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de la théorie de la peinture: cependant Brueghel d'Enfer n'est pas plus avancé que Van Eyck dans la science de la perspective sa couleur est plus compliquée, sa touche plus facile; mais son style a moins d'élévation, et son dessin est plus négligé que celui du peintre de Bruges. La première partie de l'Histoire du Monde (no 320 ) est ce qu'on peut imaginer de plus mauvais, sous le rapport de la composition et de la perspective: l'expression et le dessin sont fort inférieurs à ceux des tableaux de la plupart des peintres de petites figures. Les deux autres parties présentent quelques effets de lumière artificielle assez bien rendus ; et en examinant, avec beaucoup d'attention, la multitude des têtes qu'elles renferment, on en trouve quelques-unes touchées vigoureusement et avec esprit. Quant à la composition, c'est le rêve d'une imagination malade; et ce qu'il y a de plus étonnant en un pareil ouvrage, c'est la patience de l'homme appliqué sérieusement à exécuter tant d'images extravagantes, et non moins dégoûtantes pour l'esprit que pour les sens.

Brueghel a fait entrer dans la composition des monstres de ce tableau, une multitude d'insectes et de très petits animaux, dont les parties, développées sur une grande échelle et diversement agencées, fournissent une variété infinie de formes singulières, qui semblent des choses nouvelles. Il est sans doute déplorable que ce soit là les modèles d'une grande composition historique. Je remarquerai cependant que l'usage des êtres microscopiques empruntés des trois règnes de la nature, n'est point à dédaigner pour le dessinateur d'ornements; il fournira au contraire, sans grands frais, de très-grandes ressources à celui qui saura en user avec discrétion et discernement: même, si Brueghel s'en est avisé le premier, il faut reconnoître qu'il ne pouvoit avoir une idée

plus heureuse pour parer au moins d'une apparence de verve, le misérable genre qu'il s'étoit fait, et auquel il dut son étrange surnom.

M. B.

LIV.

ATHÉNÉ DE PARIS.-De l'état des lettres en Italie, au commencement du XIVe siècle.

HUIT heures sont sonnées; on attendoit avec impatience le citoyen (1) Ginguené: le verre d'eau et du sucre, attribut essentiel d'un professeur d'athénée, et qui devroit entrer dans ses armoiries, s'il y avoit encore des armoiries, étoit sur la table. Un spectateur a soif: il s'imagine qu'indépendamment de l'instruction et du plaisir qu'on trouve à l'athénée, il peut, pour ses quatre louis d'abonnement, prendre sur le marché un verre d'eau, il s'empare de celui qui est à sa portée. Monsieur! s'écrie le garçon de la salle, il falloit m'en demander un autre; celui-là étoit pour monsieur le professeur : c'étoit de l'eau chaude.... Cette anecdote n'est pas en elle-même bien importante; mais rien n'est petit quand il s'agit de l'athénée; et si quelque jour on en écrit l'histoire, ce verre d'eau pourra y figurer; et il ne sera pas indifférent d'apprendre à la postérité que les professeurs y buvoient de l'eau chaude.

Le cit. G. ne paroissoit cependant pas, et j'ai craint un instant que ce malheureux verre d'eau ne nous privât du plaisir de le voir. Il arrive enfin, et il reçoit l'ac

(1) On voit que cet article est un peu ancien ; mais les principes qui y sont réfutés ont été imprimés depuis peu.

cueil dû à un professeur qu'on n'a pas vu depuis quinze jours; car il faut que l'on sache que le cit. G. a fait son mardi gras, ce qui n'est pas trop philosophique, puisque c'est reconnnoître en quelque sorte le calendrier de l'Église romaine; mais au moins il ne s'est point réconcilié avec les princes de cette Église. Sa leçon a commencé par une vive diatribe contre les papes qui fixèrent leur denieure à Avignon, depuis le pape gascon Clément V, jusqu'à Jean XXII. « Je sais bien, a-t-il » ajouté, que ces détails déplairont à certains critiques qui se sont chargés de mon instruction, quoiqu'à en » juger par la manière dont ils écrivent, la leur me pa>> roisse fort négligée; mais j'attends que ces messieurs » m'apprennent comment je dois faire pour parler de » l'Histoire littéraire de l'Italie sans parler de l'Italie, » ou pour parler de l'Italie sans parler des papes, ou » pour parler des papes autrement que l'histoire ».

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J'espère que le cit. G. ne se plaindra pas que j'altère ses expressions: je leur ai conservé tout le sel dont il les a assaisonnées. Je voudrois qu'elles en eussent davantage, parce qu'elles auroient été plus goûtées; on les auroit applaudies encore plus fort, et elles m'auroient fait rire davantage; mais, en conscience, le cit. G. n'a pas en plus d'esprit que je ne lui en donne. Après lui avoir ainsi rendu justice, il me permettra sans doute quelques réflexions.

