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avec le pinceau le plus délicat et le plus vrai dont le gratifie son apologiste, ce serait en effet un écrivain peu commun; car on ne s'exprimerait pas autrement à l'égard d'un poète comique du premier ordre; mais il est faux que l'auteur du Sopha et des Égarements ait fait le tableau de nos mœurs; il n'a fait que celui de quelques travers passagers, accrédités par un petit nombre de sots et de femmes effrontées; et si le jargon qu'il leur prête était à la mode, ce n'était qu'entre eux; ce jargon ne sortait pas des cercles qu'ils fréquentaient, et il n'était point entendu dans les maisons où se rassemblaient les personnes de bon ton, ce qu'on appelait la bonne compagnie. Les ouvrages de Crébillon curent de la vogue, comme en ont eu dans tous les temps les productions où l'on présente avec quelque agrément des peintures obscènes, où l'on justifie avec subtilité des principes licencieux; mais ils ne peuvent être considérés comme tableaux de mœurs générales. Ce sont des exceptions qui ne valaient guère la peine d'être décrites. Non seulement le style en est obscur et souvent inintelligible, mais le systême de corruption que l'auteur y développe n'a pas même cette sorte d'attrait qui, s'il ne justifie pas le cynisme, lui fournit peut-être quelques excuses spécieuses. Crébillon manque essentiellement de verve et de chaleur; et si le délire des sens, la fougue d'une imagination vivement exaltée peut jusqu'à un certain point provoquer l'indulgence, rien n'est plus rebutant que cette froide dépravation enveloppée des subtilités d'une fausse dialectique. Ce qu'il y a de surprenant, c'est que les mœurs de cet écrivain n'étaient point du tout analogues à celles de ses écrits. Crébillon fils avait un es

prit gai, un coeur droit, des mœurs douces et honnêtes. Il vivait avec son père dans la meilleure intelligence, comme avec un frère ou un ami; circonstance qui nous semble honorable pour tous les deux, et qui venge Crébillon père des imputations caIomnieuses des conteurs d'anecdotes. La conversation de Grebillon fils était agréable; il était malin, mais sans trop de causticité, aussi mérita-t-il d'avoir des amis, et il n'était pas un des convives les moins joyeux de cette société des dominicaux ( ainsi nommés parce qu'ils s'assemblaient le dimanche), et de celle du caveau, devenue si célèbre par la réunion de Piron, Collé, Gallet et autres écrivains et chansonniers qui venaient y oublier leurs prétentions littéraires, et ne songeaient qu'au plaisir de mettre en communauté leur esprit et leurgaîté. L'abbé Boudot, l'un de ses amis les plus intimes, lui dit un jour, pour repousser quelques-unes de ses plaisanteries « Tais-toi...., ton père » était un grand homme; tu n'es, » toi, qu'un grand garçon, » et le grand garçon ne se facha pas de cette saillie. Ses principaux ouvrages sont: I. Lettres de la marquise de*** au comte de***, 1732, 2 vol. in12, métaphysique de galanterie exprimée dans un style énigmatique, mais moins graveleux que celui de ses autres ouvrages; II. Tanzaï et Néadarné, 1734, 2 vol. in 12. Ce roman fit mettre l'auteur à la Bastille. Les biographes qui nous ont précédé disent qu'on ne sait à quoi tend cet ouvrage, ni quel en est le but. « Tanzai, dit La Harpe, qui n'est >> qu'un libertinage d'esprit, eut de » plus, dans sa naissance, le piquant » de l'allusion et de la satire. On crut » y voir l'allégorie d'une bulle fa» meuse dont on a tant parlé et don

pa

» on ne parle plus, et la critique du » style de Marivaux, que l'auteur »rut contrefaire très heureusement » dans la fée Moustache; car il est >> aussi aisé de contrefaire le mauvais »style que difficile d'imiter le bon ». Toutes ces allusions n'ont plus aucun sel aujourd'hui, et si les oisifs lisent encore Tanzaï, ce ne peut être que pour les obscénités dont il est rempli. III. Les Egarements du cœur et de l'esprit, la Haye, 1736, 3 parties in-12; c'est peut-être le seul ouvrage où Crébillon fils ait fait preuve d'un véritable talent; mais il n'est pas terminé, ce n'est qu'un croquis où l'on trouve des scènes assez bien tracées, et dont le dialogue est plus naturel que dans ses autres romans. Versac est un impudent précepteur du vice, qui a peut-être servi de modèle au Valmont des Liaisons dangereuses de Laclos; mais celui-ci est plus en action et plus dramatiquement tracé que le Versac des Égarements, lequel n'est souvent qu'un raisonneur fort insipide. IV. Le Sopha, conte moral, 1745, 1749, 2 vol. in-12; c'est par anti-phrase que l'auteur a nommé conte moral l'un des plus licencieux de ses ouvrages. Le personnage du sulthân Schabaham est fort plaisant. Sa profonde bêtise divertit et anime un peu ce conte, dont l'invention et l'exécution sont également très vulgaires. V. Les Amours de Zeokinisul, roi des Kofirans (Louis XV, roi des Français), Amsterdam, 1746, in-8°., réimprimé avec la clef, 1770, et 1779, in-12. VI. Lettres athéniennes, 4 vol. in-12, 1771.VII. Ah! quel conte! 1764, 2 vol. in-12; VIII. Les heureux Orphelins, 1754, 2 vol, in-12; IX. la Nuit et le Moment, Londres, 1755, in - 12; X. le Hasard du coin du feu, Paris, 1763, in-12; XI. Lettres de la du

