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l'impôt que pour accorder aux contribuables un premier bienfait ils sont soulagés du quart, du tiers, de la moitié même de leurs impositions, par votre décret relatif à la contribution des ci-devant privilégiés. Détruire votre ouvrage, voilà le but des ennemis de la liberté ; vous calomnier, voilà leurs moyens. Voyez des libelles infâmes se répandre jusqu'aux portes de cette assemblée: ce sont des hommages à la liberté de la presse; ce sont des enfans ingrats et captifs qui, délivrés de leurs fers, s'élèvent contre leurs libérateurs; on calomnie le ministre des finances, dans l'espoir d'occasionner le désordre dans les finances; on calomnie le peuple armé, afin qu'il ne protège plus la paix publique; on calomnie votre roi, pour vous faire un crime de ses vertus. On a écrit dans les provinces que la banqueroute est inévitable. La banqueroute! mot horrible, qui ne peut être proféré que par les ennemis de la nation, du roi et de la liberté : vaines terreurs, qu'ils espèrent de réaliser à force de les répandre : elle est impossible; elle serait inévitable, si vous vous sépariez. La banqueroute est impossible, vous avez un revenu foncier immense; les impositions des privilégiés, la réforme des abus, l'économie dans les dépenses, dans toutes les parties de l'administration, et le patriotisme, qui ne se lasse point, parce qu'il est soutenu par les plus justes espérances. Vous avez devant vous l'avenir, les siècles, la liberté, l'industrie, et tout ce qui naîtra de votre constitution. Une puissance voisine a plus de dettes que vous et bien moins de ressources: elle est florissante, parce que tous les citoyens sont amis de l'ordre, de la justice et de la liberté ; et nous croirions l'État perdu, à cause que l'or et l'argent dont la France abonde sont un moment resserrés. La banqueroute est impossible; elle serait funeste à ces capitalistes mêmes, qui, sous le règne des abus, se sont enrichis des dépouilles du peuple; elle serait funeste à cet égoïste qui resserre son or. La banqueroute est impossible, parce que vous êtes ici, et que pour la faire, il n'est qu'un seul moyen: c'est de vous séparer. Les impôts, dit-on, ne se perçoivent pas : ils se perçoivent, j'en atteste votre correspondance (presque toute l'assemblée affirme cette

assertion. Beaucoup de membres se lèvent, et disent que dans leurs provinces, la recette n'est pas diminuée d'un denier). La perception de quelques impôts indirects est troublée; cela est vrai : mais ces impôts sont odieux; mais le peuple en demande le remplacement; mais il offre avec empressement de les payer; mais il les paiera. Peuple vraiment digne de la liberté, on vous opprimait quand vous baissiez la tête; on vous calomnie quand vous osez la relever. Mais n'y a-t-il donc aucun mal? Il y en a un très-certain; il faut y remédier : c'est la rareté des espèces. La cause de cette rareté n'est autre chose que la trop grande quantité de papiers. Vous connaissez donc cette cause; vous connaissez donc le remède : il faut donner la prépondérance aux espèces; il faut présenter un avantage réel à les répandre : alors elles reparaîtront, n'en doutez pas. Je vous engage, pour l'intérêt commun, du roi, du peuple, des citoyens de la capitale et des provinces, à prendre en considération le mémoire des ministres et l'adresse de la commune de Paris.

Je demande qu'il soit décrété que, pour rendre au travail sur les finances le jour qui lui a été enlevé la semaine dernière, on s'occupe de cet objet jeudi, vendredi et samedi, et qu'il soit ordonné au comité de rendre compte jeudi prochain du mémoire du premier ministre des finances et de l'adresse de la commune de Paris.

Une très-grande partie de l'assemblée applaudit à ce discours, et en demande l'impression et l'envoi dans les provinces.

M. de Cazalès. S'il était nécessaire de me justifier contre les allégations au moins incertaines qui ont été faites par le préopinant contre l'intention que je puis avoir eue dans la demande du renouvellement de l'assemblée, je dirais qu'on a interverti mes phrases; qu'on en a altéré le sens, et que j'ai demandé, non la dissolution, mais le renouvellement de l'assemblée. Je persiste à croire que c'est le seul moyen qu'on puisse employer avec confiance pour le salut public; je persiste à croire qu'il est impossible d'établir dans cette assemblée une concorde franche et loyale. Je demande si l'on ne voit pas la résistance

bruyante de la minorité faire dépasser à la majorité les mesures de sagesse qu'elle semble s'être prescrites; je demande si l'on n'a pas entendu applaudir une adresse perfide et travestir en esprit de parti des motions d'intérêt commun; je demande si des représentans des trois classes n'ayant qu'une seule et même mission, confondant tous les intérêts dans l'intérêt commun, ne sont pas plus propres à opérer le bien public. Mes intentions ne peuvent être calomniées, et je conjure chaque membre de descendre dans sa conscience pour me juger. Il résulte du long mémoire du ministre, que les besoins de 1790 sont considérables, et les ressources difficiles et incertaines. Je ne connais qu'un moyen: l'assemblée doit s'armer de courage; elle doit écarter toute dissimulation: on ne guérit pas les maux qu'on se dissimule. Il faut presser le comité des finances, dont l'incertitude continuelle vous inquiète et vous arrête. Je conclus à ce que l'assemblée prenne la détermination ferme de s'occuper des finances, et décrète qu'elle donnera quatre jours par semaine à ce travail, et que d'abord après la délibération sur les colonies, elle mettra à la discussion le mémoire du ministre.

