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voulons établir suppléera aux droits sur les boissons.

(On demande le renvoi de la motion de M. Le Chapelier au comité de l'imposition.)

(Ce renvoi est prononcé.)

Le projet de décret présenté par M. Dauchy est ensuite mis aux voix et adopté en ces termes :

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité d'imposition,

« Décrète qu'à compter du premier janvier prochain, le commerce et la vente des eaux-de-vie cesseront d'être exclusifs au profit de l'Etat, dans les départements de l'Ile-et-Vilaine, des Côtesdu-Nord, du Finistère, du Morbiban et de la LoireInférieure, qui composent la ci-devant province de Bretagne. A compter de cette époque du premier janvier, il sera libre à tous les citoyens de s'approvisionner et de faire commerce d'eau-devie, sauf le payement des droits qui pourraient être établis, et l'exécution des règlements qui seraient faits en conséquence. Après le premier janvier, les régisseurs des devoirs, impôts et billots, établis dans la ci-devant province de Bretagne, vendront publiquement et sur enchères les eaux-de-vie qu'ils auront en magasin, et ils tiendront compte du produit de ladite vente, ainsi que des autres objets de leur régie. »

Une députation de l'assemblée administrative du département du Pas-de-Calais est admise à la barre; elle présente le tableau des désordres occasionnés dans le département par les alarmes du peuple sur la libre circulation des grains. Loin de la protéger, la garde nationale même se joint au peuple. La loi martiale a été publiée ; mais le département sent qu'il est absolument impossible de ramener l'ordre si l'Assemblée nationale ne se détermine point à dissiper les alarmes du peuple. Il propose, en conséquence, à l'Assemblée, de décréter qu'il ne pourra être embarqué de grains sans que la municipalité du lieu du départ alt délivré un acquit-à-caution, qui sera visé par la municipalité du lieu pour lequel seront destinés les grains. Ce département demande aussi des secours extraordinaires pour soulager la misère du peuple.

M. de Beaumetz dit que les députés du département se sont réunis pour présenter à l'Assemblée un projet de décret qui soit conforme aux principes de l'Assemblée sur la matière de la circulation des grains et qui soit analogue aux nécessités locales. Il donne lecture de son projet de décret.

M. de Tracy s'oppose à ce projet en faisant remarquer combien il était à craindre que l'Assemblée ne contredit et n'altérât ses propres décrets.

M. Prieur demande le renvoi à demain. Le renvoi est prononcé.

(La séance est levée à trois heures.)

ASSEMBLÉE NATIONALE.

PRÉSIDENCE DE M. PÉTION.

Séance du lundi 6 décembre 1790, au soir (1).

La séance est ouverte à six heures et demie.

M. Salicetti, secrétaire, fait la lecture des adresses suivantes, dont le renvoi est ordonné aux différents comités :

Adresse du conseil général de la commune de la ville de Vézelise, département de la Meurthe, qui adhère de plus fort à tous les décrets de l'Assemblée nationale, et témoigne son respect et son dévouement inviolables à la nation, à la loi et au roi.

Adresse des administrateurs du conseil général du département du Gers, qui dénoncent la coupable coalition des évêques de France contre l'établissement de la nouvelle constitution civile du clergé, et supplient l'Assemblée de la détruire par tous les moyens qui sont en son pouvoir.

Lettre de M. Van-Oldeuneel d'Ondezeel, capitaine commandant au régiment royal-liégeois, par laquelle il proteste contre les excès commis à Belfort, et adhère aux sentiments que ses braves camarades ont adressés, à ce sujet, à l'Assemblée nationale et au roi.

Adresse de la société des amis de la Constitution, établie à Verdun, qui réunit ses efforts à tous ceux des bons citoyens, pour demander la proscription du duel.

Adresse des juges du tribunal du district du Quesnoy, qui présentent à l'Assemblée nationale le tribut de leur admiration et de leur dévouement.

Adresse du sieur Duplanil, médecin, citoyen de Paris, qui fait hommage à l'Assemblé d'un Essai sur la nécessité et les moyens de rendre les secours de la médecine gratuits dans tout le royaume.

Adresse de la société des amis de la Constitution, établie à Tours, qui demande que les séances des assemblées administratives soient rendues publiques.

