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toutes les institutions; et quand on y est parvenu, quand c'est le peuple en corps ou la partie éclairée de ce peuple qui découvre et définit les pouvoirs et les distinctions qu'il a créés ou tolérés, l'agitation que produisent dans les esprits ces hautes pensées ne permet pas toujours de s'arrêter à ce qui est juste et utile. Au milieu de cette foule de maux nés dans l'état social, il est peu d'innovations qui ne paroissent être le vœu de la raison; mais si nous sommes attentifs à sa voix nous la trouverons toujours sévere, circonspecte et non inconsidérée dans ses

mouvemens.

C'est, messieurs, cette raison supérieure à tous les talens, à toutes les séductions des plus nobles passions, qui doit diriger le zele ardent dont nous sommes animés pour le salut de la patrie; et le premier commandement que nous en recevons est l'unité de vues, de sentimens et d'intérêts dans toutes les classes de la nation.

QUOI! n'étoit ce pas débuter avec assez d'avantage dans l'assemblée nationale, que d'y arriver précédés de la faveur publique et de la justice de nos réclama

tions sur les abus révoltans dont le peuple est grevé? Le cri général de la liberté légale, de l'abrogation des impôts distinctifs, des loix avilissantes pour le tiersétat ne nous prescrivoit-il pas la marche que nous avons à suivre pour y parvenir ? Ah! messieurs , permettez-moi de vous le dire, cette marche consistoit à reconnoître et à éluder ou à vaincre les difficultés que nous pourrions éprouver, mais non pas à les provoquer.

Or, nous connoissons presque tous les cahiers des bailliages du royaume; nous savons que la grande majorité dans tous les ordres présente des bases raisonnables de constitution et des moyens de régénération tels que, s'ils étoient adoptés, le peuple seroit heureux, et l'empire françois arriveroit à la plus grande splendeur. Nous savons et vous avez entendu, messieurs,' un ministre du roi vous le dire en présence de sa majesté, qu'il est des circonstances qui ne se retrouvent jamais. Trouvons-nous, en effet, dans les annales du monde, beaucoup d'exemples de princes accoutumés au pouvoir absolu présenter eux-mêmes à leurs peuples les principes

et

et les moyens d'une liberté légale ? car le consentement libre à l'impôt, la liberté individuelle, la responsabilité des agens de l'autorité la liberté de la presse, la

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stabilité des assemblées nationales sont incontestablement les bases desirables de la plus sage constitution,

Qu'avons-nous donc à faire pour nous assurer cette somme de bonheur dont la perspective nous est présentée ? Dépend elle absolument de la destruction subite des préjugés et des prétentions distinctives d'ordre, et devons-nous y tendre en établissant préliminairement et par préférence à tout le principe de l'opinion par tête ? Non messieurs nous ne le devons pas; car si c'est-là notre exorde tout l'édifice de notre bonheur s'écroule, et il n'est pas difficile de vous le prouver.

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Je distingue, d'abord, le droit d'opinion par tête, que nous devons soutenir comme représentans de la nation aux états-généraux du principe annoncé de l'abolition de toute distinction d'ordre, et de la nécessité où plusieurs de ces messieurs croient être de l'établir rigoureusement et préalablement à tout autre acte constitu tionnel. Je dis que cela ne sera pas, que 2o année. Tome XII.

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vous n'y déterminerez pas MM. du clergé et de la noblesse ; car si vous en avez le mandat ils en ont de contraires; ct, comme vous, ils obéiront à leurs mandats : ainsi votre résistance motivera la leur, et à défaut de tout autre

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l'amour propre, intérêt suffiroit pour la rendre plus active.

,

Dans cet état de discordance réciproque, vous compromettrez votre droit d'opinion par tête en n'en différant pas la réclamation jusqu'à ce que l'exercice en soit nécessaire car il ne faut pas vous le dissimuler, messieurs, quelque chose qu'on yous ait dit au contraire, il ne faut ? pas vous dissimuler qu'il est hors de toute probabilité de voir effacer en un instant les préjugés, les prétentions et les usages de plusieurs siecles: effaçons-en les abus profitons de ce concours de circonstances qui rendent l'entreprise moins difficile ; mais ne soumettons pas la puissance des faits qui doivent bientôt nous favoriser aux risques d'une discussion prématurée aux calculs erronés de l'amour - propre, qui s'irrite toujours contre les exigeances oratoires, tandis qu'il obéit sans murmure à la nécessité qui commande sans paroles.

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Tâchons donc de ne pas mettre en opposition, dès le début, des principes, des prétentions évidemment contradictoires. Préférons pour arriver au terme desiré, les voies qui peuvent nous y conduire....

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Si, au contraire, nous en venons aux reproches, aux sommations vis-à-vis des deux premiers ordres, qui pourroit méconnoître assez le caractere, l'honneur françois pour douter que tout espoir de réunion ne soit à jamais anéanti? Or, messieurs, si ce malheur arrive, la France, l'Europe entiere prononceront l'un de ces deux jugemens. Les députés des communes ont tort, ou l'on dira, ils ne pouvoient mieux faire.

Ne sentez-vous pas, messieurs, votre sang se glacer au prononcé possible de ce jugement? « Les députés des communes ont tort, nous attendions d'eux la paix, la liberté, et ce sont des inimitiés éternelles qu'ils nous apportent; c'est la servitude qu'ils nous préparent » car, ne croyez pas, messieurs, qu'une scission non motivée par de grands intérêts, tels que celui de l'opposition à la liberté légale, à l'abrogation des impôts distinctifs, des loix avi

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