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ternel, éteignoit ces doux rapports, flétrissoit ces tendres sentimens que la nature fait naître, et qui sont les premiers rudimens de la vertu. Peut-être est-il temps que les François ne soient pas plus les écoliers de Rome ancienne que de Rome moderne ; qu'ils aient des loix civiles faites pour eux, comme ils ont des loix politiques qui leur sont propres ; que tout se ressente, dans la législation, des principes de la sagesse, non des préjugés de l'habitude; enfin, qu'ils donnent eux-mêmes l'exemple, et ne reçoivent la loi que de la raison et de la

nature.

Or, messieurs , que nous dit cette nature dans la matiere que nous discutons? Si elle a établi l'égalité d'homme à homme, à plus forte raison de frere à frere; et cette égalité entre les enfans d'une même famille ne doit-elle pas être mieux reconnue encore et plus respectée par ceux qui leur ont donné la naissance ?

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C'est un axiome de droit devenu vulgaire, que les enfans sont les héritiers naturels de leurs parens ; ce qui indique à-lafois et la légitimité du titre en vertu duquel une famille entre dans l'héritage laissé par ses chefs, et l'égalité du droit que la nature

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donne à chacun de ses membres sur cet

héritage.

Il seroit superflu de déduire ici les rais sons qui établissent ce droit de succession des enfans dans la propriété des biens de leurs peres. Quoi qu'on pût opposer à ces titres, il n'en résulteroit rien qui pût ébranler l'opinion commune au sujet de ce droit d'hérédité et affoiblir la juste protection que la société lui accorde.

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Puisque le droit de propriété sur la plupart des biens dont les hommes jouissent est un avantage qui leur est conféré par les conventions sociales, rien n'empêche, si l'on veut, qu'on ne regarde ces biens comme rentrant de droit, par la mort de leurs possesseurs, dans le domaine com mun; et ́retournant ensuite de fait, par la volonté générale, aux héritiers que nous appellons légitimes.

par

La société a compris que si les biens abandonnés la mort de leurs possesseurs ne doivent pas servir à grossir les fonds publics; que s'il faut à ceux qui disparoissent d'entre les vivans des succes-seurs particuliers qui les remplacent dans leurs possessions, ces successeurs ne pouvoient être pris que dans la famille même

qui étoit en quelque sorte co-propriétaire de ces mêmes biens; la société a senti que

les propriétés étant durables tandis que les propriétaires périssent, la succession de pere en fils étoit le seul moyen raisonnable de représenter le premier acquéreur des biens; la société a senti que c'est moins ici une nouvelle prise de possession par voie d'héritage qu'une continuité des mêmes jouissances et des mêmes droits résultans de l'état précédent de communauté ; enfin, la société a senti que, pour transférer les biens d'un défunt hors de sa famille, il faudroit dépouiller cette famille pour des étrangers, et qu'il n'y auroit à cela ni raison, ni justice, ni convenance.

Cette loi sociale, qui fait succéder les enfans aux peres dans la propriété des biens domestiques, doit se montrer dans toute sa pureté quand le chef de famille meurt intestat. Alors les enfans qui succedent partagent selon les loix de la nature, à moins que la société ne joue ici le rôle de marâtre, en rompant à leur égard la loi inviolable de l'égalité.

Mais il ne suffit pas d'avoir fait disparoître de notre code ce reste impur des loix féodales, qui, dans les enfans d'un

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même pere, créoient quelquefois, en dépit de lui, un riche et des pauvres, un protecteur hautain et d'obscurs subordonnés ; loix corruptrices qui semoient des haines là où la nature avoit créé la fraternité et qui devenoient complices de mille désordres, si pourtant il n'est pas plus vrai de dire qu'elles les faisoient naître. Il ne suffit pas d'avoir détruit jusqu'au dernier vestige de ces loix funestes ; il faut prévenir par de sages statuts les passions aveugles qui n'auroient pas des effets moins pernicieux que ces loix mêmes; il faut empêcher l'altération qu'elles apportent insensiblement dans l'ordre civil. Voyez, messieurs l'état actuel de la société; considérez-le comme un dernier effet de nos institutions, de nos loix; comme un résultat de ce qu'ont été et de ce qu'ont fait nos devanciers. Voyez dans ce résultat pour combien l'on peut y faire entrer tout le mal qu'a produit, pendant des siecles, le vice de nos loix testamentaires, et la monstrueuse inégalité des partages qui en a été la suite. Certainement vous trouverez par cette analyse que ces mauvaises loix ont fortement contribué à écarter de plus en plus la société de la

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nature; vous trouverez qu'il ne sera pas indifférent , pour l'y ramener, de tarir cette source d'écarts et de désordres.

Ce seroit donc une résolution juste en elle-même, conforme à la nature des choses et salutaire dans ses effets; ce seroit une résolution également sollicitée et par l'intérêt social et par l'intérêt domestique, que celle qui supprimeroit dans les familles toute disposition testamentaire dont l'objet seroit d'y créer une trop grande inégalité dans les partages.

Cette institution ne seroit pas nouvelle dans l'histoire des loix matrimoniales. On connoît la législation du premier peuple de la Grece. Je ne parle pas de ses anciennes loix un peu sauvages: elles ne permettoient aucun testament; je parle des loix faites dans un siecle civilisé, de celles qui furent données par Solon. Eh bien! ce législateur célebre, en réformant sur ce point la loi générale des Athéniens en admettant le droit de tester, excepta néanmoins de ce droit les chefs de famille. Il voulut que tout fût réglé, dans les successions en ligne directe, par les loix de la république, et rien par la volonté des citoyens. Eh quoi! n'est-ce pas assez pour la soMA

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