Délibération de la municipalité d'Hennebond, contenant adhésion au mémoire de MM. Monneron et Beylier, députés à l'Assemblée nationale pour les habitants de Pondichery.

Adresse de la société des amis de la Constitution, établie à Toulouse, qui supplie l'Assemblée d'abolir la coutume du droit d'aînesse, et de réformer les lois qui s'opposent à l'égalité de partage entre les enfants.

Adresse de la garde nationale de ClermontFerrand, qui renouvelle l'assurance de sa ferme et invincible disposition à faire respecter les décrets de l'Assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi. Elle se plaint de l'inexécution des décrets qui ordonnent qu'il sera fourni des armes aux troupes citoyennes; et en annonçant son désir de voir organiser incessamment les gardes nationales, elle exprime son vœu pour que les officiers de la garde nationale ne soient point inamovibles, et pour qu'ils fassent le service avec désintéressement et sans aucune solde.

La municipalité de Strasbourg envoie la décla

(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.

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ration de M. le cardinal de Rohan, évêque du département du Bas-Rhin. Dans une lettre adressée au procureur-syndic du département, ce pasteur exprime son respect et sa fidélité pour ses saints canons, et déclare qu'il ne peut non seulement établir la constitution civile du clergé dans son diocèse, mais que, loin d'y coopérer, il proteste et protestera dans toutes les occasions contre les atteintes portées à la discipline de l'Eglise ; il reconnaît cependant que nombre d'autres décrets de l'Assemblée nationale ont pour but l'utilité publique.

M. Mougins. Je suis chargé de faire part à l'Assemblée d'une délibération prise par les prud'hommes, patrons, pêcheurs de la ville de Cannes en Provence, le 17 octobre dernier, dans laquelle ils se sont obligés à fournir annuellement aux mariniers-pêcheurs de leur contrée la somme de 600 livres pendant le cours de leur emploi aux classes. Il est glorieux pour moi d'être l'interprète de ces braves citoyens, et d'avoir à vous faire connaître un nouveau témoignage de leur bienfaisance et de leur patriotisme.

(L'Assemblée applaudit à différentes reprises, et ordonne qu'il sera fait dans le procès-verbal une mention honorable de cette délibération.)

M. de Menou, rapporteur du comité d'aliénation, propose et l'Assemblée adopte les douze décrets ci-dessous portant aliénation de domaines nationaux à diverses municipalités :

PREMIER DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission de la ville de Bourges, faite le 10 août dernier, en exécution de la délibération, prise par le conseil général de la commune de cette ville, le 25 mai dernier, pour, en conséquence des décrets des 17 mars et 14 mai derniers, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble les évaluations et estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier;

« Déclare vendre a la municipalité de Bourges, sise district du même lieu, département du Cher, les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai dernier, et pour le prix de 550,353 livres 9 sous 3 deniers, ainsi qu'il est porté par les procès-verbaux d'évaluation, et payable de la manière déterminée par le même décret. »>

DEUXIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soummission de la municipalité de la ville de Tours, faite le 23 mai dernier, en exécution de la délibération, prise par le conseil général de la commune de cette ville, le même jour, pour, en conséquence des décrets des 17 mars et 14 mai derniers, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations faites desdits biens en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier ;

« Déclare vendre à la municipalité de Tours, sise district du même lieu, département d'Indreet-Loire, les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai dernier, et pour le prix de 330.907 livres 10 deniers, ainsi qu'il est porté par les procès-verbaux d'évaluation, et payable de la manière déterminée par le même décret. »

TROISIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission de la municipalité de la ville de Langeais, faite le 7 juillet dernier, en exécution de la délibération, prise par le conseil général de la commune de cette ville, le même jour, pour, en conséquence des décrets des 17 mars et 14 mai derniers, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des estimations et évaluations faites desdits biens les 6, 8, 9, 10, 12, 13, 16, 17, 18, 19 et 20 novembre dernier, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier;

« Déclare vendre à la municipalité de Langeais, sise district du même lieu, département d'Indreet-Loire, les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai dernier, et pour le prix de 44,847 livres 6 sous 5 deniers, ainsi qu'il est porté par les procès-verbaux d'estimation et évaluation, payable de la manière déterminée par le même décret. »>

QUATRIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite le 27 juin dernier, par la municipalité de Trocy, canton de Lizy, district de Meaux, département de Seine-etMarne, en exécution de la délibération, prise le 23 du même mois de juin, par le conseil général de la commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, eusemble des évaluations ou estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 du mois de mai dernier;

« Déclare vendre à la commune de Trocy les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par décret du 14 dudit mois de mai, et pour le prix de 101,664 livres 9 sous 8 deniers, payable de la manière déterminée par le même décret. »

CINQUIÈME DÉCRET.

