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sens pas les qualités nécessaires : j'accepte cet honneur, parce je ne puis présumer que des considérations qui me soient personnelles aient déterminé à adopter le décret qui m'impose le serment que je vais faire. Je déclare que je renouvelle le serment du 4 février, qu'une seule fois avait suffi à mon cœur ; je jure d'être fidèle à la nation, à la loi, au roi, et d'obéir aux décrets de l'assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi ; je jure de n'avoir pris, de ne prendre jamais part à aucuns actes, protestations ou déclarations contraires aux décrets de l'assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi, ou tendant à affaiblir le respect et la confiance qui leur sont dûs.

M. de Virieu occupe le fauteuil.

M. de Bonnay fait le discours d'usage, et reçoit des applaudis" semens presque unanimes.

M. de Rochebrune. Je n'étais pas à l'assemblée lorsque vous avez décrété que vos officiers entrant en fonctions, seraient soumis à un nouveau serment. Le serment du 4 février devait suffire. Tout serment ultérieur serait inutile, serait contraire à notre Jiberté individuelle, et compromettrait les intérêts de nos commettans. Je supplie M. le président de s'expliquer nettement sur la nature du serment qu'il a entendu prêter ce matin.

M. le président. Je vous prie, Messieurs, de m'accorder un profond silence. Je crois que dans un cas ordinaire, une demande isolée n'exigerait pas de réponse; mais dans cette circonstance l'assemblée ne désapprouvera pas son président de répondre à une interpellation particulière et même de répéter ce qu'il a dit précédemment : car la femme de César doit être sans soupçon. A l'entrée de la séance on a fait une motion que l'assemblée a décrétée. J'ai déclaré qu'il n'était pas à la connaissance de ma conscience que j'eusse fait aucun acte, protestation ou déclaration contre les décrets de l'assemblée acceptés ou sanctionnés par le roi; que je n'avais point ambitionné l'honneur qui m'est aujourd'hui confié, que j'étais prêt à me retirer si l'on pouvait me représenter quelque déclaration qui se trouvàt avoir rapport à la formule du serment; que s'il en existait, je

demandais à en être averti et que l'avertissement même le plus secret aurait l'effet le plus subit. Je me suis renfermé dans la forme du serment; s'il avait eu une autre forme, je n'aurais pu le prêter, et l'assemblée aurait fait de moi ce qu'elle aurait voulu: je ne nierai jamais les actes que j'ai faits; j'ai cru devoir les faire dans mon honneur et dans ma conscience. Si, dans quelques circonstances, il y a eu quelques décrets non acceptés ou non sanctionnés qui m'aient paru contraires à quelques-uns des intérêts que je suis chargé de défendre, j'ai pu signer des déclarations, je ne le nie pas, je ne me rétracte pas. Des décrets non acceptés et non sanctionnés n'entrent pas dans le serment qui m'a été imposé. (II s'élève de grands murmures dans une grande partie de l'assemblée.) Je ne nierai point que moi, ainsi que quelques autres membres, nous ne nous soyons pas gênés pour signer, soit collectivement, soit individuellement, notre avis sur quelques décrets, et la notice des faits qui ont amené ces décrets. Comme il ne doit rester aucun doute sur un objet qui intéresse le respect dù aux lois, à l'honneur et à la conscience d'un honnête homme, je répète que j'ai entendu me renfermer dans le texte du serment; si on prétend donner un autre sens à ce décret, j'aurai un parti à prendre, suivant celui que l'assemblée prendra. (M. l'abbé Maury applaudit à ce discours, ainsi qu'une partie des membres qui occupent le côté droit de la salle.)

M. Alexandre de Lameth. J'avoue que la nouvelle déclaration de M. le président ne laisse pas dans mon esprit la même pensée que la déclaration qu'il avait d'abord faite; il m'était resté la persuasion qu'il n'avait signé aucun acte tendant à affaiblir le respect et la confiance dus aux décrets. Si j'ai bien saisi sa pensée, il semble que sa disculpation porte sur ce que les décrets contre lesquels il peut avoir protesté, n'étaient pas sanctionnés ou acceptés par le roi, lors de sa protestation. Je demande si le défaut de la sanction peut autoriser un membre à se soustraire au vœu de la majorité de l'assemblée. Je crois qu'en effet un décret non sanctionné n'est pas encore une loi du royaume, qu'il n'engage

pas tous les citoyens, mais qu'il engage tous les membres de l'assemblée. Ainsi, dans le cas où M. le président aurait signé un acte ou une déclaration quelconque contre des décrets sanctionnés ou non sanctionnés par le roi, il ne pourrait se sauver par la lettre du décret; il ne peut pas se sauver davantage par l'esprit du décret; en effet, qui de nous n'a pensé que l'assemblée ne voulait pas placer à sa tête quiconque aurait protesté contre les décrets qui sont la loi de l'assemblée, puisqu'ils sont le vœu de la majorité de ses membres. S'il est vrai que M. le président ait signé une protestation, je demande que l'assemblée nationale nomme un autre président.

