Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

que le Roi eft inquiet de vos premières dénbérations. La manière dont les Etats-généraux en dirigeront la forme, eft une des grandes; queftions qui s'eft élevée dans le royaume, & les avis fur la délibération en commun ou par tête, femblent s'être partagés avec une ardeur qui deviendroit alarmante, fi l'amour du bien public ne formoit entre vous, Meffieurs, un point de réunion plus fort & plus puiffant que les opinions & les fentimens propres à vous' divifer. Le Roi, Meffieurs, connoît toute l'étendue de la liberté qui doit vous être laiffée ;* nais fans accord, votre force s'évanouiroit, & les efpérances de la nation feroient perdues. Sa' Majefté a donc fixé fon attention fur des préliminaires dont les conféquences peuvent être

grandes; & ce n'eft pas encore cependant comme votre Souverain, c'eft comme le premier tuteur des intérêts de la Nation, c'eft comme le plus fidèle protecteur de la félicité pu blique, que le Roi m'a ordonné de vous préfenter ún petit nombre de riflexions. J'aurois aimé peut-être à en être difpenfe, car on ne s'approche jamais fans danger de ces questions délicates dont l'efprit de parti s'eft déja rendu maître; mais il faut rejeter avec dédain toutes les confidérations perfonnelles qui font tou jours erabarras dans la route du bien public.

Ce fera vous, Meffieurs, qui chercherez d'abord à connoitre l'importance ou le danger dont il peut être pour l'Etat que vós délibérations foient prifes en commun ou par ordre, & les lumières qui fortiront de votre affemblée influeront fans doute fur l'opinion de Sa Majefté; mais le choix du moment où cette queftion doit être traitéé, fi ce choix eft fait fagement, fuffira pour prévenir les risques où les inconvéniens d'une femblable difcuffion y

& c'eft principalement fur ce point que je vais m'arrêter.

Tout annonce, Meffieurs , que fi une partie de cette affemblée demandoit que la première de vos déterminations fût un vou pour délibères par tête fur tous les objets qui feront foumis à votre examen, il réfulteroit de cette tentative, fi elle étoit obftinée, une fciffion telle que la marche des Erats-généraux feroit arrêtée ou long-tems fufpendue, & l'on ne peut prévoir quelle feroit la fuite d'une femblable divifion.

[ocr errors]

Tout prendroit au contraire une forme diffé rente, tout fe termineroit peut-être par une conciliation agréable aux partis oppofès, fi les trois Ordres, commençant par fe feparer, les deux premiers examinoient d'abord l'importante queftion de leurs privilèges pécuniaires, & fi, confarmant des voeux déjà manifeftés dans plufieurs provinces, ils fe déterminoient d'un commun accord au noble abandon de ces avantages. PerTonne d'entre vous, Meffieurs ne pourroit avec juftice effayer de ravir aux deux premiers Ordres le mérite d'un généreux facrifice; & ce feroir cependant les en priver, ce feroit du moins en obfcurcir l'éclat, que de foumettre cette décifion à la délibération des trois Ordres réunis une poffeffion qui remonte aux temps les plus reculés de la Monarchie, est un titre qui devient encore plus digne de refpect au moment où ceux qui en jouiffent font difpofés à y renoncer. Il eft donc jufte, il eft raifonnable que les Députés des Communes laiffent aux repréfentans des deux premiers Ordres tout l'honneur d'un tel facrifice. C'eft en vain que pour en diminuer le prix, c'eft en vain que pour le ternir, on voudroit y donner le nom d'obligation fimple & naturel. Certes, de pareils

actes de juftice ne font pas communs, & l'his» 1oire n'en préfente pas d'exemples.

Suppofons maintenant que cette délibération foit prife par la Nobleffe & par le Clergé, qu'elle le foit promptement & de la feule manière dont on peut l'attendre , par un noble fentiment, par un mouvement digne de l'élé vation d'ame qui caractérise les principaux membres des deux premiers Ordres de l'Erar; dès ce moment ils recevront de la part des représ fentans des Communès, cet hommage de recon noiffance & de fenfibilité auquel aucun François ne fut jamais réfractaire. Ils feront invités à s'unir fouvent aux Repréfentans du peuple pour faire en commun le bien de l'Etat; & fûrement ce ne fera pas d'une manière générale ni abfolue qu'ils refifteront à cette avance. Cependant une première union entre les Ordres une fois formée & les ombrages des uns dif fipés, les plaintes & les jaloufies des autres appaifees, c'eft alors qu'avec calme & par des Commiffaires nommés dans les trois Ordres, on examinera les avantages & les inconvéniens de toutes les formes de délibérations; c'eft alors qu'on défignera peut-être les queftions qu'it importe au Souverain & à l'Etat de foumettre à une difcuffion féparée, & les objets qu'il eft convenable de rapporter à une délibération commune; c'est alors enfin qu'on jugera plus fainement une queftion qui préfente tant d'af pects différens. Vous verrez facilement que pour maintenir un ordre établi, pour ralentir le goût des innovations, les délibérations confiées à deux ou trois Ordres, ont un grand avantage, & que dans les temps & pour les affaires où la célérité des réfolutions & l'unité d'action & d'intérêt deviennent néceffaires, la confultation en commun mérite la préférence. Vous examine.