Si mon instruction est négligée, falloit-il me le reprocher aussi durement? Un professeur doit-il décourager ainsi des élèves de bonne volonté? Ne fais-je pas tout ce qu'on peut faire de mieux pour réparer le malheur d'une instruction négligée? Ne vais-je pas à l'Athénée ? Là, je suis les cours d'un professeur de rhétorique, qui m'apprendra à écrire; d'un professeur d'histoire philosophique, qui m'apprendra à penser; je suis même

allé entendre, l'autre jour, disserter sur la formation de la pluie la première fois qu'on dissertera sur la formation du beau temps, j'irai encore, afin d'avoir une théorie complète sur la pluie et le beau temps, et savoir tout ce qu'on dit à l'Athénée sur ces objets neufs et intéressants: enfin, je compléterai mon cours d'instruction par une théorie sur les bases salifiables, et j'espère que le cit. G. sera content de moi.

Je n'ai jamais eu la sottise de trouver mauvais que le cit. G. parlát de l'Italie, et j'ai toujours désiré qu'il ne parlât pas des papes autrement que l'histoire. Mais ce n'est pas en parler comme l'histoire, que d'en parler comme quelques historiens passionnés ; ce n'est pas parler comme l'histoire, que d'accuser le christianisme d'avoir couvert le monde des ténèbres de la barbarie ; ce n'est pas parler comme l'histoire, de prétendre que les papes, les évêques, les ecclésiastiques, les moines, ont détruit et les livres et les sciences, lorsque l'histoire atteste que c'est par leurs soins que les uns ont été conservés, et que les autres ont refleuri; c'est parler autrement que l'histoire, que de présenter le pape Saint Grégoire comme un brûleur de livres, un destructeur des arts, un persécuteur des savants et des mathématiciens. C'est ainsi, il est vrai, que parlent deux historiens, Machiavel et Brucker; mais ils ont été si solidement réfutés, non-seulement par des écrivains orthodoxes, mais par des philosophes qui ne doivent pas être suspects au cit. G., tels que Bayle et Barbeyrac; qu'il a dû croire que parler comme de tels historiens ce n'étoit pas parler comme l'histoire. Il a dû savoir que ces prétendus mathématiciens chassés par le pape, n'étoient que des astrologues; et il est assez plaisant d'entendre le cit. G., qui se moque tant des astrologues, lorsqu'ils ne sont pas chassés par les papes, déclamer

contre les papes lorsqu'ils chassent les astrologues.

J'ai reproché au savant professeur de n'avoir pas rendu justice aux papes Innocent In, Honoré 111, Grégoire ix, Innocent,v, Urbain 111: de n'avoir parlé que de leur guerre avec Frédéric Barberousse, tandis qu'il ne faisoit pas une guerre militaire ; et n'avoir rien dit des connoissances étendues du premier, et de la protection accordée aux savants et aux Universités par les autres, tandis qu'il faisoit une histoire littéraire.

Enfin, puisqu'il faut absolument une pâture à la malignité du cit. G., je lui abandonne le pape Gasana et même plusieurs autres, et même la comtesse de Périgord, car, quoique je m'intéresse beaucoup à l'honneur des comtesses de Périgord, je puis bien lui en abandonner une qui vivoit il y a plus de cinq cents ans. Je lui observerai cependant, que rapporter ainsi des faits scandaleux, lorsqu'ils sont étrangers à l'objet que l'on traite, ce n'est point la preuve de bonnes intentions ni d'un bon esprit. Or, quel rapport entre l'Histoire littéraire d'Italie et les amours de Clément V et de la comtesse de Périgord? Le fait est-il même incontestable? Je ne le trouve ni dans Platina, ni dans Ciaconiús.

Cette petite discussion, dans laquelle m'a entraîné la querelle que m'a faite le cit. G., m'empêchera d'entrer dans de longs détails sur la séance, mais on n'y perdra pas beaucoup : il a parlé d'une foule d'auteurs obscurs que les Italiens mêmes ne lisent plus, et dont il est peu intéressant pour les Français de connoître le nom; et quoiqu'il ait prétendu qu'il n'y a point de rang dans la poussière, et que tout ce qui n'est pas lu mérite également d'y étre enseveli, il n'a appliqué cette sentence qu'aux auteurs ecclésiaset aux théologiens. Quant aux autres, il les a tirés de la tiques poussière, quoiqu'ils ne soient pas lus davantage.Il a parlé longuement de l'Acerba de Ceco d'Ascoli, a pré

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