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un échantillon d'un tel dictionnaire, qui pourrait servir de canevas et que les jeunes gens pourraient étendre et perfectionner d'eux-mèmes à mesure qu'ils étudieraient les diverses langues des nations policées; méthode qui leur rendrait cette étude beaucoup plus facile, abrégée, intéressante et utile.

Il serait temps, après cela, de mettre à profit les connaissances qu'ils auraient acquises sur leurs opérations intellectuelles, dont le discours n'est qu'un continuel exercice, et sur la théorie du langage, pour les élever aux principes abstraits de la grammaire générale et raisonnée, si étroitement liée avec l'analyse de l'esprit humain et de laquelle sont dérivées toutes les grammaires particulières.

On aura soin de leur faire appliquer ces principes généraux, premièrement à leur propre langue et ensuite aux autres langues étrangères qu'ils voudraient apprendre, en leur faisant toujours observer ce qui est commun à toutes et ce en quoi elles différent.

On les exercera aussi à des analyses grammaticales sur quelque livre correctement écrit dans leur propre langue, qui serviront à leur mieux inculquer la grammaire générale, celle de leur langue maternelle et même celle des langues étrangères qu'ils voudraient étudier par les comparaisons qu'ils pourront en faire avec la précédente. Nous n'avons encore aucun livre de grammaire générale sous la forme qui serait à désirer pour

l'institution; la huitième partie de notre ouvrage en offre un léger essai, et on cherche à y mettre au jour un principe de la plus haute importance, c'est qu'une seule et même grammaire générale, dont tous les termes seraient pris dans la langue maternelle et toutes les règles appliquées à cette langue, pourrait servir, avec les plus légères additions, à l'étude de toutes les diverses langues, sans excepter les orientales, et fournir toutes les notions et expressions essentielles pour faire une exacte analyse grammaticale du discours, dans quelque langue qu'il puisse être énoncé; principe dont on fournit la preuve dans divers échantillons d'analyse en grec, latin, hébreu, allemand, etc., qui démontrent également comment une seule méthode grammaticale pourrait tenir lieu de toutes celles qu'on a si inutilement multipliées.

Parvenus à l'âge de seize ou dix-sept ans, et instruits sur un très grand nombre d'objets, entre autres ceux qui ont rapport à la marche que les hommes ont suivie dans tous les temps pour s'instruire, connaissant l'histoire de la formation. du langage et sa théorie, exercés dans l'art étymologique avec le secours du vocabulaire et par l'habitude d'analyser les mots pour en découvrir les affinités et la généalogie, initiés dans les principes de la grammaire générale et raisonnée; munis ainsi de toutes les connaissances qui servent de préparatifs à l'étude des langues, j'ose garantir que ces jeunes gens pourront à la fin,

d'eux-mêmes et sans le secours des maîtres, ni même des diverses grammaires, s'appliquer tout de suite à la lecture des bons auteurs, premièrement des grecs et ensuite des latins, et se mettre en état de les comprendre et de les lire avec facilité, après quelque temps d'exercice.

Instruits en effet du fond commun aux diverses langues, ils pourront, en s'occupant de telle ou telle en particulier, remonter, par le moyen de l'étymologie, aux primitifs dont cette langue a tiré ses dérivés et ses composés et, en établissant clairement cette généalogie, pénétrer facilement dans leur signification dérivée et accessoire, sans perdre jamais le fil des signes et des pensées que ces signes doivent exprimer.

Ils ne seront plus arrêtés dans la lecture et l'intelligence des auteurs par aucun obstacle insurmontable, ni par l'analyse des mots, ni par leur réduction aux racines primitives, ni par leur signification originaire et dérivée, ni par les variétés de déclinaison, de conjugaison, de syntaxe; du moins se trouveront-ils pourvus de tous les principes et les ouvertures nécessaires pour lever eux-mêmes des difficultés qui ne sont telles que pour ceux qui s'occupent de l'étude des langues avant d'avoir fait aucun préparatif pour en faciliter et assurer le succès.

Alors les jeunes gens liraient les auteurs en langues étrangères avec intelligence et, dès là même, avec intérêt et avec fruit; ils saisiraient avec précision le sens et l'énergie des expres

sions et des phrases, la justesse et la beauté des images, l'enchaînure délicate et ingénieuse des pensées, et tout ce que l'ensemble du discours peut offrir d'intéressant.

L'étude des diverses langues, et surtout des anciennes, la comparaison que les jeunes gens seraient en état de faire entre elles en les rapprochant pour en saisir les rapports et les différences, leur ouvriraient une source nouvelle d'instructions sur les choses mêmes et sur les divers objets des connaissances sans nombre dont l'espèce humaine est actuellement pourvue.

Ils se convaincraient alors pleinement de la correspondance intime qu'il y a toujours eu entre la série des pensées des hommes et celle des signes qu'ils ont employés pour les expri

mer.

Ils trouveraient encore la confirmation authentique de tout ce qu'ils auraient auparavant appris sur l'histoire générale de l'espèce humaine et les progrès successifs des nations dans les arts et les sciences et sur tout ce qui a rapport à leur civilisation; il en serait de même de tout ce dont ils auraient déjà pu s'instruire touchant l'analyse des facultés de l'âme, l'origine et le développement de ses pensées. Tous ces objets importants reparaîtraient sensiblement sous leurs yeux dans le tableau que leur offrirait la théorie du langage considéré dans son origine et ses progrès.

De plus, chaque langue qu'ils étudieraient

ri

due.

leur offrirait, non comme à ceux qui ne sont pas initiés dans cette théorie, un assemblage bizarre de mots pris au hasard et arbitrairement, sans aucun rapport naturel avec les idées et les choses, mais un vrai tableau des pensées, des procédés, des arts, des sciences, des usages, des mœurs, de la législation des peuples qui ont parlé ou qui parlent cette langue.

Dès lors la comparaison des langues entre elles deviendrait à la lettre une comparaison des nations même et de tout ce qu'elles peuvent offrir d'intéressant à l'observateur curieux par rapport à ces divers objets que nous venons d'énoncer, et en rapprochant toutes les observations que ce parallèle pourrait fournir, on découvrirait d'un côté la diversité qu'il y a eu entre les nations dans leur façon de penser sur ces mêmes objets, en raison de la diversité de leur position, de leurs circonstances et de leurs progrès vers la civilisation, et de l'autre, leur uniformité à certains égards et par rapport à certains objets qui les ont tous frappés au même degré et de la même manière; ce qui donnerait les résultats les plus importants pour l'avancement des connaissances humaines.

Ainsi l'étude des mots ou des langues, placée dans l'ordre de l'institution après celle des choses, répandrait le plus grand jour sur toutes les études qui auraient précédé et fournirait les plus grands secours pour toutes celles qui viendraient encore à la suite.

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