« triste laboureur laissoit sa charrue et son travail, « et dételoit son taureau affligé de la mort de son « compagnon. «Ni le salutaire ombrage des bois, ni l'agréable « verdure des prairies, ni l'onde pure des ruisseaux « coulant sur du gravier et serpentant dans les cam« pagnés, né pouvoient réjouir les troupeaux foibles «et languissans. On voyoit leurs flanes creusés, leurs « yeux éteints, et leur tête penchée succomber sous « son propre poids. C'est en vain que leur travail « pénible avoit enrichi leur maître, qui ne les pouvoit « soulager. Cependant ni l'excès du vin de Massique, « ni l'abondance des mets exquis, ne leur avoient point « causé ce mal redoutable. Les feuilles des arbres, « l'herbe des prairies, avoient été leur seule noutri« ture leur breuvage n'étoit que l'eau transparente « des fontaines, ou celle des rivières que leur cours « épure. Leur sommeil n'avoit point été troublé par « d'affreuses inquiétudes. « Ce fut alors, dit-on, qu'on chercha dans ces « contrées deux bœufs pareils pour conduire au temple « de Junon un chariot chargé de présens pour la « déesse, et qu'on fut obligé de le faire traîner par « des buffles de différente grandeur. Dans la disette « de bœufs et de chevaux, le laboureur se vit réduit « à remuer son champ avec la bêche et le rateau, à <«<< faire avec sa main des sillons pour enfouir la se→ <mence dans la terre, et à traîner lui-même, chargé « d'un collier, ses charrettes jusqu'au haut des mon« tagnes. « Alors le loup ne tendoit plus d'embûches aux << troupeaux, et ne tâchoit point de surprendre les a bergeries pendant la nuit : un autre mal que la faim << le tourmentoit. Le daim timide, le cerf fugitif, ne << redoutoient plus les chiens, et sans crainte appro«< choient des maisons. Les eaux de la mer se ressen-> << tirent de la contagion : on vit les poissons, et les « monstres qu'elle porte dans son sein, flotter près << de ses rivages, ou, poussés par le flot, demeurer << étendus sur le sable, tels que d'infortunés matelots qui ont fait naufrage; les veaux marins entroient << dans les fleuves, dont les eaux leur étoient incon<< nues. La vipère même et tous les serpens, hérissant << leurs écailles, expiroient dans leurs trous, tandis <«< que les oiseaux, victimes de l'infection de l'air, périssoient au milieu des nues, et tomboient morts « sur la terre. Ce fut en vain qu'on fit changer de pâturages aux troupeaux : tous les remèdes, loin de guérir, devinrent nuisibles, et la force du mal « triompha de toute la science des Chiron et des Mélampe. La pâle Tisiphone, échappée des enfers, <<< causoit tous ces affreux rayages précédée des « Maladies et de la Peur, elle parcouroit les cam«pagnes, et se rendoit de jour en jour plus redou« table. Les rivages desséchés et les montagnes <<< arides ne retentissoient que du triste bêlement des brebis, et du lamentable mugissement des tau«reaux. La cruelle furie sans cesse entassoit dans « les champs et dans les étables les cadavres infects « des animaux empoisonnés, que l'on enterroit ep сс cc I « suite dans des fosses profondes: car on ne pouvoit « faire aucun usage de leurs peaux; ni l'eau ni le « feu ne pouvoient les purifier. On ne s'avisoit point « non plus de vouloir profiter de la toison des brebis «que la contagion avoit fait périr. Si quelques-unes « de ces laines avoient été travaillées, personne « n'osoit y toucher, ni encore moins s'en revêtir«Quiconque étoit assez imprudent pour le faire voyoit à l'instant son corps couvert de pustules « ardentes, et inondé d'une sueur infecte; et bien« tôt il se sentoit consumé par un feu dévorant que << rien ne pouvoit éteindre.>> 1 ་་་་་་་་་ DIRA lues populis, irâ Junonis iniquæ, Dum visum est mortale malum, tantæque latebat Strage canum primò, volucrumque, oviumque, boumque, De generat; palmæ veterumque oblitus honorum, Pervenit ad miseros, damno graviore, colonos " Semianimes errare viis, dum stare valebant, Quid mihi tunc animi fuit? aut quid debuit esse, Ut vitam odissem, et cuperem pars esse meorum? Quò se cuinque acies oculorum flexerat, illic Vulgus erat stratum, veluti cùm putria motis Poma cadunt ramis, agitatâque ilice glandes. Templa vides contrà gradibus sublimia longis; Inque manu thuris pars inconsumpta reperta est! Fibra quoque ægra notas veri, monitusque deorum, |