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chesse de ***, Londres, 1768, vol. in 12. Tous ces ouvrages sont dignes de l'oubli dans lequel ils sont plongés. Ils n'offrent ni invention, ni intérêt, ni style, et les peintures dont l'auteur était si prodigue y manquent même de ce coloris imposteur qui fit avoir dans le temps quelque vogue à ses premiers ouvrages. On doute qu'il soit l'auteur des Lettres de la marquise de Pompadour, qu'on lui a long-temps attribuées. Au reste, ce roman épistolaire n'ajouterait rien à sa réputation, qui a déjà beaucoup perd, et qui perdra de plus en plus. Telle sera la destinée des écrivains qui n'ont cu pour guide que la mode et le goût de leur siècle, et qui, au lieu d'approfondir le cœur de l'homme, se sont ar rêtés à la superficie, et n'ont signalé que des travers frivoles et des ridicules éphémères, où la postérité ne peut trouver ni intérêt ni instruction. On a recueilli les œuvres de Grebillon fils en 7 vol. in-12, 1779. CH-N.

CREDI (LORENZO SCIARPELLONI, surnommé D1), peintre, né à Florence, en 1453 ou 1454, et mort dans la même ville, vers la fin de l'année 1551, apprit d'abord l'art de l'orfevrerie dans l'atelier de Crédi, et ensuite la peinture sous le Verocchio. Admirateur et ami de Léonard de Vinci, il s'appliqua avec tant de soin à s'approprier le style et la manière de peindre de ce grand maître, que dès leur vivant, on confondait leurs ouvrages. On remarque dans les tableaux de Crédi des compositions très simples, des têtes bien caracté risées, et généralement gracieuses, une expression vive, un faire très delicat. Son pinceau, patient et moelleux, ne se fait pas admirer des oppositions fortes, mais par des tons doux et par un extrême fini. On cite, parmi ses meilleures productions, une

par

Nativité conservée à Florence, dans l'église de Ste.-Claire, et principalement un tableau représentant la Vierge, S. Julien et S. Nicolas, qui se trouve encore dans l'église de la Magdeleine de la même ville. C'est dans ses Saintes-Familles, qu'il ressemble le plus à Léonard de Vinci. Ses principaux élèves sont Tommaso di Stéfano, et Gio.-Antonio Sogliani, dont le faire cst, comme celui de leur maître, très laborieux et très fin.

E-C D-D.

CREECH (THOMAS), traducteur anglais, né, en 1659, de parents peu aisés, à Blandford, dans le comté de Dorset, fit d'excellentes études à l'université d'Oxford. Sa traduction en vers de Lucrèce, De natura rerum, la meilleure de toutes celles qu'il a faites, parut pour la première fois à Oxford, in-8°., en 1682, et fut réimprimée l'année suivante. Elle lui mérita des éloges de Dryden, d'autant plus flatteurs que Dryden luimême avait traduit plusieurs parties de Lucrèce; mais si cette traduction fit honneur à Creech, elle ne changea point sa fortune, et il vécut toujours dans un état voisin de l'indigence. 11 entra dans les ordres en 1701, et fut nommé à la cure de Welwin, dans le comté de Hertford; mais, avant qu'il eût pris possession de ce petit bénéfice, désespéré de se voir rebuté par une femme qu'il aimait passionnément, et qui, dit-on, n'était pas aussi sévère pour d'autres, il se pendit luimême dans son cabinet en juin 1700. Quelques-uns disent, et cela semble plas probable, qu'ayant été un jour demander de l'argent à un des associés de son college, auquel il en avait deja fréqueminent emprunté, celui-ci, fatigué de ses importunités, le reçut si froidement, que Creech, n'ayant plus aucune ressource, se pendit de

