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dans ce qu'elle présente de plus imposant. Dans quels jardins à l'anglaise verra-t-on jamais un fleuve comme le Rhône, une cascade comme celle de Terny, des grottes semblables à celles d'Antiparos, ou du Derbyshire, et des montagnes aussi majestueuses que celles de la Suisse et de l'Italie ? Qu'est-ce qu'une forêt où l'on ne craint ni de s'enfoncer ni de se perdre? Quelle impression fait un précipice qui, loin d'avoir quatre ou cinq cents pieds de profondeur, n'est qu'une excavation creusée en pente douce, et revêtue d'un beau gazon? Quel effet peuvent produire de petits rochers à hauteur d'appui, au lieu de ces masses effrayantes, qui semblent menacer la tête du voyageur? Enfin, que peut-on éprouver, lorsqu'après avoir quitté une partie de wisk ou de billard, on court s'ensevelir dans un désert, situé à quelques pas d'un brillant salon? Cependant, on va rêver, on va méditer là, et tant pis; on n'y trouve que des pensées fausses, des sensations forcées, et des sentimens aussi factices que le sont tous les objets dont on est environné.

Il fut un moment, dans le siècle dernier, où l'art de la peinture parut toucher à sa décadence; on en trouva la raison dans le goût des peintres pour les spectacles. C'est là qu'ils alloient étudier le jeu que les passions produisent sur la

physionomie; et ne copiant qu'une imitation, leurs tableaux manquoient de vérité, leurs per sonnages n'avoient qu'une dignité théâtrale qu'une expression emphatique et fausse; leur coloris même n'étoit plus celui de la nature, la carnation de leurs figures ne rappeloit qu'un blanc et qu'un rouge artificiels : tels furent surr tout les défauts de deux peintres nés avec beau coup de talent, Carle Vanlo et Boucher.

Ne seroit-il pas fâcheux aussi pour la littérature, que les poètes et les écrivains allassent chercher dans les jardins de l'Angleterre, ces inspirations heureuses qu'on ne trouvera jamais qu'au sein de la nature?

Ce fut Addisson qui, dans le Spectateur, conseilla à ses compatriotes l'imitation de la na ture dans les jardins. Les Chinois en avoient déjà dans ce genre. Les premiers jardins de cette espèce existent encore en Angleterre (¡ceux d'Hagley et de Leacawes); ils sont mal des, sirés et très-médiocres. Ceux de Stow faits depnis, mais vers ce temps, sont imposans par lear magnificence, mais beaucoup trop surclargés de fabriques. Enfin les Anglais ont porté c genre à son dernier degré de perfection. Nous n'avons point de jardins à l'anglaise, que l'on puisse comparer à ceux de Bleinheim, et eux superbes possessions de lord Scaredale, de Kk

lord Howard, du chevalier Hoare, près de Bath, du duc de Portland, de Waller, et de tant d'autres.

Nulle fabrique, nulle invention ne pourra valoir dans ces jardins, une pelouse immense, entourée de touffes d'arbres, groupés de manière à laisser voir dans le lointain de beaux points de vue. Ce genre demande surtout de la sagesse et de la simplicité: aussi n'inspire-t-il naturellement, quand il est parfaitement traité, qu'un sentiment mélancolique; les grandes scènes de la nature n'y sont jamais représentées que d'une manière mesquine, et souvent ridicule. On pouvoit étonner, dans les anciens jardins français, par des prestiges de l'art; on n'étonnera jamais dans les jardins à l'anglaise; il est même difficile d'y offrir des sites rians. Rien de plus agréable qu'une chaumière; mais quand elle contient un ménage et des enfans, et qu'elle est environnée de champs fertiles; alors on se plaît & contempler les véritables sources du bonheur sur la terre, le travail et l'espérance. La campagne n'est riante que lorsqu'elle est animée par des cultures variées, qui promettent l'abondance, par un fleuve navigable, par des coteaux chargés de vignes, et surtout par un mouvement continuel.

Le luxe qui dédaigne tout ce qui est utile,

a banni de ces jardins les arbres fruitiers; cependant la beauté des fleurs de l'amandier, du pommier, etc. vaudroit bien celle de tant d'arbres étrangers et stériles, et les fruits qui succèdent aux fleurs, seroient encore un ornement.

Pour nous, mes enfans, que le malheur a dû rendre sages, nous ne regretterons pas de ne pou voir nous livrer au goût ruineux des jardins à l'anglaise : nous ferons des jardins sans prétentions, mais agréables pour la promenade, et dans toutes les saisons. Un grand parterre vis-à-vis le château, nous offrira une multitude de fleurs; des deux côtés, deux belles allées parallèles nous procureront avec le temps la possibilité de sortir de la maison sans être brûlés du soleil; ensuite, plus loin du château, nous abandonnerons la symétrie; nous planterons des arbres de toute espèce, fruitiers, étrangers, etc.; nous réserverons une partie pour les arbres verts, afin de jouir en hiver de la beauté si précieuse alors d'un feuillage verdoyant. Malgré le mépris profond où sont tombés les hautes charmilles, j'en formerai, à une exposition convenable, une longue avenue bien étroite, qui, durant l'automne, nous préservera de la violence du vent,

nous procurera l'avantage de pouvoir nous promener pendant le temps des équinoxes. Enfin je placerai des bancs de toute espèce, et bien.

516 NOUVELLE MAISON RUSTIQUE. commodes, dans toutes les parties de mon jardin, quelques-uns même seront couverts comme ceux du parc de Saint-James, à Londres. Outre ces abris contre la pluie, je poserai encore dans cet enclos, et dans la même vue, plusieurs petits pavillons, dans lesquels on pourra s'arrêter, lire et s'occuper, si l'on étoit surpris par un orage (1).

(1) Je ne parlerai point, dans cet ouvrage, d'un jardin de plantes usuelles, parce que j'ai fait sur ce sujet un ouvrage particulier, avec des planches, et qui paroîtra in

cessamment.

FIN DU SECOND VOLUME.

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