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du feu. L'amiral anglais, qui ne semble pas avoir tiré tout le parti possible du mode d'attaque des Français, fit, en ce moment, signal de virer de bord. Ce signal ne fut sans doute pas aperçu, car peu de vaisseaux virèrent de suite; il est vrai que plusieurs avaient éprouvé des avaries assez graves pour n'exécuter cette manœuvre qu'avec difficulté. Quoi qu'il en soit, la ligne anglaise se trouva dès lors complétement déformée. Le contre-amiral Villaret jugea le moment favorable pour faire donner le corps de bataille ainsi que l'arrière-garde et laissa arriver de manière à croiser la route des Anglais. Ainsi, pendant que l'avant-garde gouvernait au O.-N.-O., au plus près du vent, et l'armée anglaise à l'E.-S.-E., à peu près sans ordre, les deux dernières escadres de l'armée française prenaient une direction qui devait être le Nord ou le N.-N.-O., courant obliquement sur l'ennemi. Il s'ensuivit une vigoureuse canonnade à contre-bord. Bientôt, l'avant-garde française se trouva seule sur le champ de bataille où elle avait combattu, puisque l'ennemi suivait une route diametralement opposée à la sienne; elle ne reçut cependant qu'à 2h 30m l'ordre de virer pour se rapprocher du reste de l'armée et le signal lui enjoignait de le faire vent devant par la contre-marche. L'exécution de cet ordre n'était pas possible. Le Montagnard demandait une remorque et les autres vaisseaux de l'avantgarde avaient leur grément et leurs voiles trop endommagés pour réussir à virer vent devant. Les deux armées courant l'une sur l'autre, se rencontrèrent promptement, et aucune des deux ne se dérangeant de sa route, les vaisseaux se mêlèrent. Le vaisseau amiral anglais QUEen CharLOTTE passa derrière l'Éole, sixième vaisseau de queue, prit les mêmes amures que lui et le combattit au vent. Le BELLEROPHON s'adressa au Terrible qui avait démâté de son petit mât de hune et sur l'avant duquel il avait passé; ce vaisseau, par suite de la position sous le vent du Tyrannicide et de l'Indomptable, était de fait le serre-file de la ligne. Donnant dans le même créneau, le LEVIATHAN prit poste äu

vent des deux vaisseaux souventés. L'ORION et le BARFLEUR passèrent entre le Tyrannicide et l'Indomptable et portèrent principalement leurs coups sur le dernier. « Mais, dit le contre-amiral Villaret dans son rapport, les Anglais trouvèrent une résistance qui doit immortaliser Dordelin et Lamesle.» Dès que le commandant en chef s'aperçut de la position fâcheuse de son arrière-garde, il signala de virer vent devant par la contre-marche pour aller la dégager. Il était 4. Les vaisseaux tardant à répondre à ce signal qui demandait une exécution immédiate, le contre-amiral Villaret prit l'initiative à 4" 45m et, ordonnant de se placer par rang de vitesse, il se mit à la tête de la colonne. Tous virèrent plus ou moins tard, à l'exception du Montagnard qui continua vers l'Ouest. L'amiral anglais n'attendit pas leur arrivée; il rallia ses vaisseaux. Les deux armées se canonnèrent encore quelque temps et le feu cessa entièrement à 5. Les Français qui avaient perdu l'avantage du vent reprirent les amures à bâbord et chacun travailla à réparer ses avaries. L'Indomptable en avait de considérables dans toutes ses parties. Le Tyrannicide et lui n'avaient plus que leurs bas mâts. Le Brutus prit l'Indomptable à la remorque et le conduisit à Brest; le Montblanc les escorta. Du côté des Anglais, les vaisseaux QUEEN, ROYAL GEORGE, SOVEREIGN et INVINCIBLE avaient le plus souffert.