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désespoir. Ce qui peut faire douter cependant de la vérité de cette dernière anecdote, c'est qu'on trouva sur la copie manuscrite de sa Traduction de Lucrèce, cette note, écrite de sa main : « Quand cet ouvrage sera publié, je n'existerai plus. » Quoi qu'il en soit, il paraît que ses talents étaient ternis par un caractère morose et vindicatif, qui lui avait fait beaucoup d'ennemis. La traduction qu'il a donnée d'Horace, en vers, en 1684, in-8°., et où il a omis à dessein quelques odes, est fort inférieure à sa Traduction de Lucrèce. Il a traduit aussi en vers les Idylles de Théocrite, avec le Discours de Rapin sur la pastorale, Oxford, 1684, in-8°.; cinq élégies d'Ovide, et l'Histoire de Lucrèce; quelques morceaux de Virgile; la 13. satire de Juvenal, etc. Ses traductions en prose sont : I. les Vies de Solon, de Pelopidas et de Cléomène, d'après Plutarque, et la Vie de Pelopidas, d'après Cornelius Népos; II. Apophtegmes luconiques, ou Mots remarquables des Spartiates, d'après Plutarque; III. le Démon de Socrate, et les deux premiers livres des Symposiaques, d'après Plutarque. Toutes ces traductions de Plutarque ont été publiées dans un recueil de traductions anglaises de cet auteur. IV. La traduction de l'Astronomicon de Manilius. On a aussi de Creech une édition latine de Lucrèce, 1695, in-8°., avec des notes. Sa traduction de ce poète a été réimprimée à Londres en 1714, en 2 vol. in-8°., et de nouveau en 1717. Dans ces deux éditions, les vers que Creech avait laissés non traduits ont été supplées, et on y a ajouté de nouvelles notes qui forment, en quelque sorte, avec les anciennes, un systême complet de philosophie épicurienne. Un écrivain anglais à prétendu que Creech

n'étant pas en état de faire, par le raisonnement, l'apologie de l'atheisme, s'était attaché à l'embellir des charmes de la poésie. Sa réputation est un peu déchue aujourd'hui de ce qu'elle était de son temps. Il était ainsi désigné sur un monument élevé à la mémoire de son père: «Le savant, l'admi»ré et tant envié M. Creech. » S-D. CRÉGUT (FRÉDÉRIC-CHRISTIAN), médecin, fils d'un ecclésiastique pro'testant français, retiré à Hanau, naquit dans cette ville le 13 février 1675. Après avoir obtenu le doctorat à Bâle en 1696, il revint à Hanau, où il fut nommé professeur de physique, conseiller, médecin aulique et physicien. Il mourut en 1758, sans laisser d'ouvrages considérables; mais la plupart des dissertations qu'il a publiées sont purement écrites et renferment des observations intéressantes; elles sont toutes in -4°.: I. De ægritudinibus infantum ac puerorum, earumque origine et curá, Bâle, 1696; II. Meditatio physiologica de hominis ortu, Hanau, 1697; III. Meditatio medica de transpiratione insensibili et sudore, Hanau, 1700; IV. Sciagraphia novi systematis medicinæ practice, Hanau, 1700; V. De motibus corporis humani variis, Hanau, 1701; VI. De dysenteria, Hanau, 1705; VII. De anthropologiá, ejusque præcipuis tam antiquis quam modernis scriptoribus, Hanau, 1737. On retrouve cette bibliographic anthropologique en tête de l'édition donnée par Crégut de la Physiologie du professeur Jean- Godefroi de Berger. La préface dont il a enrichi les OEuvres de Magati contient des recherches importantes, spécialement sur les travaux des chirurgiens italiens. Cregut a publié en outre quelques mémoires relatifs à la médecine légale.

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CRELL (NICOLAS), docteur en droit et chancelier de Christian 1., électeur de Saxe, voulut introduire le calvinisme dans sa patrie. Le prince étant mort, Crell fut détenu pendant dix ans et décapité le 28 septembre 1601. Le lendemain de cette exécution, Blum, ministre protestant, prononça en son honneur une oraison funèbre, qui donna occasion à une enquête faite en 1603 à Brême. Crell avait travaillé à des notes sur la Bible dans le sens de Calvin. On avait cominencé à publier, in-fol., à Dresde, en 1593, la version allemande de la Bible, par Luther, avec ces notes; on en était à la fin des paralipomènes, lorsqu'à la mort de Christian Ier., l'ouvrage fut supprimé, et tous les exemplaires furent sequestrés. rent sequestrés. CRELL (Michel), ministre protestant à Altenbourg, a écrit: I. Spicilegium poëticum, id est Sylloge carminum miscellaneorum, Leipzig, 1629, in-12; II. Anagramatismorum sylloge II, 1631, in-12; III. Breviarium etymol. N. T., Altenbourg, in-8°.; IV.Syllabus græco-biblicus, Altenbourg, 1646, et quelques autres ouvrages pour l'étude de l'Écriture-Sainte. CRELL (Wolfgang), professeur de métaphy sique et de théologie à Francfort-surl'Oder, mort en 1664, a écrit De difficultate cognoscendæ veritatis in artibus et disciplinis. Il changea son nom de Wolfgang (pas de loup) en celui de Wolgang, qui signifie bon pas en allemand, ou d'Evodius, qui a la même signification en grec.-CRELL (LouisChristian), professeur de philosophie à Leipzig, né en 1671, mort le 15 novembre 1735, a écrit: I. De locustis non sine prodigio nuper in Germania conspectis, Leipzig, 1693, in-4°.; II. De eo quod in Anacreonte venustum et delicatum est, Leipzig, 1706, in4°.; III. De Junio Bruto reipublica

