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grande distance, dès qu'un virement de bord les rapprochait. Cette manœuvre dura plusieurs heures. Il était facultatif au lieutenant général de Grasse d'engager une affaire générale; mais, bien qu'il eût été rallié par 4 vaisseaux qui étaient sur la rade du Fort-Royal, la crainte d'exposer son convoi l'empêcha de courir les chances d'un combat sérieux. Les vaisseaux qui l'avaient rallié étaient:

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Le contre-amiral Hood resta à l'ouvert de la baie jusqu'au lendemain matin; la gravité des avaries du Russel, du CENTAUR et de l'INTREPID, le décidèrent alors à s'éloigner. Le capitaine du CENTAUR avait été tué. Le lieutenant général de Grasse se mit à la poursuite de l'armée anglaise et, le 1er mai, il lui fit envoyer quelques boulets. Après l'avoir harcelée pendant deux jours, il reprit la route du Fort-Royal où il mouilla le 6. Les vaisseaux français n'avaient eu que de légères avaries dans la voilure et dans le grément.

Le contre-amiral Hood écrivit que jamais journée n'avait vu dépenser aussi mal à propos autant de poudre et de boulets que celle du 29 avril. Cela peut être vrai. Ce n'est cependant pas la conclusion qu'on pourrait tirer de son rapport puisque c'est lui qui nous apprend, et l'obligation dans laquelle il se trouva de renvoyer de suite le RUSSEL à la Barbade, et les motifs qui le déterminèrent à lever la croisière.

Le chef d'escadre de Monteil qui, après le départ du comte de Guichen pour l'Europe, au mois de juillet 1780, avait pris le commandement de la division navale des Antilles, venait de protéger l'entrée de la flotte espagnole du Mexique à la Havane, et il allait faire route pour le Cap Français avec les vaisseaux le Palmier, le Destin, l'Intrépide, le

Triton et l'Actionnaire de 64° (1), la frégate l'Andromaque et la corvette le Serpent, lorsque la junte de l'île de Cuba le pria de prêter sa coopération aux opérations dirigées contre Pensacola, port de la Floride, dans le golfe du Mexique. Le chef d'escadre de Monteil accéda à cette demande; il consentit même à se ranger sous les ordres du chef d'escadre espagnol don Jose Solano, et se rendit de suite devant la ville assiégée. Les opérations marchaient avec une lenteur telle, que le chef d'escadre français dut demander qu'on employât ses vaisseaux. Il proposa de faire entrer le Triton, l'Andromaque et le Serpent dans la rade. Sa proposition fut acceptée, mais non sans beaucoup de peine. Le jour même où le mouvement allait se faire, un coup de vent força la division à appareiller. Pendant que, dispersée, elle tenait la mer sur cette côte dangereuse, l'explosion d'un magasin à poudre détermina le commandant général de la Floride occidentale à demander une capitulation qu'il obtint le 8 mai.

Le général espagnol qui avait dirigé les opérations du siége se loua de la coopération active et entendue des officiers et d'un détachement de 800 hommes qui avaient été fournis par la division française. Celle-ci était de retour au Cap Français, le 10 juillet.

Le 5 juillet, le lieutenant général de Grasse appareilla du Fort-Royal de la Martinique et, prenant sous son escorte tous les navires de commerce qui étaient en partance pour l'Europe, il se dirigea sur Saint-Domingue; le16, il mouilla au Cap Français. Un désastre affreux avait signalé cette traversée la frégate de 32° l'Inconstante, capitaine de Longueval, avait été incendiée et 90 hommes seulement

(1) Les capitaines de ces vaisseaux étaient MM. Dumaitz de Goimpy, Duplessis-Parscau, Brun de Boades, de Larchantel. Le pavillon du commandant en chef était arboré sur le Palmier.

s'étaient sauvés. Huit jours après l'arrivée de l'armée navale, un malheur semblable arriva au vaisseau de 74° l'Intrépide, capitaine Duplessis-Parscau : ce vaisseau faisait partie de la division du chef d'escadre de Monteil.

Le lieutenant général de Grasse avait fait connaître au ministre de France aux États-Unis son intention de se porter, au mois de juillet, sur la côte d'Amérique pour offrir sa coopération au commandant en chef de l'armée américaine. Mais comme il n'avait aucune connaissance des mouvements de cette armée, qu'il ignorait les projets de ses généraux, et qu'il ne savait même pas où se trouvait la division navale qui stationnait sur la côte, il avait prié le représentant de la France de lui faire parvenir au Cap Français des renseignements qui lui étaient indispensables avant de se mettre en route. Expédiée dans ce but, la frégate la Concorde, capitaine de Tanouarn, l'attendait sur cette rade. Le général comte de Rochambeau qui commandait le corps auxiliaire français envoyé en Amérique, lui faisait connaître la situation fâcheuse des provinces du Sud et l'engageait, tant personnellement qu'au nom du général Washington, à entrer dans la Chesapeak ou à se porter sur New-York. Il l'avertissait qu'il avait quitté la Providence pour se réunir au commandant en chef de l'armée américaine sur la rivière l'Hudson et le priait de lui amener un renfort de 5 à 6,000 hommes, des munitions et de l'argent, car il n'en avait pas pour payer les troupes qu'il commandait. Les instructions du commandant en chef lui prescrivaient de détacher 9 vaisseaux pour escorter les convois qui rentraient en Europe; mais elles lui laissaient aussi la latitude de différer leur départ s'il jugeait leur présence nécessaire sur la côte d'Amérique. Il se décida, non-seulement à les garder, mais il prescrivit encore au chef d'escadre de Monteil qu'il avait trouvé sur la rade, de se ranger sous son pavillon avec ses 4 vaisseaux. Il obtint du gouverneur de Saint-Domingue l'embarquement de 3,300 hommes des garnisons de l'île, à la condition qu'une

