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adresser de vives réclamations en faveur des pensionnats de jeunes demoiselles, si justement célèbres à Paris.

A l'abri du nom le plus respectable, celui de Fénélon, on commence par condamner ces institutions; on les déclare non-seulement inutiles, mais vicieuses. « Les mères, disent ces Aristarques, doivent être les >> seules institutrices de leurs filles.» Mais celles qui ont le malheur de perdre leurs parents, qui donc prendra soin de leur éducation? Voilà, j'espère, un argument sans réplique. Eh! ne faut-il pas, Messieurs, que vous éprouviez un grand besoin de critiquer, puisque, non contents des auteurs sifflés, des livres sans débit, des acteurs sans talent, il faut que vous attaquiez des personnes charitables et généreuses qui, pour le prix modique de 12 et 1800 fr. par tête, font abstraction de toute espèce de calcul, de passion et de plaisirs, pour se livrer tout entières aux soins qu'exigent l'éducation de trente, quarante et jusqu'à soixante jeunes orphelines.

C'est peu : non contents de saper les fondements de l'institution, messieurs les censeurs jaloux osent en condamner tous les détails. Il y a quatre ou cinq ans qu'ils blâmoient nos institutrices de ne nous apprendre que la musique et la danse; à présent, ils leur reprochent de nous initier aux sciences et aux belles-lettres. Pourquoi, disent-ils, ne pas se contenter d'enseigner à ces petites filles la cuisine, la couture et le tricot! On voit bien ici percer le bout de l'oreille. Ces messieurs désireroient n'avoir pour femmes que des ignorantes, qu'ils mèneroient selon leur caprice, à qui ils feroient tout accroire. Ils voudroient fonder leur double empire sur leur force et sur notre bêtise. Alte-là, Messieurs! les pensionnats modernes mettent des bornes à votre ambition, à votre tyrannic.

Voilà le vrai secret de votre haine : Inde irœ.

Oui Messieurs, je sais le latin, j'ai tout appris: le grec, en cas que le sort me destine à un savant, que je relèverai en cas d'anachronisme; les mathématiques, si un géomètre m'est réservé en mariage, et pour le faire marcher en droite ligne ; la législation, en cas d'alliance avec un avocat, pour lui conper, quand il faudra, la parole: je défie enfin tous les hommes, et les attends tous pour maris.

Au reste, Messieurs, vous l'avez voulu ; ne vous plaignez pas. Il y a cinq ans, comme je vous l'ai dit, que toujours chantant et dansant, nous savions à peine lire ; nous ressemblons à nos professeurs, qui piqués par vos reproches, ont fait leurs cours en même temps que nous, et en savent maintenant un peu plus que leurs écolières.

Des professeurs! Vous en chercheriez vainement ailleurs de semblables aux nôtres. Ceux de collége sont pédants et lourds. Les nôtres, aimables et légers, savent unir les fleurs de la rhétorique aux fleurs de la galanterie, et nous instruisent en nous amusant.

Celui-ci, en nous apprenant l'histoire romaine, ne passe jamais au règne de Titus sans faire l'éloge de nos cheveux. Belle Aglaé, disoit-il l'autre jour à mon amie, arrangez toujours votre coiffure comme l'empereur romain; ayez toujours et votre tournure et sa bonté, tout le monde vous aimera; vous ferez plus de conquêtes que Titus, et, plus heureuse que lui, vous ne perdrez pas de journée.

Cet autre, à propos de mythologie, voulant figurer le Parnasse, fait prendre à chacune de ses écolières un des attributs des Muses: Agatha saisit sa harpe, Malvina son luth, Cécilia déclame, Rosa danse; il arine celle dont les traits sont les plus prononcés, d'un couteau de table en forme de poignard ; il donne un masque

à la moins jolie : quelle délicatesse! « Ainsi, Mesde>> moiselles, vous verriez le Parnasse entier, s'écrie-t-il, << s'il ne nous manquoit pas un Apollon. » Et aussitôt, sensibles à sa galanterie pleine de grâce, nous le drapons d'un léger schall, nous lui mettons une perruque blonde, et le proclamons Phébus. (C'est ce qu'on appelle une leçon de mythologie en action. )

Allez, censeurs chagrins, de pareils procédés ne sauroient s'effacer par des critiques; vous blâmez nos exercices, nos prix, nos programmes; hé bien, apprenez que le programme n'a pas tout dit: un bal a suivi la distribution; et là, mères et filles se sont tourà-tour applaudies, encouragées, succédées. La meilleure danseuse a exécuté une gavotte qui a enlevé tous les suffrages; et mille applaudissements répétés, vingt couronnes réservées et mises sur sa tête, l'ont bien vengée du silence honteux du programme, et du babil indiscret des journaux. J'ai l'honneur d'être, Messieurs.

une Orpheline.