L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite le 12 août dernier, par la municipalité de Barcy, département de Seine-et-Marne, district de Meaux, canton de Lizy, en exécution de la délibération prise, par le conseil général de la commune, le 13 juin aussi dernier, pour, en conséquence de son décret du 14 mai dernier, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour,

ensemble des évaluations ou estimations faites
desdits biens, conformément à l'instruction dé-
crétée le 31 mai aussi dernier;

« Déclare vendre à la municipalité de Barcy les
biens compris dans ledit état, aux charges, clau-
ses et conditions portées par le décret du 14 mai
dernier, et pour le prix de 329,066 livres 6 sous
6 deniers, payable de la manière déterminée par
le même décret. »

SIXIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite par la municipalité de Fublaines, district et canton de Meaux, département de Seine-et-Marne, le 29 août dernier, en exécution de la délibération, prise le même jour par le conseil général de la commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations ou estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier;

« Déclare vendre à la commune de Fublaines les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 dudit mois de mai, et pour le prix de 117,862 li→ vres 18 sous 4 deniers, payable de la manière déterminée par le même décret. »

SEPTIÈME DÉCret.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite le 20 juin dernier, par la municipalité de Chaumes, district de Melun, département de Seine-et-Marne, en exécution de la délibération, prise le 28 dudit mois de juin, par le conseil général de la commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procèsverbal de ce jour, ensemble des évaluations ou estimations faites desdits biens les 6 et 7 du mois d'octobre suivant, en conformité de l'instructiion décrétée le 31 mai dernier ;

« Déclare vendre à la municipalité de Chaumes les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées au décret du 14 dudit mois de mai, et pour le prix de 188,164 livre 2 sous, payable de la manière déterminée par le même décret. »

HUITIÈME DÉCRET.

"L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite le 29 juin dernier, par la municipalité de MoissyCramayel, canton de Brie-Comte-Robert, district de Melun, département de Seine-et-Marne, en exécution de la délibération prise, le 25 mai précédent, par le conseil général de la commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procèsverbal de ce jour, ensemble des évaluations ou

estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier;

« Déclare vendre à la commune de MoissyCramayel les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 du mois de mai; et ce, pour le prix de 172,438 livres 10 sous 2 deniers, payable de la manière déterminée par le même décret. »

NEUVIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite le 27 juin dernier, par la municipalité de Juziers, district de Mantes, canton de Limay, département de Seine-et-Oise, en exécution de la délibération prise, le 31 mai aussi dernier, par le conseil général de la commune, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations ou estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier ;

« Déclare vendre à la municipalité de Juziers les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées au décret du 14 dudit mois de mai dernier, pour le prix de 87,891 livres, payable de la manière déterminée par le même décret. n

DIXIÈME DÉCRET,

L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite le 11 septembre dernier, par la municipalité de Mantes, en exécution de la délibération prise, le 15 mai précédent, par le conseil général de la commune, pour, en conséquence du décret du 17 mars 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations ou estimations faites desdits biens, en conformité de l'instruction décrétée le 31 du moi de mai dernier;

« Déclare vendre à la commune de Mantes, district et canton du même nom, département de Seine-et-Oise, les biens compris dans ledit élat, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 dudit mois de mai, et pour le prix de 56,215 livres, payable de la manière déterminée par le même décret. »

ONZIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite par la municipalité de Rungis, canton de Choisy, district du Bourg-la-Reine, département de Paris, le 12 septembre dernier, en exécution de la délibération prise, par le conseil général de la commune, le 23 mai précédent, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des estimations faites desdits biens, les 7 et 13 de ce mois, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier;

. Déclare vendre à la municipalité de Rungis les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 dudit mois de mai, et pour le prix de 183,589 livres 5 den., payable de la manière déterminée par le même décret. »

