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point, des communes bourgeoises dotées de l'autonomie municipale, et l'on trouve, en effet (analogie curieuse), les villes d'Augsbourg, d'Ulm, et d'autres encore, autorisées plus tard par le roi Albert d'Autriche à prendre, envers les couvents de leur ressort, des mesures toutes semblables à celles qu'avaient décrétées les gens de Schwyz 8. Mais, du libre exercice de cette autonomie, il ne résultait pas nécessairement pour eux, non plus que pour les villes qui en jouissaient, que leur communauté ne fût plus soumise à aucune suprématie politique; il n'en résultait pas, en particulier, qu'ils fussent affranchis, à l'égard des ducs d'Autriche, de la dépendance où ils s'étaient trouvés envers les comtes de Habsbourg. On peut seulement conclure que, tout en acceptant derechef les conséquences de cette dépendance, ils n'en avaient pas moins poursuivi, dans leurs propres affaires, leur œuvre d'affranchissement, et qu'ils aspiraient, plus que jamais, à être les maîtres chez eux. Dès que l'occasion se présenta de faire, à cet égard, un nouveau pas, ils la saisirent avec empressement.

Ce fut la rupture entre le roi Adolphe et le duc Albert qui la leur fournit. Tandis que les vallées d'Unterwalden, qui pendant cette époque continuent à demeurer dans l'ombre, ne songent point à tirer parti, au profit de leur liberté, de l'occasion favorable qui leur était ainsi offerte, leurs confédéres d'Uri et de Schwyz n'hésitent pas, dès qu'en 1297 le chef de l'Empire et celui de la maison d'Autriche se furent de nouveau brouillés, à solliciter du premier de ces princes la confirmation et le renouvellement de la franchise impériale, qui était, on le sait, l'équivalent de l'émancipation politique. Il est infiniment probable que ce furent les Schwyzois, toujours actifs et toujours à l'affût

des conjonctures propices, qui s'empressèrent, dans le cas actuel, de revendiquer les premiers, auprès d'Adolphe de Nassau, la mise en vigueur du diplôme de Frédéric II, par lequel ce souverain les avait placés sous l'autorité immédiate de l'Empire et que Rodolphe de Habsbourg avait refusé de reconnaître et de confirmer.

Le roi Adolphe, qui vit dans l'octroi de cette requête un moyen de se concilier des partisans et d'affaiblir son adversaire, se hâta d'y faire droit. Sans prendre la peine de rédiger un nouveau rescrit, et ne voulant pas d'ailleurs viser l'acte d'un prince excommunié, la chancellerie royale se contenta, ainsi qu'elle l'avait fait dans d'autres occasions, de reproduire textuellement le diplôme de Frédéric, comme s'il eût été délivré pour la première fois par le roi Adolphe, et celui-ci y apposa sa signature le 30 novembre 1297 Une expédition semblable en fut faite pour les gens d'Uri, quoique ce diplôme ne leur eût point été originairement destiné. Laissèrent-ils, en cette circonstance, agir à leur place leurs confédérés de Schwyz, sans trop s'inquiéter de la forme de la lettre royale, pourvu que leur mouvance de l'Empire reçut une consécration nouvelle? Préférèrent-ils eux-mêmes au rescrit d'Henri (VII), qui rappelait leur précédente dépendance des Habsbourg, celui de Frédéric qui, en les assimilant aux gens de Schwyz, faisait d'eux des < hommes libres? On ne sait, mais il n'y a pas grand intérêt à le rechercher, car sept mois s'étaient à peine écoulés, que le roi Adolphe, déposé par les Électeurs qui lui donnaient pour successeur le duc Albert d'Autriche, perdait la vie dans la bataille de Göllheim (2 juillet 1298) et laissait à son rival la possession incontestée du trône d'Allemagne.

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II

LES WALDSTÆTTEN PENDANT LE RÈGNE D'ALBERT D'AUTRICHE (1298-1308).

Les Waldstätten se trouvaient rejetés, par un revers de fortune, dans la condition où ils étaient déjà sous le règne de Rodolphe. De même que son père, Albert d'Autriche réunissait dans sa personne ou dans sa maison, l'autorité de comte et celle de roi, sans parler des droits que possédait sa famille à Schwyz et à Unterwalden, comme grand propriétaire foncier. Ce faisceau d'attributions rendait de nouveau facile au chef des Habsbourg d'étendre sa souveraineté dynastique sur cette portion de la Suisse centrale qui ne l'avait pas encore entièrement subie. Les tentatives mêmes qu'avaient faites les Waldstätten pour se soustraire à la domination autrichienne devaient leur faire craindre, soit qu'ils fussent les subordonnés de l'Empire, comme Uri, ou ceux du duc, comme Schwyz et Unterwalden, que le roi Albert n'amoindrit encore le peu d'indépendance que son père leur avait laissée. Les très-rares documents de ce règne qui sont relatifs aux Waldstätten ne confirment cependant point cette prévision.

