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le polythéisme qui peuple l'univers de divinités. On prononce aussi souvent le mot de nature, qui n'est, en effet, qu'un mot, quand il ne désigne pas l'être qui est le principe et l'âme de toutes choses. Que l'on admette, si l'on veut, au sein de la nature, des forces et des puissances, il faudra toujours rapporter ces causes à une cause unique dont elles émanent, qui les dirige et régularise leur action. Toutes ces hypothèses ne dispensent nullement de reconnaître une direction suprême et une Providence qui s'étend à tout, aux plus petites parties comme à l'ensemble. (Voy. Clarke, Tr. de l'Exist. de Dieu.)

Ces raisons sont si évidentes, que les progrès seuls de la science et de la raison ont suffi pour reléguer le déisme proprement dit au nombre des systèmes vieillis et surannés qui appartiennent désormais à l'histoire. Il n'a guère conservé de partisans que parmi les hommes peu accoutumés à réfléchir et restés étrangers au mouvement des idées. Mais ce que le déisme a perdu, le panthéisme l'a gagné. Or, ce système ne détruit pas moins que le précédent la véritable notion de la Providence. Nous n'entreprendrons pas de nouveau sa réfutation; nous l'abandonnons à ses conséquences. Il en est une surtout qui ressort trop évidemment du principe pour qu'elle ne frappe pas tous les yeux, et qui l'a toujours fait repousser par la conscience humaine : c'est l'impossibilité d'admettre le libre arbitre. Quel que soit l'appareil imposant de formules scientifiques dont il s'enveloppe, le panthéisme moderne ne peut cacher ce vice fondamental.

Le point de départ de toute philosophie, et en même temps son but, ce sont les faits de la conscience et les vérités de la raison. C'est de là qu'il faut partir et c'est là qu'il faut aboutir. Entre les deux points se place l'explication; mais expliquer n'est pas détruire. Toute explication qui détruit ou dénature un des deux termes doit être rejetée comme fausse ou insuffisante. Le monde et Dieu, la liberté de l'homme et l'action divine dans la nature et dans l'homme, voilà les termes du problème. Il est trop commode d'anéantir l'un ou l'autre. C'est ce que font l'athéisme d'une part

et le panthéisme de l'autre. Quant au déisme, il prend un parti tout aussi simple : celui de supprimer le rapport.

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· Difficultés qui naissent de la question de la Providence et du plan de l'univers.

Une foule de difficultés surgissent, en effet, de la question de la Providence et de la nécessité de concilier les termes qu'elle comprend. Comment, en particulier, accorder la liberté humaine avec la prescience divine et avec la toutepuissance de Dieu? De grands génies ont cherché cette conciliation et ont proposé diverses explications. Nous n'osons affirmer qu'elles aient réussi à dissi per les nuages et les obscurités de ce mystérieux problème que nous avons déjà rencontré ailleurs. (Liberté, p. 221.)

L'univers est gouverné par une intelligence suprême qui fait concourir tous les événements, et toutes les actions humaines en particulier, à l'accomplissement de ses desseins. Il est facile de reconnaître partout, dans la nature et dans l'histoire, un plan sagement conçu; la science nous en révèle chaque jour quelque chose. Mais quel est-il? Nous est-il donné de pénétrer la pensée de Dieu? Nous n'avons sous les yeux qu'une très-petite partie de l'œuvre divine; comment prétendre comprendre le but final de la création tout entière? Cependant, il est donné à l'homme de connaître la fin que s'est proposée la sagesse infinie en le créant, lui, être doué de raison et de liberté, et en l'élevant ainsi au-dessus des autres créatures. L'homme ne doit pas ignorer complétement sa destinée, puisqu'elle a été remise entre ses mains. Or, la destination de l'homme en cette vie révèle en partie le plan du monde actuel: elle suffit, au moins, pour justifier la Providence contre les accusations dont elle pourrait être l'objet de la part de ceux qui se laissent troubler par le spectacle des désordres et des maux qui couvrent la surface de la terre.

CHAPITRE IV.

OBJECTIONS CONTRE LA PROVIDENCE.

ART. I.

OBJECTIONS TIRÉES DU MAL PHYSIQUE.

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« Tout ce que nous pouvons sur les infinités, c'est de les connaitre confusément et de savoir au moins distinctement qu'elles sont. Autrement nous jugeous fort mal de la beauté et de la grandeur de l'univers. »

(LEIBNITZ, Nouv. Ess. Av.-Prop.)

Du mal en général et des diverses espèces de maux.