DOUZIÈME DÉCRET.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l'aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite par les commissaires de la commune de Paris, le 26 juin dernier, pour, en conséquence de son décret du 17 mars précédent, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l'état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des estimations faites desdits biens les 26, 27, 28, 30, 31 août; 1er et 2 septembre; 20, 24, 25, 26, 27, 28, 29 et 30 octobre; 3, 4, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 22, 23, 24 et 25 novembre derniers, en conformité de l'instruction décrétée le 31 mai dernier ;

« Déclare vendre à la commune de Paris les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai dernier, et pour le prix de 3,109,540 liv. 5 sous 5 den., payable de la manière déterminée par le même décret, "

M. de La Rochefoucault, au nom du comité d'aliénation, fait part à l'Assemblée de plusieurs ventes faites par la municipalité d'Orléans : il résulte que les biens se vendent au denier 30 du prix des baux, et qu'évalués 192,500 livres, ils ont monté, par l'adjudication, à 351,675 livres.

M. le Président. L'ordre du jour est le rapport des comités réunis, militaire, des rapports et des recherches, sur l'affaire de Nancy (1).

M. Brûlart (ci-devant de Genlis, marquis de Sillery), membre du comité des rapports, monte à la tribune et s'exprime en ces termes :

Messieurs, l'opinion publique n'est point encore fixée sur les causes du fatal événement qui vient de se passer à Nancy; dans ces temps malheureux de divisions et de discordes civiles, chaque parti rejette sur celui qui lui est opposé les désastres qui arrivent, et nous en avons un exemple frappant dans la circonstance fâcheuse où nous nous trouvons.

C'est au milieu de cette obscurité politique que vos comités ont cru devoir s'occuper des moyens de découvrir les principales causes de cet événement; c'est ce crime national qu'il faut dévoiler. Nous ne nous sommes point abusé sur les difficultés que nous devions rencontrer, étant chargé de vous faire un pareil rapport; de grands malheurs en ont été les suites; beaucoup de fautes ont été commises, et il n'y a point de classes de citoyens auxquelles nous ne puissions faire quelques reproches. Nous avons encore à redouter les opinions qui se sont formées d'après les récits plus ou moins exagérés des différents partis; mais vos comités vous doivent la vérité tout entière; ils sentent redoubler leur courage à proportion des difficultés qu'ils ont à vaincre, et ils rempliront la tâche laborieuse qu'ils ont entreprise. Nous aurons à gémir longtemps des suites fu

(1) Ce rapport est très incomplet au Moniteur.

nestes, des erreurs dans lesquelles les citoyens ont été entraînés; cependant en politiques, nous devons les regarder comme une leçon terrible pour tous les citoyens du royaume; qu'ils apprennent du moins, en voyant les malheurs de Nancy, les dangers de résister aux lois sages que vous venez d'établir; qu'ils calculent combien il est dangereux de se livrer sans réflexions à l'impétuosité des passions: et qu'ils se pénètrent enfia de cette grande vérité, que chaque citoyen, dans l'emploi qu'il exerce dans la société, doit concourir individuellement au bonheur et à la tranquillité générale, et qu'il devient coupable quand il en détruit l'harmonie. Les ministres de la religion, les magistrats, les citoyens, les officiers, les soldats, chacun dans les emplois qu'ils exercent, ont une influence incalculable sur le sort des autres citoyens, et nous allons bientôt vous en présenter un exemple frappant. Le plus grand'incendie peut quelquefois provenir d'une étincelle, qu'un souffle salutaire aurait arrêté.

Que les deux partis qui divisent maintenant la France, jettent les yeux sur les grandes destinées de cet Empire, si l'union renaît parmi eux; et qu'ils frémissent en voyant les suites de nos discordes. Le sang a déjà coulé, la nation est irritée : Citoyens! réfléchissez qu'au point où nous sommes arrivés, aucune puissance, aucun moyen ne peut déranger l'ordre immuable que la nation vient d'établir elle-même. Qu'il serait insensé au parti qui s'oppose à la volonté générale, d'espérer, recouvrir de chaînes la nation généreuse qui vient de s'en dégager, et qu'à l'époque où nous en sommes il faut nous vaincre ou obéir.

Nous allons commencer le funeste récit que nous avons à vous faire.

