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Sur toutes choses, que, dans l'instruction, on cherche à réveiller continuellement leur réflexion et leur activité, et les tenir sans cesse en haleine pour qu'ils conçoivent et apprennent les choses en quelque sorte d'eux-mêmes et par un exercice habituel de leurs facultés, puisque c'est là pour eux le vrai et l'unique moyen de les bien savoir et de se mettre en état de se les rappeler au besoin promptement et sans effort. Que du moins ils soient eux-mêmes toujours acteurs principaux dans toutes les opérations auxquelles on les invite pour les élever de quelque connaissance acquise à une connaissance nouvelle; que, lorsqu'ils se montrent pour cela actifs et empressés, on se borne uniquement à soutenir leurs efforts pour surmonter les difficultés qui se présentent, à leur fournir certaines ouvertures qu'ils ne sauraient trouver par eux-mêmes, à éclaircir et lever certains doutes, à leur tendre une main secourable pour affermir, et s'il est possible, accélérer leurs pas dans la carrière qu'ils cou

rent.

Enfin, en leur montrant comment ils doivent procéder pour s'élever ainsi par degrés aux diverses connaissances humaines, qu'on s'attache sans cesse à leur faire comprendre que la méthode qu'on leur recommande est exactement la même que les hommes ont constamment suivie dans tous les temps pour s'instruire, et qu'elle répond aussi à l'ordre d'instruction que la nature nous a marqué et prescrit par la liaison qu'elle

a mise elle-même entre les objets qui nous environnent et les facultés dont elle nous a enrichis pour atteindre à leur connaissance.

Que tous ces principes soient une fois introduits et adoptés dans l'éducation, on ne tardera pas à se convaincre que les enfants sont susceptibles de raisonnement, qu'on peut exercer de très bonne heure leur intelligence, et qu'ils pourraient recevoir une éducation intellectuelle, dont les progrès et les avantages seraient bien supérieurs à ceux qu'on peut espérer de la méthode presque universellement établie.

Mais, dira-t-on, une marche aussi lente et aussi tardive que celle que les hommes ont suivie pour s'instruire, pourrait-elle servir de règle et de modèle dans l'éducation des enfants qui ne dure que quelques années? Une difficulté aussi spécieuse mérite bien une réponse; la voici :

Les hommes des temps primitifs, uniquement occupés de leurs besoins et des objets sensibles, restèrent pendant fort longtemps dépourvus de connaissances sur les objets non sensibles, entre autres sur eux-mêmes, sur leur âme, sur l'origine et le développement de ses facultés, sur la manière d'en diriger les opérations; ils furent dès là même hors d'état d'employer l'instrument de la pensée avec cette facilité, cette promptitude, cette régularité qui sont indispensables pour faire des progrès rapides en connaissances; ils ignorèrent toutes ces méthodes ingénieuses et abrégées par lesquelles on met à profit les ressour

ces de l'art pour suppléer aux forces naturelles de l'âme, à peu près comme on supplée à celles du corps par le secours des machines; ils furent ainsi pendant bien longtemps privés de tous ces moyens industrieux que les hommes trouvèrent dans la suite pour étendre le cercle de leurs pensées, donner de la promptitude à leurs opérations, et accélérer leurs progrès dans la carrière des sciences.

Avec si peu de lumières primitives, et moins encore de secours pour en acquérir, il n'est point surprenant que les premiers hommes n'aient fait que des progrès très lents et même bien peu de chemin dans cette carrière pendant plusieurs siècles. Cette lenteur ne fut donc point proprement un vice inhérent ou essentiellement attaché à la marche qu'ils suivirent, mais plutôt l'effet des circonstances de leur position et de leur manque de ressources, et il n'est pas douteux que des hommes placés dans des circonstances plus favorables ne puissent, en suivant la même route, faire des progrès infiniment plus rapides.

Veut-on donc adopter cette marche dans l'éducation intellectuelle des jeunes gens, sans tomber dans la lenteur des premiers hommes, qu'on prenne soin de les munir des lumières et des secours qui ont manqué à ceux-ci; qu'on leur fasse connaître de bonne heure l'instrument de la pensée, leur âme, ses facultés, ses opérations, la manière de les exercer, le besoin indispensable qu'ils ont d'en faire un usage habituel et ré

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gulier qui les mette en état d'acquérir mêmes des lumières et d'étendre leurs

Qu'on fixe particulièrement leur atte ce qui s'est passé chez eux quand ils o leurs facultés, en leur faisant remarque casions où ils les ont exercées avec s celles où l'exercice a été défectueux et 1 duits à l'erreur. Et sans recourir encore gles abstraites qu'ils ne sauraient bien dre, qu'on s'occupe principalement à tire propre expérience des instructions sur la dont ils doivent procéder pour saisir toujours habituellement le vrai fil des sances humaines, et assurer par là le s leurs opérations et de leurs recherches.

Qu'on s'applique sur toutes choses à leur curiosité et leur activité pour s'i par eux-mêmes, et par un exercice rég leurs facultés, qui, en fortifiant leur esp courage à faire chaque jour de nouveau pour se perfectionner; pour cet effet, qu qu'on présente successivement à leur at ne leur offre point l'idée de labeur et de mais toujours quelque intérêt, quelque ag qui les excite; qu'on s'attache principale ce qui est le plus généralement utile, e ce qui peut être particulièrement le plus ceux qu'on dirige, selon leur âge, leur ét vocation à laquelle on les destine, en disti toujours ce qui est fin et but d'avec ce

lui être subordonné comme moyen et instrument, et en insistant le plus souvent sur ce qu'on envisage comme le plus important et qui mérite le plus d'être inculqué à différentes reprises et sous différents points de vue.

Avec cette marche d'instruction, toujours naturelle et uniforme, puisqu'on y suit l'ordre même de la génération et du développement de la pensée, et, s'il faut ainsi dire, l'échelle des connaissances humaines dressée par la nature elle-même, toujours lumineuse, puisque, lorsqu'il s'agit de pousser les enfants à quelque connaissance nouvelle, on ne suppose jamais chez eux des idées qu'ils n'aient point encore pu acquérir, avec cette marche dès là même aisée, facile et intéressante, si une fois on peut la leur rendre familière et habituelle, on parviendra à les mettre en état d'apprendre en peu de temps, soit par eux-mêmes, soit avec le secours d'une direction prudente et habile, une multitude de choses utiles que les hommes n'ont pu découvrir qu'à la longue et après bien des siècles d'observations et de recherches.

Mais qu'on ne perde jamais ici de vue cette maxime importante de l'éducation intellectuelle, c'est que son succès ne dépend point du nombre des connaissances, et moins encore du nombre des mots qu'on introduit de gré ou de force dans le cerveau des enfants, de l'étendue de la tâche ou du cercle d'objets qu'on leur fait parcourir dans un espace de temps déterminé, mais unique

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