M. de Croy. Il n'existe pas de différence d'intention et de principes, mais d'opinion: cette différence n'est point dangereuse, puisque c'est d'elle seule que peut naître la vérité. J'en trouve une preuve incontestable dans la sagesse de vos décrets.

M. Alexandre de Lameth, Je suis très-persuadé que les finances sont dans un état tel, qu'il faut s'en occuper sans retard. Si c'en était le moment, je dirais que ce n'est point le discrédit, mais la coalition secrète des ennemis de l'État, qui fait cacher le numéraire (M. de Cazalès interrompt l'opinant). Ce que j'ai dit est facile à prouver par un simple raisonnement; la révolution porte sur ceux qui se sont enrichis par les abus ; ils possèdent le numéraire; ils l'enfouissent, dans l'espoir de faire crouler la constitution; mais ils n'y réussiront pas, etc.... Comment croire à la banqueroute, quand les gages que nous allons donner à la nation s'élèvent aux capitaux de la dette? S'il était un moyen de l'occasionner, ce serait d'empêcher la perception des impôts. Pour

percevoir les impôts avec sûreté, il faut rétablir l'ordre; pour rétablir l'ordre il faut achever la constitution. Vous avez encore à organiser l'armée, le pouvoir judiciaire, etc. Serait-il prudent de donner quatre jours aux finances? Je demande que rien ne soit changé dans l'ordre du travail, que la constitution ne soit finie ou très-avancée. S'il faut donner un jour de plus aux finances, que ce soit le dimanche; s'il ne reste pas encore assez de temps à la constitution, travaillons jour et nuit, si notre force physique peut y suffire. Je demande positivement qu'on délibère sur la motion de M. Rabaud de Sainte-Etienne.

M. Rabaud de Saint-Etienne. Il est devenu indispensable que j'ajoute un mot. Je n'ai rien dit ici qu'on puisse me reprocher; j'ai parlé de nos craintes, de nos maux, de nos espérances, de nos devoirs; j'ai parlé des brochures que vous voyez, que vous lisez, que vous méprisez je n'ai eu personne en vue; c'est le bien public qui m'occupe.

L'assemblée décrète que désormais le vendredi, le samedi et le dimanche seront consacrés aux finances, et que, conformément à la motion de M. Rabaud de Saint-Etienne, le comité rendra compte du mémoire de M. Necker et de l'adresse de la commune de Paris.

L'assemblée ordonne ensuite l'impression et l'envoi dans les provinces du discours de M. Rabaud de Saint-Etienne.

Il ne fut point permis à l'assemblée de négliger l'exécution de ce décret : les circonstances étaient pressantes. Dans sa séance du 19, une députation de la commune de Paris, conduite par Bailly, se présenta à la barre. Elle lut un mémoire dont voici les principaux passages :

< L'assemblée nationale a décrété le 5 février, que les maisons religieuses d'un même ordre, seraient, dans chaque ville, réduites à une seule : les municipalités ont été chargées d'indiquer les maisons à conserver d'après cette disposition. Il leur a été en même temps ordonné de recevoir les déclarations des biens possédés par les ecclésiastiques. La municipalité de la ville de Paris

remettra incessamment ce double travail : elle croit devoir présenter dès aujourd'hui un aperçu des opérations qu'elle a déjà faites.

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Les ordres religieux qui ont trois maisons à Paris, sont les Bénédictins de la congrégation de Saint-Benoît, ceux de la congrégation de Saint-Maur, les Dominicains, les Augustins, les Carmes et les Capucins. La maison à conserver dans la congrégation de Saint-Benoît, paraît être le prieuré de Saint-Martin-desChamps; dans celle de Saint-Maur, la maison de Saint-Germaindes-Prés; dans l'ordre des Dominicains, la maison de la rue du Bac; dans celui des Augustins, les Petits-Pères de la place des Victoires; dans celui des Carmes, les Carmes-Déchauts; dans celui des Capucins, les Capucins de la Chaussée d'Antin; si cette maison ne suffisait pas, celle de Meudon pourrait servir de supplément. Les maisons rentées réservées seraient réduites aux lieux claustraux. On conserverait, pour les ordres qui n'ont que deux maisons, les Minimes de Chaillot, les Récollets de Picpus, auxquels on pourrait joindre les Cordeliers, puisqu'ils sont tous Franciscains, et les Feuillans de la rue d'Enfer. Le monastère de l'Assomption deviendrait précieux par la raison de la contiguité avec les Capucins et les Feuillans de la rue Saint-Honoré : il serait possible de transférer les religieuses qui l'habitent dans une des maisons des religieux supprimés. Parmi les ordres qui n'ont qu'une seule maison, on pourrait séculariser les Théatins, et transférer les Chartreux à la campagne : cette translation serait conforme à leur institution.

>Les suppressions dont nous avons conçu l'idée sont les plus importantes que l'on puisse faire dans la capitale; elles forment un ensemble de 27 maisons, pour la plupart très-précieuses par leur position et leur étendue. Vous pourriez, dès à présent, ordonner cette vente, nécessaire au rétablissement de la confiance, du crédit et de la circulation des espèces.

>

› La municipalité croit devoir vous proposer des vues sur les moyens d'opérer cette vente avec avantage et promptitude.-La concurrence des objets peut diminuer celle des acquéreurs : d'un

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