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MERCURE

DE FRANCE.

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POÉSIE.

SCIPION A SON ARMÉE, EN ABORDANT EN AFRIQUE

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FRAGMENT.

ROMAINS, la voilà donc cette terre fatale,
De vos destins fameux dangereuse rivale,
Où furent assemblés ces bataillons nombreux,
Qui sous un chef encor plus redoutable qu'eux,
Pour renverser nós murs venus avec furie,
Depuis plus de seize ans dévorent l'Italie!
Soldats, rappelez-vous toutes leurs cruautés,
Les fleuves teints de sang et nos champs dévastés,
En tous lieux sous leurs pas les campagnes fumantes,
Vos enfans éperdus et vos femines tremblantes,
Voyant avec effroi du haut de nos remparts
Aux bords du Tévéron flotter leurs étendards.

Mais le jour est venu de laver nos injures,
Il est tems de punir ces traîtres, ces parjures,
Des plus sacrés sermens infracteurs odieux,
Et de venger enfin la patrie et les Dieux.
Abattons la fierté de cette république;
Excités par la haine, allons rendre à l'Afrique

Toutes les cruautés de ce nom de vainqueur,
La désolation, le carnage et l'horreur.

Ces fiers Carthaginois du fond de l'Ibérie,
Auront pu pénétrer au sein de l'Italie :

Et vous, braves guerriers, invincibles soldats,
Ce qu'ils ont entrepris vous ne l'oseriez pas !
Ah! je vois s'indigner votre bouillant courage.
Allons; et de ce pas, je vous mène à Carthage;
Annibal vint à Rome, et je veux l'imiter,
Ce qu'en vain il tenta je veux l'exécuter.

Aurons-nous à passer des monts inaccessibles,
Nous opposera-t-on des troupes invincibles?
Ils n'ont pour défenseurs qu'un ramas d'étrangers,
Vil troupeau qui s'enfuit à l'aspect des dangers,
Sans pairie et sans biens, du seul pillage avides,
Qui n'ont que la fureur et Fintérêt pour guides.
Et nous, braves amis, nous verrons tous les jours
Le Numide allié nous prêter son secours;
L'ardent Massinissa que son serment engage,
Accourt s'unir à nous pour renverser Carthage;
Nous le verrons suivi de ses nombreux soldats,
Et bientôt sur ces bords il guidera nos pas.
Marchons, et le succès est certain pour nos armes,
Tout tremble dans l'Afrique, et Carthage en alarmes
D'Annibal vainement implorant le secours,
Frémit, et croit déjà voir s'écrouler ses tours.

Et ce qui doit bien plus flatter notre espérance,
Ce Dieu qui prit toujours Rome sous sa défense,
Ce Dieu le seul auteur de tous nos grands exploits,
Ce Dieu qui doit ranger l'univers sous nos lois,
Le grand Capitolin nous promet la victoire ;
Mais si vous démentez en ce jour votre gloire,
Si la crainte un instant peut s'emparer de vous,
Trop indignes soldats, redoutez son courroux.

Rappelez-vous plutôt que l'Espagne soumise,.
Mardonius défait, Carthagène conquise,
Par vos sanglantes mains les Scipions vengés,
Font voir que par les dieux vous êtes protégés.

Et quelle gloire, amis, si nous pouvions encore
Détruire ces remparts que l'Italie abhorre,
Soumettre ce pays à Rome si fatal,

Qui nourrit Amilcar, qui vit naître Annibal,
Et pour prix de nos soins et de notre courage,
Voir croître les moissons aux lieux où fut Carthage.

9

TALAIRAT.

LES RIVES DE PROVENCE.

ÉLÉGIE.

SUR tes bords, aimable Provence,

Que ne puis-je couler mes jours!
Que ne puis-je, au sein des amours,
Savourer le bonheur d'une obscure existence,
Et reposer mon indolence,

Dans ces bois parfumés, à l'ombre de ces tours,
Qui conservent encor des premiers troubadours,
La poétique souvenance !

Jeune amant de la lyre et des ombrages verds,
Avec quel doux transport ici je me rappelle
Ces chanteurs si naïfs, dont les heureux concerts
Inspirés par l'amour, n'eurent point de modèle!
A leurs tendres accords, ce rivage enchanté,
Vit naître l'art des vers, la noble courtoisie,
Et cette fleur de loyauté,

Par qui du Gaulois indompté
La rudesse fut adoucie.

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O charme des antiques mœurs!
C'est ici que l'amant, avec persévérance
De sa douce ennemie adorait les rigueurs,
La servait en esclave, ornait de ses couleurs,
Ou sa guitare, ou le fer de sa lance;
Et moins timide après tant de souffrance,

Venait à ses genoux, les yeux mouillés de pleurs,

Demander un peu d'espérance.

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Les siryentes malins, les gentil's fabliaux,
Qu'enfantait chaque jour la muse des Trouvères.

Visité par eux tour-à-tour,

Hélas! pourquoi ce beau rivage
A-t-il vu tomber sans retour,

Ces superbes donjons, illustrés d'âge en âge,
Où des dames de haut parage
Rassemblaient leur galante cour!

Pourquoi sur ces gazons émaillés de pervenches,
Ne vois-je plus se rendre, ainsi qu'au bon vieux tems,
Des poursuivans d'amour, vêtus d'habits flottans,
Et couronnés de roses blanches!

O bergers! dans ces lieux vous qui fûtes nourris,
Vous dont la folle ivresse et me plaît et m'attire,
De grâce, montrez-moi les ombrages fleuris,
Où, pleins d'un aimable délire,

Ces jeunes paladins, ces poëtes chéris,
Venaient se disputer le prix,

"Du bien aimer et du bien dire.
Apprenez-moi quels murs, quels palais autrefois
Du joyeux Adhémar entendirent la voix :
Quel asyle a reçu la dépouille mortelle
Du noble Bérenger, du tendre Palazis,
Ou de ce Mirval si fidèle

Aux doux attraits d'Azalaïs.

2

Mais en vain je les prie.... aucun d'eux ne m'écoute.
Les sons du galoubet mêlés au tambourin,

Vers ces bois arrondis en voûte,
Appellent le folâtre essaim.

Là, sous de frais palmiers qu'un doux rayon colore,
Au bord de cette mer, témoin de leurs amours

Je vois se rassembler encore

Ces enfans des vieux troubadours.
Semblable au chevreuil des montagnes,

Près d'eux, une jeune beauté
Accourt d'un pas précipité,

A la tête de ses compagnes.

Dans les flots de ses noirs cheveux,

Le souffle du zéphir se joue,

La rose brille sur sa joue,

La flamme étincelle en ses yeux.
Aux bras de son amant, légère, elle s'élance :
Toutes à l'imiter s'empressent à-la-fois ;

Et répétant un refrain villageois,
Da foule bondit en cadence.

Cependant du sommet de ces riches coteaux,
Un faible crépuscule, avant-coureur de l'ombre,
A la gaîté de ces tableaux,

Vient mêler une teinte sombre.

Le long du bord, plus mollement,

Chaque flot tour-à-tour s'avance et se retire.
Avec un sourd gémissement,

Dans la feuille des bois le vent du soir expire;
Et la mer qui semble sourire,

A peine au plus léger navire
Imprime un doux balancement.

Fidèle à de si beaux rivages,

L'astre des nuits leur donne un regard indulgent,

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Pour le portrait de M. Ducis, gravé d'après le beau tableau de M. GERARD.

A ce front, à ces yeux, à cet air de fierté,

Et de puissance et de bonté,

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