[ocr errors]

rez ces principes & bien d'autres avec une impartialité inconnue jufqu'à prëfent, du mo ment que l'abolition des priviléges pécuniaires aura rendu vos intérêts égaux & paralleles. Enfin, Meffieurs, vous découvrirez fans peine soute das pureté des motifs quisengagent Sa Majesté à vous avertir de procéder avec fagede à ces différens examens. En effet, s'il étoit pofble qu'Elle fût uniquement occupée d'aflurer fon influence fur vos déterminations, Elle fau roit bien apercevoir que l'afcendait du Souve rain feroit un jour ou l'autre favorisée par l'éta bliffement général & conftant des délibérations en commun; car dans un temps où les efprits me feroient pas foutenus, comme aujourd'hui ; par une circonftance éclatante, peut-on doùser qu'un Roi de France n'eû: des moyens pour captiver ceux qui, par deur éloquence & leurs lens, paroitroiene devoir eptrainer un grand nombre de fuffrages ! La marche des délibéra. tions confiées à deux ou trois Ordres, eft danc, par falenteur & fa circonfection, la moins favo rable aux grandes révolutions ; & quand vorre Monarque, Mefficur;, vous ramène à ces réficaions, il vous donne une nouvelle preuve de n amour fincère du bien de l'Etat.

Ahlfi dans le cours de ce Mémoire, fi en parcourant rapidement les objets les plus impor tans, je ne vous ai pas fait connoître ces fenti mens-généreux & les intentions pures qui diri gent toutes les déterminations de notre augufle Monarque, n'en accufez, Mel curs, que l'ic terprète dont il a fait choix. Sa Majesté veut le bien & le veut dans toure son étendue; & après avoir été souvent contrariée dans fes désirs & dans fés tentatives, Elle vient chercher en vous une confolation & un appui. Non, son espoir se fera point trompé, vous voudrez lui mar

quer

de la reconnoitance, vous voudrez lui dɔn, ner le prix qu'Elle attend de vous, & ce prix,, ce prix ineflimable fera l'avancement du bonheur de fes peuples. Soyez unis, Meffieurs pour une fi grande entreprife, foyez unis pour répondre aux vœux de la Nation, foyez unis pour foutenir avec honneur les regards de l'Europe,foyez unis pour tranfmettre fans crainte vos noms à la pofterité, & pour contempler. à l'avance le tribunal rigoureux des générations futures. Elles auront un compte à vous deman; der ces générations innombrables dont vous allez peut-être fixer la destinée. Vos rivalités, vos prétentions, vos débats perfonneis pafferont comme f'éclair au milieu de l'immenfité de l'efpace, ils ne laifferont aucune trace dans la route des fiècles; mais les principes d'union. & de bonheur que vous aurez affermis, deviendront le témoigna ge & comme le trophée perpétuel de vos travaux & de votre patriotiíme. Oui, ce que vous aurez fait our l'avantage de l'Etat & pour fa gloire, ce que vous aurez fait pour en affurer la durée, le trouvant infeparablement lié à la plus grande & à la plus éclatante de toutes les circonftances, confiera votre fouvenir à la reconnoiffance des hommes; & qui ne fait que leur reconnoiffance s'accroit à mefure que le temps éloigne d'eux leurs bienfaiteurs & les obfcurcit de fon ombre !

[ocr errors]

Mais, ne vous le difimulez point, Meffieurs, il faut qu'une conflitution bienfaifante & falutaire foit cimentée par la puiffance de l'efprit public, & cer cfprit public, ce patriotime, ne confiftent point dans une forveur paffagere, ou dans un aveugle défir d'une nouvelle fituation; un tel défir, une telle agitation, fubfifteront toujours, car il eft dans l'orire inviolable des chofes, que le plus grand nombre des habitans d'eux de meil

'd'un Empire découvrent auto des habitans

« ZurückWeiter »