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«

Qu'ils le laissent promener, dit-il, dans l'antiquité ténébreuse et sachent se contenter de la lumière du soleil! Les traductions, du reste, peuvent leur suffire et leur compter tout aussi bien que celles de la Bible et de l'anglais dont se contente l'humanité. »

Devinant l'importance de l'intuition, il demande, comme Fénelon, son contemporain, qu'on enseigne aux enfants le plus possible au moyen de tableaux ou d'objets matériels.....

La méthode qu'il recommande a pour principe fondamental qu'on ne doit rien apprendre à l'enfant qui ne soit à sa portée et dont il ne puisse se servir tôt ou tard.

Dans l'enseignement du latin, dont il ne conteste aucunement l'importance et la nécessité pour les classes lettrées, il désire qu'on le commence après une étude logique de la langue française, et qu'on choisisse dans les débuts ce qui ressemble le plus au français. Arlequin, disait-il, n'eut pas beaucoup de peine à deviner que collegium signifie collège et le premier enfant venu comprendra jurare.

Du connu, du facile, passer insensiblement au difficile et à l'inconnu, composer à mesure un petit dictionnaire de mots semblables aux mots français et s'emparer pas à pas du lexique au complet en le divisant par familles, voilà ce que proposait le sage pédagogue du XVIII® siècle et ce que nous sommes encore bien loin de pratiquer.

Ces idées dont nous venons de donner la substance firent l'objet d'un mémoire détaillé que le noble conseil d'Yverdon ne trouva pas le temps d'étudier, selon la louable habitude des corps nombreux de tous les temps. N'ayant ni presses ni journal à sa disposition, le courageux recteur prit le parti d'exposer publiquement son système en face de toute la population de sa ville natale assemblée à l'église à la fête des promotions qui eut lieu à Pâques en 1718.

Trois de ses écoliers, Bourgeois, Doxat et Duthon, le prirent à partie d'après un plan tracé d'avance et défendirent successivement contre lui avec infiniment d'esprit tous les errements du vieux temps. Avec une bonhomie charmante, une naïveté pleine d'humour, le brave recteur leur répond en bon père, réduit tous leurs arguments en poussière et les oblige à s'avouer vaincus.

Voici quelques passages des réponses de Potterat :

» 1° Je dis que les choses auxquelles on veut occuper les enfants doivent être à leur portée et qu'ainsi dans les commencements il faut plus les exercer sur ce qui demande l'usage des sens et de la mémoire que sur ce qui exige un usage du jugement qui les passe. Il faut cependant se souvenir qu'il y a des choses qui ne paraissent point à la portée des enfants, à les considérer en gros, mais dont ils sont pourtant capables, si on prenait un bon tour pour les en instruire en détail. Tous les jours je vois prendre pour prétexte la faiblesse des enfants pour se dispenser de les instruire.

» 2o Les choses que l'on fait apprendre aux jeunes gens doivent leur être utiles dans un temps ou dans un autre mais parce qu'il n'y a presque rien qui n'ait un certain degré d'utilité, j'ajoute que de deux choses également utiles il faut d'abord appliquer les enfants à la plus facile et à celle qui demande le moins de temps; et s'il arrive qu'une chose ne soit pas tant utile, il ne faut pas leur en faire une étude sérieuse, mais la leur enseigner pour les divertir.

» 3° Je dis enfin qu'il serait avantageux que les enfants n'apprissent rien qu'ils ne conçussent, mais comme la mémoire devance leur jugement, on peut l'exercer sui des choses qu'ils ne comprennent pas d'abord dans toute leur étendue, mais avec cette précaution qu'il faut com- mencer par les appliquer à se mettre dans la tête celles dont on fait le plus fréquent usage dans la vie. »

Le recteur entre ensuite dans le détail des matières

d'enseignement et comprend dans son programme idéal la langue maternelle avec la rhétorique, l'arithmétique, la cosmographie, l'histoire avec la chronologie, les antiquités, l'anatomie, la physique, la philosophie, la religion et le droit.

....Aux attaques réitérées de ses élèves, il n'est pas trop malaisé au bon recteur de répondre victorieusement; il le fait chaque fois avec une bonhomie ravissante et un sérieux qui n'exclut pas l'enjouement; puis, apostrophé vers la fin sur la place qu'il ménageait à la langue latine, il en prend occasion d'exposer très à fond son opinion sur l'emploi moins universel, moins écrasant, moins despotique qu'il était raisonnable de faire de ce noble idiome dont il reconnaît du reste tous les charmes et toute l'utilité, et termine cette admirable conférence par ces belles et måles paroles :

« Mes très honorés seigneurs du conseil !