escadre espagnole viendrait stationner sur la rade du Cap Français pendant l'absence de ces troupes. Quant à l'argent, il ne lui fut pas possible d'en trouver malgré ses offres et celles du chevalier de Charitte, capitaine du vaisseau la Bourgogne, de donner leurs propriétés comme garantie, et il fut obligé d'en envoyer emprunter à la Havane. Convaincu que la promptitude de son départ contribuerait puissamment au succès de la campagne, il mit à la voile, le 4 août; et pour mieux cacher la marche de son armée, il passa par le vieux canal de Bahama. La frégate l'Aigrette, capitaine de Traversay, qui avait été envoyée à la Havane, le rallia en mer avec l'argent demandé. Le 31, l'armée navale jeta l'ancre sur la rade de Lynhaven, à l'entrée de la Chesapeak. Le vaisseau le Glorieux et les frégates ayant reçu l'ordre de chasser un convoi qui parut au large, s'emparèrent de la corvette anglaise de 14° LOYALIST qui l'escortait.

Je ne saurais dire quels motifs décidèrent le lieutenant général de Grasse à choisir la Chesapeak plutôt que la baie de New-York pour théâtre des opérations de l'armée navale qu'il commandait. Voulait-il agir en dehors du concert des généraux Washington et Rochambeau? Préférait-il venir en aide au général Lafayette qui se trouvait à James-Town? Pensait-il enfin que sa coopération serait plus active dans la Virginie que partout ailleurs? Il ne l'a pas fait connaître. Toujours est-il que, comme je viens de le dire, il entra dans la Chesapeak.

La Chesapeak, dans l'État de Virginie, est une vaste baie, parsemée d'îles et de bancs, dans laquelle se jettent un grand nombre de rivières. De suite après avoir doublé le cap Henri, pointe Sud de l'entrée, on trouve le mouillage de Lynhaven; puis, en suivant la côte du Sud, on entre dans la rivière James qui, après un parcours de 45 milles, conduit à James-Town et à Williamsbourg, villes situées visà-vis l'une de l'autre sur les deux rives. La rivière James a pour principaux affluents la Nansemond et l'Elisabeth qui conduisent, la première à Suffolk, l'autre à Norfolk. Si, au

lieu de continuer la route à l'Ouest, après avoir dépassé le cap Henri, on tourne brusquement à droite ou au Nord, on entre dans la baie de la Chesapeak proprement dite. Ce passage est rétréci par trois bancs : le premier entoure le cap Charles, pointe Nord de l'entrée de la baie; un autre, dit Horse Shoe, - fer à cheval s'étend le long de la côte opposée depuis la rivière James jusqu'à la rivière de Back; entre les deux, mais plus rapproché du premier, se trouve le troisième appelé Middle Ground — terre du milieu. — La rade de Lynhaven, qu'on peut considérer comme la rade extérieure, est donc comprise entre les terres du Sud, le Horse Shoe, le Middle Ground et le banc du cap Charles. A l'Ouest, par le travers du Middle Ground, on voit une belle rivière: c'est l'York qui conduit à la ville qui lui a donné son nom. York, située à 15 milles dans les terres, est une position stratégique d'une grande importance; elle était alors occupée par le commandant en chef de l'armée anglaise lord Cornwallis. La ville de Glocester est en regard, de l'autre côté de la rivière. En remontant toujours au Nord, après avoir dépassé bon nombre de rivières, on trouve, à quelques milles du fond de la baie, sur la côte occidentale, la ville d'Annapolis et, à la même hauteur de l'autre côté, la rivière l'Elk. Du cap Henri à la ville de Baltimore située entre ces deux positions, on ne compte pas moins de 200 milles.

Le premier soin du lieutenant général de Grasse fut d'établir le blocus de la rivière York pour couper les communications des Anglais avec la mer. Il plaça aussi quelques bâtiments à l'entrée de la rivière James, et plus haut à Hampton, pour surveiller les mouvements de l'ennemi dans cette partie et protéger le débarquement des troupes des vaisseaux qui devaient être dirigées sur James-Town. Ce mouvement eut lieu les 1er et 2 septembre. Ce renfort permit au général Lafayette de passer de l'autre côté de la rivière et d'aller occuper Williamsbourg qui n'est pas à plus de quinze milles d'York.

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