Le Montagnard avait eu tout d'abord sa vergue de petit hunier coupée. A 1a, le vaisseau qu'il combattait se retira et le laissa réparer le désordre de son grément qui était haché. Lorsque, plus tard, le commandant en chef ordonna de virer, le capitaine Bompard signala ne pouvoir le faire et demanda une remorque. La mâture du Montagnard était tellement transpercée par les boulets, qu'il n'osa changer d'amures dans la crainte de la voir s'abattre; il travailla à l'assujettir et vira à 4". La frégate la Seine, qui s'était approchée de lui lorsqu'il avait signalé des avaries, le prit à la remorque. Une brume très-épaisse ne permettait plus

d'apercevoir l'armée (1); quelques vaisseaux se voyaient dans le lointain, mais il était impossible de distinguer à laquelle des deux nations ils appartenaient. Le capitaine Bompard envoya la Seine les reconnaître; le capitaine Cornic (Yves), de retour à 2h du matin, déclara que cela ne lui avait pas été possible. La brume continua toute la journée; au jour, il n'y avait plus un seul bâtiment en vue. Le capitaine Bompard gagna alors le rendez-vous indiqué dans ses instructions et il y rencontra le contreamiral Vanstabel qui lui donna l'ordre de le suivre.

La plupart des historiens qui ont rapporté le combat naval du 29 mai (9 prairial) ont attribué à l'inexpérience et au manque de connaissances tactiques de quelques capitaines la non-exécution du signal de virer de bord fait par le commandant en chef. Si l'on tient compte de la manière dont se faisaient les promotions à cette époque, et qu'on jette les yeux sur les états de services des officiers auxquels était confié le commandement des vaisseaux de la principale armée navale de la République, nul doute qu'on ne soit autorisé à penser que, dans cette occasion, plusieurs durent n'être pas à la hauteur de la position que les circonstances leur avaient faite. Il serait injuste, toutefois, de ne pas admettre que des signaux non répétés, ou au moins répétés d'une manière imparfaite, purent ne pas être aperçus. Cela ayant eu lieu dans l'armée anglaise, cette hypothèse n'est pas inadmissible en faveur des capitaines français.

Toujours observé par les Anglais, le contre-amiral Villaret continua de courir au N.-O. Le 30, le convoi d'Amérique passa sur le lieu même du combat. Ce jour-là, le contre-amiral Nielly rallia avec le Sans-Pareil, capitaine Gourand, le Trajan, capitaine Dumoutier, et le Téméraire, capitaine Morel (Henry). Le vaisseau de 78° le Trente-et-un

(1) Aucun autre rapport que celui du Montagnard ne fait mention de ce brouillard le jour même du combat.

Mai (1), capitaine Ganteaume (Honoré) se joignit également à l'armée, ce qui la porta à 26 vaisseaux. L'amiral Howe pouvait en mettre 25 en ligne.

Une brume très-épaisse enveloppa les deux armées pendant trente-six heures et, durant ce temps, elles ne s'aperçurent qu'à de rares intervalles; le ciel ne redevint clair que le 1er juin (13 prairial). L'armée anglaise avait conservé le vent qui soufflait du Sud au S.-S.-E. et, ainsi que celle de la République, elle courait bâbord amures. Le contre-amiral Nielly porta son pavillon sur le Républicain, et plusieurs changements furent prescrits dans l'ordre de bataille qui fut établi comme il suit : Convention. Gasparin, America, Téméraire, Terrible, Impétueux, Mucius, Éole, Tourville, Trajan, Tyrannicide, Juste, Montagne, Jacobin, Achille, Vengeur, Northumberland, Patriote, Entreprenant, Neptune, Jemmapes, Trente-et-un-Mai, Républicain, Sans-Pareil, Scipion, Pelletier. L'amiral Howe intervertit aussi l'ordre de ses vaisseaux et les rangea ainsi CESAR, BELLEROPHON, LEVIATHAN, RUSSEL, ROYAL SOVEREIGN, Marlborough, Defence, Impregnable, TremenDOUS, BARFLEUR, INVINCIBLE, CULLODEN, GIBRALTAR, QUEEN Charlotte, Brunswick, Valiant, Orion, Queen, Ramilies, ALFRED, MONTAGU, ROYAL GEORGES, MAJESTIC, GLORY, THUNDERER. Après quelques manœuvres préparatoires, l'armée anglaise laissa porter tout à la fois, à 8a du matin, sur celle de la République, alors en panne, et chaque vaisseau ennemi se dirigea sur celui qui lui correspondait dans la ligne française. L'amiral Howe avait signalé qu'il se portait sur le centre avec l'intention de couper la ligne; mais il laissait chaque capitaine libre d'attaquer, comme il l'entendrait, le vaisseau français qui lui correspondait. Tous étaient sous les huniers. A 8" 45",-9b 24m suivant la relation anglaise, les vaisseaux de tête de l'armée française ouvrirent le feu, à grande distance; les Anglais ne ripostèrent

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(1) L'ancien Orion.

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