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serment. Le peuple outragé, suivant ces bas-officiers, dont la municipalité, craignant quelques mouvemens, a fait publier la déclaration. Alors M. d'Ambers a paru à la tête du corps des officiers de son régiment; il venait à la municipalité : le public ignorait les motifs de cette démarche. M. d'Ambers, craignant pour lui-même, a demandé à être gardé dans la maison commune: la déclaration en fait foi ; il y est encore détenu. La municipalité demande : 1o devant quel tribunal cette affaire doit être portée; 2o à être aidée dans les démarches qu'elle a faites pour obtenir le départ des troupes qui logent chez les citoyens et sur les places. Les citoyens ainsi entourés sont sans crainte; leurs murs renferment vingt-quatre mille hommes de gardes nationales; six mille hommes des villes voisines sont confédérées avec l'armée de Marseille. Voilà 50,000 bons patriotes qui paieront de leur sang l'affermissement de la constitution : je le jure ici en leur nom. Le peuple de Marseille est bon, il est doux, mais il est brûlant. Depuis long-temps les troupes l'inquiètent et l'obsèdent : il est nécessaire de prendre promptement un parti sur les demandes de la municipalité.

M. le président lit une lettre arrivée par le même courrier, et qui fait présumer que M. d'Ambers, dans sa démarche à la maison commune, avait pour objet de réparer ses torts.

Plusieurs membres demandent le renvoi de cette affaire au comité des rapports, pour qu'il en soit rendu compte à la séance de ce soir. - D'autres pensent qu'il faut différer ce rapport, afin d'entendre toutes les parties.

M. de Mirabeau l'aîné. Dans les pièces qui vous sont envoyées, il y a, non-seulement les procès verbaux munis de la signature de tous les intéressés, et notamment celle de M. d'Ambers, mais encore des lettres de M. Mireau, commandant de Marseille, lequel a si bien jugé que la conduite de M. d'Ambers était repréhensible, qu'il lui a ordonné les arrêts. La demande de la ville de Marseille est tellement instante, qu'il ne faut pas différer un mo-.

ment.

L'assemblée renvoie cette affaire au comité des rapports, pour qu'il en soit rendu compte ce soir.

M. Lanjuinais. Depuis quatre mois M. Pétion de Villeneuve a demandé la parole pour présenter un plan de finance, qui serait de la plus grande utilité s'il était mis à exécution. Je ne crois pas qu'on puisse refuser d'entendre aujourd'hui M. Pétion de Villeneuve.

Cette demande est accueillie par l'assemblée.

M. Pétion de Villeneuve. Les campagnes sont arides, les propriétaires sont ruinés, l'agriculture languit; votre commerce a péri. (Il s'élève quelques murmures dans le côté gauche de la salle.) Je me suis occupé sans relâche à chercher des remèdes pour d'aussi grands maux. On vous a déjà présenté différens plans de finance; je ne les examinerai pas ; je n'en ferai ni l'apologie ni la critique; mais l'un de ces plans fùt-il accepté, celui que je propose pourrait l'ètre aussi; et, n'en doutez pas, il produirait les plus heureux effets. Je fais ici l'éloge de ce plan avec d'autant plus d'assurance, que je ne suis que l'organe de M. Ferrières, son auteur, qui a bien voulu me le confier : puissiez-vous juger cet ouvrage aussi favorablement que moi!

Introduire dans le royaume un mode de négociation qui fasse baisser l'intérêt de l'argent, qui régénère le commerce en ramenant la confiance, qui éteigne les foyers de l'agiotage: tel est le but que s'est proposé M. Ferrières. Je ne donnerai pas de longs détails sur la marche de ce plan; il me suffira de vous en offrir l'analyse, ou plutôt un projet de réglement, tiré des principes du plan. J'ose croire que le jour que vous l'aurez adopté, sera le plus beau jour de la France. Une caisse territoriale serait établie dans chaque département: ces caisses seraient régies par des administrateurs qui rendraient compte tous les mois de leur gestion; les deniers provenant des impôts seraient versés dans les mêmes caisses. Il y aurait à Paris une caisse générale, dans laquelle seraient reversées toutes les caisses de départemens. Tous les corps et particuliers pourraient emprunter à ces caisses, en hypothéquant leurs propriétés : ces propriétés seraient évaluées

par les administrateurs territoriaux et à leurs frais. Les créanciers des hypothéquans seraient tenus de faire leurs déclarations aux bureaux qui leur seraient indiqués dans chaque département: il sera libre aux propriétaires de remettre les obligations qu'ils auront contractées. Si le propriétaire conserve le contrat qu'il aura reçu en échange de sa propriété, il n'y mettra aucun endossement; s'il le négocie, il l'endossera comme une lettre de change. Le contrat ainsi endossé pourra circuler ainsi dans le royaume comme les autres effets commerçables; l'intérêt sera fixé à 4 pour cent, et le produit de cet intérêt sera employé à l'acquittement des frais des différens établissemens. Ces effets porteront un signe qui ne sera connu que de l'emprunteur et des administrateurs. Il est difficile de suivre ce plan dans tous ses détails; nous aurons occasion de le donner d'une manière plus étendue, lorsqu'il aura été soumis à la discussion de l'assemblée. M. Lanjuinais. Je demande que ce plan soit imprimé et renvoyé au comité des impositions.

