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ici et ailleurs des parents, des précepteurs et des institutrices qui l'emploient, et qui sont surpris du progrès de leurs élèves, et de l'intérêt qu'ils mettent aux exercices de langue. C'est que dans cet enseignemont tout est calculé sur le développement naturel des facultés, et qu'un pas en avant en amène un autre.

Il manque pourtant quelque chose à cette instruction domestique. C'est le stimulant de l'exemple, l'émulation dans le sens que nous avons donné à ce mot. Dans une même famille il y a quelquefois deux enfants que l'on peut associer aux mêmes études; un garçon et une fille un peu plus jeune, attendu que du côté de l'esprit elle sera plus précoce que son frère. Le cas ne se présente pas souvent.

Mais il y a un moyen de former une petite école sous le toit paternel. Chaque famille a des rapports de parenté, d'affaires ou de bon voisinage avec une ou plusieurs autres, et il s'y trouve des enfants de même portée. Voilà donc comment on peut réunir quelques élèves chez soi, et mettre plus de vie et d'agrément dans leurs études. D'après mes convictions la petite école peut d'autant plus facilement se former, que je ne crains pas, à l'âge où seront les élèves, d'y réunir les deux sexes. Je sais que je me mets ainsi en opposition avec une opinion qui ne croit pas pouvoir les séparer assez tôt. Mais j'ai pour moi une autorité bien plus ancienne et bien plus respectable que ne peut être celle des hommes, puisque c'est celle du Créateur même. Ne fait-il pas naître dans les familles la fille à côté du garçon, sans doute pour qu'ils soient élevés tout près l'un de l'autre, et qu'ils gagnent tous deux par leur rapprochement? Tant que les passions n'ont pas parlé, ce qui n'est pas à l'âge de nos élèves, il n'y a pas plus de danger de réunir à une même leçon des camarades de différent sexe qu'un frère et une sœur.

C'est aux mères de famille que s'adresse particulièrement la proposition que je fais ici en faveur du Cours éducatif de langue. Il a quelque droit à leur attention et

à leur intérêt. D'abord il se rattache à l'inspiration maternelle, qui m'en a fourni l'idée première; puis c'est son œuvre qu'il a entrepris de continuer à l'aide des moyens que fournit l'art de l'éducation. Les mères qui voudront achever elles-mêmes ce qu'elles ont commencé en mettant la parole sur les lèvres de leurs enfants, trouveront dans le Cours de langue ce dont elles ont besoin pour remplir leur noble tâche, aussi bien qu'elles le désirent.

Cet écrit, qui en est l'introduction, les mettra à même de donner leurs leçons en pleine connaissance de cause, et par conséquent de les donner avec plus de fruit. Il rendra un autre service à celles qui ont encore des petits enfants à élever. Leur éducation, pour bien réussir, doit commencer de loin, et on la fait mieux, quand on connaît la nature humaine, ses facultés, ses tendances et leur développement naturel en bien et en mal. Ces feuilles en tracent le tableau, et elles indiquent des moyens que la tendresse maternelle peut employer, dès que son élève commence à comprendre la langue.

Le souvenir des soins maternels que j'ai reçus dans mon enfance ne s'est point effacé dans ma vieillesse. Il m'inspire un vif intérêt pour toutes les mères, et, en terminant ces pages, je me félicite d'avoir fait quelque chose qui pourra leur être utile dans leurs précieuses et belles fonctions.

FIN.

I. Réponse du Conseil royal de l'Instruction publique.

Monsieur,

Paris, le 28 février 1821.

Vous avez présenté au Conseil royal, sous les auspices de S. E. le Ministre de S. M. T. C. en Suisse, un ouvrage que vous avez composé pour les écoles rurales, sous le titre de Grammaire des campagnes.

Destiné particulièrement aux écoles de votre canton, vous pensez que votre ouvrage pourrait aussi servir pour les écoles de France, et dans le cas vous en laissez la libre disposition. Un bon ouvrage de ce genre serait, en effet, fort utile pour les écoles françaises. Le Conseil vous remercie de votre communication et de l'offre généreuse qui l'accompagne. Il va faire examiner votre essai et s'en faire rendre compte, pour juger s'il serait possible de l'adapter aux écoles rurales en France.

Le Conseil, Monsieur, ne peut qu'applaudir au but que vous vous êtes proposé et à vos excellentes intentions. Il doit particulièrement des éloges aux vues religieuses et morales qui vous animent pour l'instruction de la jeunesse. Vous justifiez ainsi de plus en plus l'honorable réputation dont vous jouissez dans votre patrie et aú dehors.

Recevez, Monsieur, l'assurance de notre considération distinguée.

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II. Réponse de Mgr. d'Osmond, évêque de Nancy.

Nancy, 9 juin 1821.

Le général Sabatier vient de me faire passer, Monsieur, le cadeau que vous m'avez destiné il y a longtemps, ainsi que la lettre (du 11 février) dont il était accompagné. L'un et l'autre étaient faits pour m'intéresser vivement, et je vous remercie avec sincérité d'avoir bien voulu songer à moi dans la distribution que vous avez projetée de votre ouvrage. Pour en estimer l'auteur, il suffit de saisir le but qu'il s'est proposé : il est tout à l'avantage de la religion, partant de la société. Quant au mérite de la méthode, pour l'apprécier avec le sentiment

d'une estime raisonnée, je sens qu'il faudrait l'avoir pratiquée beaucoup car l'expérience seule peut démontrer qu'elle est plus prompte, plus claire, plus facile à s'insinuer dans l'esprit comme dans la mémoire des enfants, et plus propre à fixer leur attention sans les dégoûter. Or, cette expérience, c'est celle que vous avez acquise par vous-même, et qu'aujourd'hui vous mettez en usage avec tant de succès pour le bien de l'humanité. Elle répond à toutes les objections d'une vaine théorie, et je ne puis, en vous félicitant doublement, en applaudissant à votre zèle, que vous assurer, mon très-révérend père, des sentiments de vénération avec laquelle j'ai l'honneur d'être votre trèshumble et très-obéissant serviteur.

Ant. Eust., Ev. de Nancy.

P. S. J'ai remarqué particulièrement le parti que vous tirez du patois du pays pour aider la compréhension des enfants. J'ai toujours pensé que pour bien saisir les principes de toute langue, il faut d'abord parler un idiome quelconque, un jargon si l'on veut, bien qu'il soit dénué de règles ou qu'on les ignore, mais pour servir de point d'appui et de comparaison. C'est une espèce de thème que vous leur faites faire, et l'enseignement de l'orthographe (si fantasque) s'ensuit nécessairement sans étude particulière.

III. Réponse de S. Éminence le Cardinal de Bausset.

Paris, 19 juillet 1821.

On ne peut être plus touché que je le suis, mon révérend père, du sentiment qui vous porte à m'associer au succès de vos travaux et de vos efforts pour l'instruction du peuple de vos campagnes. Vous avez bien raison de penser et de dire que Fénelon aurait applaudi du fond de son cœur à des intentions si pures et si utiles.

Je ferai connaître l'ouvrage que vous avez eu la bonté de m'envoyer à plusieurs pasteurs que leur ministère met à portée de connaître les besoins du peuple et le degré d'instruction dont il est susceptible. J'ai lieu de croire qu'ils y trouveront de nouveaux motifs et de nouveaux moyens de se rendre utiles à la religion et à la société.

Recevez, mon révérend père, tous mes remerciments avec l'expression de ma sincère vénération.

Le Cardinal de Bausset.

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