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doublé de bois on s'en servit pour con: tenir les eaux et traverser l'étang. Ce boisage fut prolongé jusqu'à neuf cents pieds. de profondeur: il fallut bientôt d'autres puits du même genre, et une foule d'autres machines. Chaque puits en bois dans les mines d'Anzin, de quatre cent soixante toises à plomb (car la mine a douze cents pieds de profondeur) coûte 400,000 liv. Il y en a vingt-cinq à Anzin, et douze aux mines de Fresnes et de Vieux-Condé; cet objet seul a coûté quinze millions. Il y a douze pompes à feu de 100,000 liv. chacune : les galeries et les autres machines ont coûté huit millions; on y emploie six cents chevaux ; on y occupe quatre mille ouvriers. Les dépenses en indemnités accordées, selon les regles que l'on suivoit alors, en impositions et en pensions aux ouvriers malades, aux veuves, aux enfans des ouvriers, vont à plus de cent mille livres chaque année : je demande si les propriétaires du sol auroient pu tenter une aussi vaste entreprise. A quoi cependant a-t-il tenu que cette mine, que tous les étrangers reconnoissent pour l'une des plus belles de l'Europe, n'ait ruiné les capitalistes dont elle avoit absorbé la fortune?

C'est par-là, messieurs, qu'il faut décider la question des mines. Le rapporteur a tout dit, selon moi, quand, dans les premieres pages de son rapport, il a rappellé les travaux immenses qu'elles exigent, ce concours de tant de moyens, cette réunion de tous les arts qu'il faut employer pour en rendre l'exploitation utile. Les mines ne peuvent appartenir qu'à celui qui peut les extraire; si l'on en faisoit des propriétés isolées, ce seroit évidemment y renoncer.

Ce résultat peut encore être appuyé de l'exemple de presque tous les peuples, et de notre propre expérience. Je ne cite ni les Grecs ni les Romains; car s'ils faisoient exploiter leurs mines pour le compte de l'état, n'oublions pas qu'ils avoient des esclaves, et nous ne voulons pas en avoir; mais en Allemagne, en Espagne, en Portugal, les mines sont des propriétés publiques.

Un auteur françois a prétendu qu'en Angleterre les mines sont des propriétés privées; il s'est trompé : on les considere comme un droit national; aucun particu lier ne peut fouiller une mine sans une permission du roi, qui ne la donne que moyennant une redevance appellée realty. Il y a

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en Angleterre des mineurs de profession; ils y sont classés; ils ont des barmestres des jurés, des tribunaux, et cependant en Angleterre les mines des fossiles sont peu profondes. On a confondu, parce qu'on a vu des mineurs propriétaires dans le nord de ce royaume; on ne s'est pas apperçu qu'ils étoient en même-temps concessionnaires. L'origine de ces concessions se perd dans F'antiquité; elles furent accordées à des étrangers venus de Saxe et de Danemarck; on leur donna, pour les retenir, un privilege perpétuel et une foule de prérogatives. On les nomme encore aujourd'hui tanniers; ils ont une police particuliere: le roi se fait payer le realty sur les mines qu'ils exploitent, comme sur toutes les autres. Ils sont propriétaires, parce que s'étant établis dans des lieux inhabités, la propriété du terrein ne leur a jamais été

contestée.

Notre expérience prouve également que la liberté individuelle d'exploiter les mines ne sert qu'à les rendre inutiles ou à les détruire; négligence dans leur recherche, erreurs funestes dans leur exploita tion dissension entre les propriétaires, dévastation, fruit de l'ignorance, abandon

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total par défaut de moyens : voilà les effets que la liberté a toujours produits, lorsque notre législation a voulu s'en rapprocher de trop près. Le rapporteur vous a rappellé les motifs du réglement de 1744; il fut rendu sur les plaintes de toutes les manufactures Ju royaume.

Je ne sais ce qu'on peut répondre à ces objections. Dira-t-on que les propriétaires formeront une société? Mais réuniront-ils tout-à-la-fois leur sol et leur fortune ? Leur sol: il faudroit souvent, pour exploiter une mine de deux lieues de rayon, réunir deux mille propriétaires; et quelle sera la proportion de leur intérêt ? comment un si grand nombre d'associés agiront-ils de concert? Leur fortune mais presque toujours elle seroit insuffisante; il est des mines dont l'entreprise a coûté dix fois plus que la valeur totale du sol qui les couvre. La réu nion étoit possible sous l'ancien régime. Qu'on cite un seul exemple où plusieurs propriétaires se soient réunis. N'oublions pas d'ailleurs qu'il y a plus d'entreprises de ce genre où l'on s'est ruiné, que de celles où les fonds sont rentrés. Ce revers importe fort peu lorsqu'il frappe sur des capitalistes; leurs fonds n'ont fait que passer dans

d'autres mains, et la société a gagné même à des tentatives infructueuses. Mais n'est-il pas contraire à l'intérêt public que les priétaires du sol s'appauvrissent ?

pro

Dira-t-on que des compagnies de mineurs acheteront toutes les surfaces des terres qu'ils voudront exploiter, et deviendront ainsi propriétaires? Je demande si la réunion d'un si grand nombre de propriétés seroit facile, et si elle seroit utile dans les principes de notre nouvelle constitution? D'ailleurs, peut-on espérer qu'une compagnie qui a des avances si considérables à faire avant de découvrir ce qui peut-être n'existe pas, ajoutera à toutes les chances qui sont contr'elle celle d'un achat d'immeubles qui seroit une source de nouvelles pertes?

Dira-t-on qu'il y aura un plus grand nombre de petites exportations, ce qui tiendra lieu des entreprises plus considérables? Mais on a déjà observé qu'on ne peut pas diviser une mine comme on divise la culture d'un champ. Les frais sont moindres dans les grandes entreprises, et la matiere de la mine peut être vendue à plus bas prix. Quand on a fait de grandes dépenses, on suit un filon jusqu'à son épuisement: la

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