I. DU MAL EN GÉNÉRAL. S'il est impossible de méconnaître l'ordre admirable qui règne dans l'ensemble et dans toutes les parties de cet univers, on ne peut nier aussi que le désordre et le mal n'y occupent une grande place. Le mal est partout dans le monde physique et dans le monde moral. Or, pourquoi le mal, et comment le concilier avec l'existence d'un Dieu souverainement bon et d'un être parfait ? L'origine et la cause du mal est une de ces grandes énigmes qui, de tout temps, ont vivement préoccupé l'intelligence humaine, et dont elle a demandé la solution à la religion et à la philosophie. L'opposition de deux principes (manichéisme), le dualisme de la nature et de l'esprit, l'optimisme, tant d'autres explications que l'on rencontre dans les systèmes religieux ou philosophiques, témoignent de l'impression que la présence du mal en ce monde a toujours faite sur l'esprit de I'homme, et des efforts de sa raison pour s'en rendre compte. Les adversaires de la Providence ne pouvaient manquer de s'emparer de ce fait et d'y puiser leurs principales objections.

II. MAL PHYSIQUE.-Lemal s'offre à nous sous une multitude de formes. On en distingue deux espèces, le mal physique et le mal moral. Si l'ordre est manifeste dans la nature, le désordre

aussi vient y frapper nos regards. Les forces de la nature nous offrent, au lieu du spectacle d'un développement harmonieux, celui d'une lutte constante. Cette guerre des éléments est marquée par les catastrophes et les révolutions qu'a subies notre globe, et par les fléaux qui en désolent encore aujourd'hui la surface. La même opposition se manifeste entre les êtres vivants. La plupart des espèces sont ennemies et cherchent à se détruire; les individus naissent, croissent, dépérissent et meurent; très-peu atteignent leur développement complet, et le plus grand nombre périt avant le terme ordinaire de leur courte existence.

A cette espèce de mal, à proprement parler physique, s'en ajoute un autre, particulier aux créatures sensibles : la souffrance et le malheur. Tous les êtres de la nature qui ont reçu, avec le sentiment d'eux-mêmes, la sensibilité sont soumis à cette loi; l'homme surtout, chez lequel la capacité de souffrir est en proportion du nombre et de la supériorité de ses facultés. Les maladies affligent son corps, l'ignorance et l'erreur obscurcissent ou égarent son esprit et sont pour lui la source d'une foule de misères; le doute l'accompagne dans la poursuite ardente de la vérité, ou l'attend au terme de ses recherches. Mille peines viennent briser son cœur. Fûtil heureux autant qu'il peut l'être, son bonheur est fragile et passager. La vie humaine est enfermée dans des limites étroites, et le terme en est irrévocablement fixé.

III. MAL MORAL. Mais un autre mal est celui qui est propre aux créatures raisonnables et libres. Les êtres de la nature, obéissant à leurs lois aveuglément et fatalement, ne sont pas responsables du mal qui se fait en eux et par eux. A l'homme a été confié le soin d'accomplir lui-même sa destinée. L'obligation lui a été imposée de réaliser la loi que conçoit sa raison et d'y conformer sa volonté. Mais, au lieu d'écouter la voix de sa conscience, qui lui ordonne d'obéir à cette loi, souvent il se met en opposition avec elle. De là un nouveau mal plus grand que le précédent, et qui a reçu le nom de mal moral (malum culpæ). Il n'est pas moins abondamment répandu que les autres maux sur la surface du

monde. Que de crimes, de fautes, de faiblesses, pour un acte de véritable vertu! la passion, l'intérêt, l'égoïsme ne sont-ils pas les mobiles avoués ou secrets de presque toutes les actions humaines? Enfin, il est un dernier désordre non moins capable de jeter le trouble dans la raison, c'est celui qui résulte de l'injuste répartition des biens et des maux dans le monde actuel. Entre la vertu et le bonheur, le vice et le malheur, la raison conçoit un rapport et une proportion nécessaires, qui n'admettent aucune exception, et qui constituent pour elle l'idée même de la justice. Or, qui oserait dire que l'homme de bien reçoit ici-bas la récompense exacte de ses actions; que le méchant est toujours puni comme il le mérite? Un pareil optimisme serait démenti par l'expérience et repoussé par le sens commun.

IV. OBJECTIONS CONTRE LA PROVIDENCE. Le mal donc existe et sous une multitude de formes; or, comment le concilier avec la toute-puissance, la justice et la bonté de l'Étre souverainement sage qui a créé ce monde et le gouverne? de la naissent autant d'objections contre la Providence.

Si Dieu est tout-puissant et sage, comment expliquer les imperfections de son œuvre ? S'il est bon, comment le malheur de ses créatures? S'il est saint, comment le mal moral? S'il est juste, comment l'injuste répartition des biens et des maux?

SI.

Réponses aux objections du mal physique,

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I. RÉPONSE GÉNÉRALE. Une réponse générale est que ces objections ne peuvent ébranler en rien des vérités aussi solidement établies que celle de l'existence de Dieu et de ses attributs. Ainsi, quand même nous ne pourrions trouver une explication de l'existence du mal, capable de satisfaire de tout point la raison, ce ne serait pas un motif pour méconnaître la sagesse, la bonté, la justice de Dieu, dont l'homme ne pourra toujours pénétrer qu'imparfaitement les desseins. N'est-il pas plus conforme au sentiment de notre faiblesse,

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