romanæ auctore, Leipzig, 1721, in4°.; IV. De C. Mutio Scavolá C. regis parricidá, 1722, in-4°.; V. De C. M. Coriolano tribunatús et patriæ hoste, Leipzig, 1722, in-4°.; VI. De Aurelio Antonino, Leipzig, 1725, in-4°.; VII. De publica ceremoniá quá urbes condebantur, et de saliaribus carminibus, Leipzig, 1752, in-4°. Ces ouvrages, et quelques autres du même auteur, dont on trouve la note dans Saxius, ont été imprimés ensemble à Halle, 1776, in-4°.

G-Y.

CRELLIUS (JEAN), théologien socinien, l'un des plus estimés dans son parti, naquit à Helmetzhem, près de Nuremberg, en 1590. Après avoir fait dans cette dernière ville une étude particulière de la théologie, il embrassa les opinions de Socin et alla s'établir à Cracovie, où les disciples de cet homme célèbre tenaient une école, dont il ne tarda pas à devenir le recteur. On lui confia, dans la suite, les fonctions de pasteur, qu'il remplit jusqu'à sa mort, arrivée à Racovie le 11 juin 1633. Christophe Sandius a donné, dans la Bibliothèque des anti-trinitaires, la liste des ouvrages de Crellius; les principaux sont: J. Ethica Aristotelica, ad sacrarum literarum normam emendata; nec non Ethica christiana, 1650, in-4°.; Selenoburgi (Lunebourg), sans date, in-4°.; Cosmopoli, 1681, in-4°., avec la vie de l'auteur, rare. Sandius prétend que ces deux dernières éditions sont d'Amsterdam, quoique la première porte les mots Typis Venetis. Crellius prend, dans ce livre, le nom de Cirellus, anagramme du sien. II. De Deo et attributis ejus, Cracovie, 1650; Amsterdam, Blaeu, 1648, in4.; III. De uno Deo patre libri duo, in quibus multa etiam de filii et spiritus sancli natura, 1651, in-8.;

1639, in-4°., avec la réfutation par Bisterfeld; il est réimprimé, ainsi que le précédent, dans le traité de Voikel, De verá religione. IV. Declaratio sententiæ de causis mortis Christi, 1657, in-8'., publié par J. Stoinski; V. Vindiciae pro religionis libertate, 1637, in-8°.; Eleutheropoli, 1650, in-8°., publié sous le nom pseudonyme de Junius Brutus Polonus. Ce traité, le plus célèbre des ouvrages de Crellius, fut traduit en français, en 1687, par Le Cène, qui le publia à la suite de ses Conversations. Naigeon a retouché depuis cette traduction sous ce titre: De la tolérance dans la religion, ou De la liberté de conscience, et l'a publiée Londres (Amsterdam), 1769, in-12, avec un traité du baron d'Holbach sur l'Intolerance. VI. De spiritu sancto qui fidelibus datur, 1650, in-8°.; VII. une Traduction allemande du Nouveau Testament, faite en société avec Joachim Stegmann l'ancien, Cracovic, 1650, in-8°.; VIII. une suite de commentaires latins sur l'Építre aux Galates, celles aux Thessaloniciens, celle aux Hébreux, sur l'Évangile de S. Mathieu, etc. Ges commentaires, publiés d'abord séparément, ont été réunis dans la Bibliothèque des frères polonais, où, avec les autres traités théologiques, ils sont divisés en 3 tomes, sous le titre de Opera exegetica. Au tome IV de cette collection sont les ouvrages didactiques et polémiques du même auteur. IX. Catechesis ecclesiarum polonicarum reformata et redacta primùm per Faustum Socinum et alios, nunc à J. Crellio, Jona Schlichtingio, M. Ruaro, et A. Wissowatio recognita, Irenopoli, post 1659, 1665, 1680, 1684, in-8°., et réimprimé avec l'édition des Ethiques de 1681. Joachim Pastorius de Hirtens

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