« Dès que vous m'avez fait l'honneur de me confier la direction de vos enfants, je me suis étudié à rechercher comment on pourrait les mieux instruire. Mes pensées ont été nouvelles et peut-être que celles que je viens de débiter ont-elles eu quelque chose de surprenant. Si elles vous ont paru étranges, messieurs, je vous prie de ne pas les condamner d'abord, mais de peser les raisons sur lesquelles elles sont fondées, et quand ces raisons vous sembleraient faibles, je vous demande la grâce de regarder tout ce que j'ai avancé comme un effet de l'attention avec laquelle je cherche d'approcher de votre but en m'éloignant de la route commune. »

Je crois que Potterat a été le premier à protester contre la domination exclusive du latin dans les Collèges. Le système d'instruction « classique », inventé par les moines et répandu par les jésuites, venait pour ainsi dire de prendre possession des Ecoles, et il n'est guère probable que le bon sens ait pu se réveiller et trouver un organe qui osât prendre sa défense, avant

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le commencement du XVIIIe siècle, ava Potterat. Chavannes ne paraît pas avoir sance de Potterat. Il est singulier surtout aucune mention de de Crousaz. Chavann mois de mai 1800..... et ses ouvrages, héla avec lui! Il y eut cependant, 25 ans après écho de son Essai sur l'Education Intelle brochure de 16 pages parut à Lausanne l'imprimerie des frères Blanchard, conte mier chapitre de l'Essai, précédé du suiva

entre feu M. le professeur Chavannes, mort e M. Bocherens, Conseiller d'Etat, mort en 1824 vent dans la Lune, après vingt-quatre ans de se

Eh! bonjour, mon cher. Vous voilà donc des nôtres. Vous avez bier cette terre où vous faisiez du bien, et ce vous était chère.

Je dois l'avouer, mon anc table Professeur, ce n'est qu'avec peine qu séparé de mon pays et de tous ceux qui m' mais je vous retrouve, je retrouve des pare et c'est pour moi une véritable consolation. leurs qu'en nous rapprochant de la divini permis de veiller encore sur les habitants o partager leurs joies et d'adoucir leurs peine se doutent trop de notre influence. Quant ancien maître, comment arrive-t-il que je ici dans la Lune?

CHAV. J'y suis venu pour me rapproch C'est un penchant auquel je ne saurais ré qu'en voyageant dans les Cieux, nous n'er

moins bien instruits de ce qui se passe sur ce petit globe qui fut jadis notre demeure. J'ai visité tous les mondes, et tout en me transportant de l'un à l'autre, j'ai vu se consolider l'indépendance de mon pays, et j'ai éprouvé une bien douce jouissance, en le voyant tranquille et heureux.

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Восн. Nous avons fait de grands pas, mais il en reste beaucoup à faire encore. Vous, si pieux, si savant et si habile, faites entrer de plus en plus dans toutes ces têtes que vous voyez là-bas, un esprit de sagesse et de bon conseil.

CHAV. Vous-même, mon cher concitoyen, continuez votre œuvre. Votre patriotisme et vos lumières vous ont fait occuper une des premières places, et vous avez toujours concouru aux réformes utiles, vous avez toujours cherché à procurer le bien du pays.

Восн. Mes intentions étaient pures, sans doute, mais vous savez, mon respectable ami, combien d'obstacles il faut vaincre pour arriver à un mieux que l'on voit, que l'on désire, et qu'il est si difficile de saisir. Par exemple, vous, qui deviez avoir tant d'influence, et qui vous intéressiez si fort aux bonnes études, avez-vous pu amener dans ce genre des résultats bien satisfaisants?

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CHAV. Pas trop, il est vrai, quoique j'eusse beaucoup médité sur tout cela. Ce sujet fut l'occupation de ma vie, je dis mon mot, on ne m'écouta guères, et je crois que dès lors on m'a tout à fait oublié.

Восн. Votre Essai sur l'éducation intellectuelle est, suivant moi, un excellent ouvrage, qui mériterait d'être plus généralement connu. Mais..... nous parlons maintenant avec toute la franchise qui convient à notre nouvelle existence, le style de cet ouvrage n'a peut-être pas tout ce qu'il faut pour séduire. Cependant les idées sont neuves, les vues profondes, et votre projet de Collège m'a toujours plu.

CHAV. — Et vous et tous nos hommes les plus habiles, vous avez laissé ce projet dormir dans mon livre, sans penser à en faire l'essai.

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