuis Versailles jusqu'à la Conciergerie. Arrivé à la porte de cette prison, Damiens fut mis dans une espèce de hamac, afin qu'il n'essayât point de se détruire contre les murs, tandis qu'on le montait au premier étage de la tour de Montgommery, où il fut enfermé dans la même chambre qu'avait occupée Ravaillac. Des sentinelles furent placées dans l'escalier. Un corps-de-garde de cent hommes fut établi à la Conciergerie. Quatre sergents du régiment des gardes etaient nuit et jour dans la chambre, huit autres dans la pièce au-dessous; Damiens était couché sur un lit entouré d'une estrade matelasséc. Les bras, l'estomac, les cuisses et les jambes étaient assujéties par de nombreuses courroies qui se rattachaient à des anneaux sceliés à terre. Les plaies occasionnées par la brûlure des pieds faite à Versailles, forcètent Damiens de rester couché pendant plus de deux mois. Quatre soldats faisaient auprès de lui les fonctions d'infirmiers. Un officier de la bouche, chargé de sa nourriture, suivait le régime prescrit par les médecins, et un chirurgien, qui couchait dans la prison, faisait l'essai de tous les aliments. Le médecin Boyer le visitait trois fois par jour. Enfin, les frais que coutait au domaine ce misérable, montaient à plus de 600 livres par jour. Le premier interrogatoire devant les commissaires commença le 18 janvier et ne fut clos que le 17 mars. Damiens fit cette déclaration: « Je n'ai point eu l'intention de » tuer le roi; je l'aurais tué, si je l'a» vais voulu.» (On crut en effet que le coup cût pu être mortel, i Damiens s'était servi de la grande lame

« ZurückWeiter »