Représentants de la nation, pesez-en dans votre sagesse toutes les circonstances; ne perdez pas de vue que ce sont nos frères qui se sont égarés, et que c'est la nation entière qui, dans ce moment, est leur juge.

Vous avez sous les yeux le rapport de MM. les commissaires du roi. Cette pièce authentique doit être notre guide dans celui que nous avons à vous faire. La suite des événements y est racontée avec une scrupuleuse exactitude. L'analyse de ce mémoire nous a paru nécessaire, nous deVons rapprocher tous les faits, les combiner ensemble; et démêler s'il se peut la vérité, au milieu de cette foule d'événements qui se succèdent avec tant de rapidité; cependant, avant de les suivre dans leur intéressant travail, nous devons remettre sous les yeux de l'Assemblée les différentes époques où elle a été instruite des progrès de l'insurrection de Nancy.

L'Assemblée nationale avait prononcé un décret le 6 août dernier, dont le but était de rappeler à l'ordre et à l'obéissance quelques régiments qui s'en étaient écartés. Ce décret fut envoyé à Nancy, et malgré les lois qu'il prescrit, la garnison de cette ville se permit quelques actes d'insubordination, et des démarches qui y étaient absolument contraires.

Le 16 août, on lut à l'Assemblée une lettre de M. Denoue; il vous faisait un détail effrayant des troubles, de la révolte des régiments, de la dilapidation de la caisse militaire; elle annonçait des proJets funestes; les soldats armés parcouraient les rues le sabre à la main, et les meilleurs citoyens fuyaient la ville pour se soustraire au malheur inévitable qui la menaçait.

Une lettre si alarmante parut exagérée, à quelques députés du même département; ils avaient des lettres dans lesquelles les détails étaient

moins funestes; ils osèrent combattre le rapport de la municipalité de Nancy, qui confirmait ces détails par son procès-verbal, dont on vous fit également la lecture; mais ce rapport fut impérieusement défendu par les députés de cette ville.

Vous renvoyâtes aux comités militaire, des rapports et des recherches, les avis que vous veniez de recevoir; ne pouvant délibérer que sur les détails officiels qu'ils avaient sous les yeux, ils se pénétrèrent de la nécessité de rétablir l'ordre et d'en imposer aux soldats réfractaires aux décrets que vous aviez prononcés le 6 de ce mois.

Vous adoptâtes le décret du 16 août, que vos comités avaient rédigé le même jour; il fut sanctionné par le roi et envoyé à Nancy.

Deux jours après, vous fûtes instruits que huit soldats du régiment du roi, députés par leurs camarades, s'étaient rendus à Paris; qu'ils y étaient venus avec des permissions signées des officiers supérieurs de leur régiment, et des passeports en règle de la municipalité; que cependant,au moment de leur arrivée à Paris, le ministre de la guerre avait donné l'ordre de les faire conduire en prison. Vous ordonnâtes à vos comités de prendre connaissance de cette affaire et de vous en rendre compte. Ils décidèrent que le ministre de la guerre serait requis de supplier le roi, de permettre que les huit soldats, détenus au secret à l'hôtel de la Force, fussent transférés à l'hôtel des Invalides, où ils devaient se rassembler le lendemain pour les y entendre.

Les soldats du régiment du roi parurent devant vos comités, et l'un d'eux, prenant la parole, raconta tous les faits qui sont rapportés dans le mémoire qu'ils ont distribué. Vos comités délibérèrent sur le parti qu'il y avait à prendre avec les soldats; ils jugèrent qu'au degré d'effervescence où se trouvait la garnison de Nancy, la nouvelle de l'arrestation des députés pouvait y occasionner les plus grands désordres; ils jugèrent prudent d'envoyer promptement dans cette ville deux de ces députés, pour annoncer à leurs camarades que l'Assemblée nationale les avail écouté avec bonté et qu'elle examinerait leurs réclamations. Ils décidèrent que les six autres rest raient aux Invalides; et ceux-ci donnèrent leur parole d'honneur de ne pas sortir de l'hôtel.

M. Pescheloche, aide-major de la garde nationale de Paris, oftrit d'accompagner les soldats qui partaient pour Nancy; vos comités louèrent son zèle et acceptèrent ses offres.