M. Dupont. Ce projet n'est pas neuf, il est connu de tout le monde, c'est celui de M. de Ferrières, de M. l'abbé d'Espagnac, de M. Reignier; en un mot, c'est la banque d'Ecosse. Je considère ce plan comme dangereux dans son organisation et dans ses effets; j'ajoute qu'il a un très-grand inconvénient, celui d'être inexécutable. J'ai dit que ce plan était dangereux, parce que si tous les propriétaires ont la possibilité d'emprunter, ils empranteront presque tous; et c'est une règle générale, que les prêteurs s'enrichissent quand les emprunteurs se ruinent. J'ajoute que ce ne serait pas remplir le vœu des contribuables, que de verser leurs contributions dans les caisses des prêteurs territoriaux; j'ajoute aussi que cette caisse n'aura jamais la possibilité de remplir tous ses engagemens. Je conclus à ce que le projet soit renvoyé à l'examen de la dixième législature.

M. Roederer. Je ne pense pas avec M. Dupont, que le plan qui vous est présenté doive être renvoyé à la dixième législature. Je conviens cependant avec le préopinant, que ce plan présente peut-être, dans le mode d'exécution, tous les inconvéniens qu'il

vous a fait remarquer; mais j'observe aussi qu'il présente, d'un autre côté, des avantages bien grands. Je le crois digne d'une séricuse discussion, et j'en demande le renvoi, non au comité des impositions, mais au comité des finances.

M. Lanjuinais. Vous ne voudrez pas condamner, Messieurs, d'après l'avis d'un seul homme, le plan de M. Pétion de Villeneuve. Il est bien connu que ce plan a deux sortes d'ennemis, les économistes et les marchands d'argent. Moi, qui ne suis ni l'un ni l'autre, j'ai cru voir, dans l'exécution de ce projet, des avantages incalculables ; je demande donc qu'il soit imprimé, renvoyé au comité des finances, et discuté ensuite dans l'assemblée générale.

M. Fréteau appuie l'avis de M. Lanjuinais, et conclut de la même manière que lui.

M. le Couteulx de Canteleu. Je connais ce plan depuis longtemps; je l'ai médité avec réflexion, et j'avoue que j'ai été séduit des avantages qu'il présente. Mais j'avoue aussi qu'il m'a paru toujours défectueux, relativement aux hypothèques. Je demande donc qu'il soit nommé une commission chargée de s'occuper de la partie des hypothèques. Le travail de cette commission devra s'accorder avec le reste du plan.

L'assemblée décrète : 1o que le comité des finances, et celui d'agriculture et de commerce, nommeront chacun six membres pour examiner le plan présenté par M. Pétion de Villeneuve; 2o que l'auteur du plan sera admis dans le comité, pour répondre aux différentes questions qui pourraient lui être faites; 3° que ce plan sera imprimé et distribué.]

ORGANISATION JUDICIAIRE.

Dans toute œuvre d'une assemblée législative qui, ainsi que celle dont nous racontons l'histoire, commence une révolution, ce qui est important à conserver, en-dehors des faits directement révolutionnaires, et dans les actes qui ont seulement pour but la réorganisation, ce sont surtout les projets et leurs critiques. C'est la pensée qui nous a guidés dans ce que nous avons recueilli sur les finances. C'est elle qui va nous conduire encore dans l'arran5

T. V.

gement des matériaux que nous avons à rassembler sur l'organi

sation de la justice.

Observations présentées au comité de constitution, à l'occasion du

rapport de M. Bergasse, sur les tribunaux (1); par M. de Delley d'Agier, député du Dauphiné.

Briser l'esprit des provinces et des grands corps;

Assurer aux peuples une surveillance plus exacte;

Les rapprocher de leurs administrateurs et de leurs juges; Oter au riche le pouvoir d'opprimer le pauvre par des appels multipliés et des déplacemens coûteux, en conservant à ce riche la ressource des appels et de la révision dans les procès importans;

Enfin, éviter les imminens dangers d'un tribunal suprême permanent, en obtenant un moyen pour juger la comptabilité des caisses publiques, la forfaiture et les délits des tribunaux, la responsabilité des ministres et les crimes de lèse-nation : tels sont les principes dictés par la plus saine politique et la plus exacte justice.

Six conséquences nécessaires dérivent de ces principes.

PREMIÈRE CONSÉQUENCE.

Faire terminer dans les cantons, dans les foyers même du pauvre, les procès du pauvre; ceux dont le capital est au-dessous de 50 liv., ou de la valeur de deus setiers de blé, mesure de Paris (2) Ainsi, dans chaque canton il sera élu un juge, un secrétairegreffier et quatre notables assesseurs.

La plus importante fonction de ce tribunal rural et civique sera sans doute d'employer, vis-à-vis des parties, tous les moyens possibles de conciliation; mais lorsqu'ils seront inutiles, il jugera en dernier ressort et sans appel tous les procès au-dessous de 50 livres; en première instance, tous ceux au-dessus jusqu'à 300 liv.

(1) Voyez ce rapport, !. III, page 375.

(2) La valeur numérique de l'argent variant à chaque siècle, les mesures des denrées et leurs prix moyens sont les setiles bases fixes : c'est l'échelle qu'il faut appliquer à toutes les sommes désignées dans ce précis.

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