U.

XXXIII.

Sur un Livre intitulé: De la Nécessité de l'Instruction des Femmes; par madame GACONDUFOUR, de plusieurs sociétés littéraires; auteur du Traité pratique d'Économie rurale et domestique, et autres ouvrages.

NE

UNB académie avoit proposé pour sujet de prix l'utilité des maisons incombustibles. Un anonyme avertit

l'académie qu'elle avoit elle-même remporté le prix, puisque proposer une question semblable, c'étoit la résoudre. La question que madame Gacon présente, est du même genre. Personne, en effet, ne doute qu'il n'y ait une instruction nécessaire pour les femmes. Personne n'a pensé qu'elles dussent ignorer leurs devoirs de religion et de morale: personne n'a cru qu'il leur fût permis de négliger le soin de leur ménage, qu'elles ne dussent veiller sur leurs enfants, et soigner le bonheur domestique de leur époux. Mais ce qui sera toujours un objet de dispute, c'est le degré d'instruction qu'il convient de donner aux femmes. Hors la religion et la morale, tout le reste est arbitraire: la fortune, le rang et les dispositions naturelles exigent ou permettent des occupations et des études différentes: un système général et uniforme d'éducation n'est qu'une absurdité.

Madame Gacon reproche avec sévérité aux pères de famille la préférence qu'ils ont donnée aux talents de la danse et de la musique. « Ce n'est pas, dit-elle, que je veuille bannir de l'éducation les talents agréables; mais je voudrois que l'on commençât par les talents utiles, à moins qu'on ne destinât ses filles à être artistes. Mais si on les destine à être mères de famille, il faut qu'elles apprennent tout ce qui est utile pour leur ménage, tout ce qui peut procurer une vie douce et paisible; il faut sur-tout qu'elles conçoivent le désir de faire partager leurs goûts à leurs époux. » Cette dernière nécessité ne me paroît pas aussi bien établie que les autres : un ménage n'en seroit pas moins heureux, quoique le mari n'eût pas comme sa femme, le goût des occupations domestiques. Mais ce qui me paroît vraiment d'un succès infaillible, c'est le plan d'instruction tracé par madame Gacon : « Je voudrois, ajoute-t-elle, qu'on fit lire alternativement à une jeune personne Montaigne et la Maison rus

tique; Mably et l'art d'apprendre à filer les laines, coton,lin, etc., Parmentier, pour la culture des pommes de terre ; Fénélon et la Cuisinière économe; Plutarque et l'Art de la manipulation des pains; Buffon et l'Éducation des bêtes à laine; la Philosophie de Newton et la Science d'une bonne fermière. »>

Ce système d'éducation, extrêmement neuf, est développé dans un roman : c'est un usage consacré; et depuis que Lucrèce a conseillé de frotter avec du miel les bords des vases où les enfants doivent boire leur guérison (1), c'est par des romans qu'on est convenu de les

instruire.

J'ai malheureusement passé l'âge où l'on goûte encore le miel; et j'avouerai que je n'ai pas lu le nouveau roman que j'annonce. Je n'en conçois pas moins une opinion très-avantageuse de son mérite. J'en ai pour garant la liste des ouvrages que son auteur a déjà publiés. Cette liste est imprimée à la tête de son nouveau livre, et l'on nous saura gré de la transcrire ici : L'homme errant fixé par la raison; les Dangers de la coquetterie ; Georgiana; Mélicarte et Zirphile; Voyage de plusieurs. émigrés; la Femme grenadier; le Contre-projet de loi portant défense d'apprendre à lire aux femmes ; Recueil pratique d'économie rurale; plusieurs mémoires insérés dans ceux de la Société d'agriculture (2.). (1) Vers de Lucrèce.

(2) La liste des ouvrages de madame G. s'est considérablement grossie depuis cet extrait; et les critiques, en admirant cette fécondité, n'ont pas donné moins d'éloges «< aux secrets admirables par » lesquels madame G. fait du vin sans raisin, des confitures sans >> sucre, des livres sans jugement, sans esprit, sans style, sans » raison; » de tout cela, et après avoir prouvé tout cela, l'un de ses critiques, M. A., a tiré la conclusion suivante : « Si madame G. « veat absolument travailler pour nous, elle doit se contenter de » nous donner ces petites recettes économiques qu'elle nous indique » de temps en temps pour faire des confitures et des liqueurs; car,

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