Quelques moments de calme et de retour à l'ordre dans la garnison vous furent annoncés par le ministre de la guerre; mais vos espérances ne tardèrent pas à s'évanouir. Vous reçûtes, le courrier d'après, la nouvelle de l'arrivée de M. de Malseigne à Nancy. Cet officier général, chargé de recevoir les comptes des régiments, crut ne pouvoir allouer une demande que le régiment de Châteauvieux lui faisait, et son refus devint la cause d'une nouvelle insurrection dont les progrès furent si violents, que chaque courrier nous apportait des détails nouveaux, et toujours plus alarmants.

Vous reçûtes, à la barre,des députés de la garde nationale de Nancy, qui se contentèrent de vous donner presque les mêmes détails que les soldats du régiment du roi avaient faits à vos comités réunis ils ne vous parlèrent point de l'objet de leur mission, ayant appris que les troubles avaient recommencé depuis leur départ.

M. Pescheloche arriva de Nancy, et vint confirmer les mauvaises nouvelles que vous aviez reçues ; et, sans pouvoir vous donner aucun détail

positif, il vous instruisit que M. de Malseigne, qui s'était retiré à Lunéville, y avait été poursuivi par des cavaliers de mestre de camp; que les carabiniers avaient chargé cette troupe; qu'ils en avaient tué et fait prisonniers plusieurs ; que la garnison de Nancy était partie pour venger ses camarades; que la conduite sage de la municipalité de Lunéville avait suspendu leur fureur; que la garnison était rentrée à Nancy, et que les carabiniers avaient ramené M. de Malseigne que l'on avait jeté dans un cachot; que M. Denoue, commandant à Nancy, avait également été mis en prison, et que quelques officiers du régiment, du roi qui avaient voulu le défendre, avaient été blessés.

Votre consternation fut extrême à ces nouvelles affligeantes; vous décidâtes d'envoyer une proclamation aux troupes rebelles, et vous les me naciez de la rigueur de votre justice, s'ils n'obéissaient point à la loi. Cette proclamation n'était que confirmative du décret que vous aviez prononcé le 16, et déjà M. de Bouillé, instruit des désordres qui régnaient à Nancy, avait rassemblé les troupes de ligne de son commandement, ainsi que des gardes nationales, et il marchait vers les rebelles pour faire obéir à vos décrets.

Vous apprites le malheureux événement du 31 août, et vous décrétâtes que Sa Majesté serait suppliée d'envoyer deux commissaires pour faire les informations et découvrir les coupables, de quelque qualité qu'ils fussent. Le roi nomma MM. Bon-Claude Cahier et Honoré Duveyrier, pour remplir cette commission importante. Leur nomination tranquillisa les bons patriotes: on redoutait les suites de cet événement: l'opinion n'était point encore fixée. Les patriotes de Nancy faisaient entendre leurs cris, et les ennemis de la Révolution annonçaient que le calme était rétabli il était donc essentiel d'y envoyer des amis de la liberté et de l'ordre, pour rassurer et défendre l'une, et rétablir l'autre. MM. les commissaires emmenèrent avec eux MM. Gaillard et Leroi, leurs amis, qui voulurent bien leur servir de secrétaires et les seconder dans leurs importantes fonctions. C'est d'après leur rapport que nous allons vous donner un détail de cette suite d'événements malheureux.

MM. les commissaires du roi annoncent que les différents récits, qui leur ont été faits, ont presque toujours été dictés par le plus vif de tous les intérêts, par l'intérêt de l'opinion. C'est donc particulièrement de ce prestige que nous avons dù nous garantir : cependant vous allez successivement entendre des officiers, des soldats, des juges, des officiers municipaux, des citoyens. Le résultat des événements est le même dans tous les récits; mais les différents partis rejettent sans cesse sur celui qui lui est opposé les causes criminelles des désastres: chacun d'eux démasque son caractère par la nature des plaintes qu'il porte les magistrats, les officiers accusent hautement les soldats, les citoyens; et ceux-ci ont besoin d'être rassurés par les commissaires pour avoir le courage de se plaindre de leurs supérieurs.

Cependant, Messieurs, les commissaires vous annonceut qu'ils n'ont aucunes preuves certaines des causes inconnues, mais soupçonnées jusqu'à présent ce sont des patriotes qui cherchent à justifier, dans l'opinion publique, les ennemis de la Révolution.

C'est à l'époque de notre glorieuse Révolution qu'il faut remonter pour juger les causes des

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