Albert était un prince sévère, mais qui ne fit pas de son pouvoir un usage inique et oppresseur. Ami de l'ordre, observateur des lois, il ne se refusa point à reconnaître et à confirmer les franchises municipales dont, en Suisse même, jouissaient diverses villes placées sous la dépendance immédiate de l'Empire ou sous la suzeraineté de l'Autriche. Il ne ratifia point, à la vérité, les diplômes de son pré

décesseur, qui consacraient l'émancipation d'Uri et de Schwyz, car il eût ainsi porté atteinte, particulièrement en ce qui concerne le second de ces petits pays, aux droits de sa maison, et il cherchait, au contraire, avec autant d'ardeur que son père, à les étendre et à les sauvegarder. Mais il ne fit rien non plus pour aggraver la sujétion des vallées, ni même pour entraver le développement de leurs institutions communales.

Aucun des nombreux historiens contemporains qui ont parlé de son règne ne dit, il est vrai, un seul mot sur ses rapports avec les gens des Waldstätten, ce qui forme déjà une présomption que rien d'excessif ni d'anormal ne s'est passé entre eux durant ce temps. D'autre part, tout ce qu'ils racontent de sa conduite et de son gouvernement exclut l'idée qu'il ait suivi envers les trois vallées une politique différente de celle qu'il observa dans le reste de l'Empire, et qu'il ait adopté à leur égard un système de rigueurs odieuses et provocantes, dont on ne retrouve la trace dans aucun des lieux soumis à sa juridiction. En nous en tenant aux documents authentiques qui seuls suppléent à l'absolu silence des historiens, nous n'apercevons pas davantage le moindre vestige d'une oppression machiavélique, dont les Waldstätten auraient été les victimes avant d'en être les vengeurs.

Tandis que le roi Albert aurait pu, en vertu de ses droits de souveraineté, aliéner Uri à l'un des membres de sa famille, comme l'avait fait jadis Frédéric II en faveur de Rodolphe de Habsbourg, comme Frédéric le Beau le fit plus tard, et trop tard (10 février 1326), en faveur de ses frères, les ducs d'Autriche 1o, on le voit, en fait, maintenir cette vallée dans la mouvance immédiate de l'Empire, quoiqu'il

ne lui en eût pas expressément renouvelé le privilége, et exercer lui-même son autorité sur elle à titre de roi. C'est comme tel (rex Romanorum) qu'il s'adresse, le 1er avril 1302, au ministre de la vallée d'Uri » pour lui enjoindre de respecter les immunités dont doivent y jouir les ressortissants du couvent de Wettingen; c'est comme tel que les gens d'Uri le désignent à propos des impôts qu'il lève sur eux. Rien d'ailleurs ne paraît changé dans l'administration intérieure de leur communauté. Au début comme à l'issue du règne d'Albert, c'est toujours Werner d'Attinghausen qui se trouve placé à la tête de la vallée d'Uri, dont les habitants continuent à user, dans la gestion de leurs propres affaires, de la même liberté. On les voit transiger pour leur compte avec des seigneurs voisins, et ils ne craignent pas de mettre, à l'exemple de Schwyz, les biens récemment acquis par les religieuses de Zurich sur le même pied que toutes les autres propriétés de la vallée, pour le paiement des impôts destinés à subvenir tant aux taxes perçues par le roi qu'aux dépenses occasionnées par la guerre (von kunge oder von urluge)".

En avaient-ils usé de même à l'égard de Wettingen, qu'Albert avait pris sous sa spéciale protection? Il est permis d'en douter, car c'était un des caractères de leur conduite politique de savoir se plier aux circonstances plutôt que de tenter une résistance inutile; la temporisation fut alors pour les Waldstätten un de leurs plus grands moyens de succès. Mais toutes les libertés se tiennent, et, lors même qu'il fallait faire fléchir devant les droits du couvent privilégié le principe de l'égalité, les acquisitions qui mettaient aux mains de ce même couvent, dans la vallée d'Uri, des hommes et des terres jusque-là possédés par des laïques,

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