M. Charles de Lameth. Un membre ne peut présider une assemblée devant laquelle il est en cause. Je pense donc que M. de Virieu ne peut, en ce moment, présider l'assemblée, et que M. de Bonnay doit reprendre le fauteuil.

M. le marquis de Bonnay. Les circonstances sont en ce moment délicates et embarrassantes. Vous avez, ce matin, rendu un décret auquel M. le président s'est conformé; on vient de l'interpeller sur le sens e sur l'étendue du serment qu'il vient de prêter; il s'est renfermé dans la lettre du serment. Je prie l'assemblée de me permettre de lui observer qu'un serment a quel que chose de si saint, qu'il n'est pas permis à la pensée d'aller au-delà des expressions qui le composent.... L'assemblée discute ici sur un fait qu'elle ne connaît pas; j'ignore si cet acte existe; mais la notoriété publique semblerait le faire croire; elle annonce même qu'il est contraire à un de vos décrets; mais j'observe que s'il est question de la motion de M. de la Rochefoucault, laquelle, en dernière analyse, consiste à dire, il n'y a pas lieu à délibérer; passons à l'ordre du jour, il n'y a pas ici une opposition matérielle à un décret, On a dit que les décrets non sanctionnés sont obligatoires pour les membres de l'assemblée; que le président in realû doit quitter sa place, et que je dois reprendre le fauteuil. La majorité peut seule me faire la loi. Je ne crois pas qu'il y ait lieu à ce que le président soit privé de ses fonctions, même momentanément, et je pense que s'étant ren

fermé dans les termes du serment, on ne doit pas suivre l'interpellation faite, et délibérer à cet égard,

M. Bouche. Le décret que vous avez rendu a deux parties: la première concerne les décrets sanctionnés et acceptés par le roi c'est sans doute sur celíe-là que M. le président a appliqué son serment; la seconde, les décrets rendus par l'assemblée; c'est sans doute sur celle-là que M. le président a appliqué sa restriction mentale. Cependant il dit s'être renfermé dans les termes du décret; il a donc juré n'avoir pris part à aucun acte contraire aux décrets sanctionnés et non sanctionnés. Je prie M. le président de déclarer positivement si son serment porte sur les deux parties du décret, ou d'indiquer celle sur laquelle il ne porte pas. J'ajoute, d'ailleurs, que la formule comprend tout acte tendant à affaiblir le respect et la confiance dus aux décrets de l'assemblée.

Plusieurs membres demandent que M. de Virieu quitte le fauteuil pendant la délibération dont il est l'objet.

M. le président. J'occupe cette place par les ordres de l'assemblée; je n'y tiens point, mais je ne suis pas coupable, je ne la quitterai que sur un nouvel ordre de l'assemblée; je vais la consulter.

M. Coupé. Vous ne le pouvez vous-même, puisque vous jugeriez de la majorité qui doit prononcer sur votre sort.

M. le président. Je vais donc quitter ma place pendant le temps de cette discussion.

M. d'Espremenil. Vous n'êtes pas à vous.

M. le président. Ce n'est pas le premier exemple d'un président qui a prononcé un décret contre lui-même. M, Mounier; à Versailles, a consulté lui-même l'assemblée, quand on l'accusait d'avoir prononcé un décret d'une inanière inexacte. Je vais donc mettre aux voix la question dont il s'agit.

M. Goupil de Préfeln. La délibération concerne directement et positivement M. le président, il ne peut dès-lors en être le chef et le modérateur.

M. le marquis de Bonnay. J'ai demandé la question préalable,

parce qu'il n'y a pas même lieu à interpellation, d'après la manière dont M. le président s'est justifié. Cette demande doit avoir la priorité, et je la réclame.

M. le président se dispose à la mettre aux voix. — Après une longue opposition de la part d'un grand nombre de membres, il reprend la parole, et dit d'une voix fatiguée et entrecoupée : je ne suis pas en état de soutenir une telle discussion, et si elle doit durer encore, je prierai M. de Bonnay de prendre le fauteuil.

M. de Bonnay faisant les fonctions de président, se prépare à poser la question préalable.

M. Charles de Lameth. J'observe que la question préalable est très-adroitement demandée par M. de Bonnay....

M. le marquis de Bonnay. Je ne regarde pas l'inculpation d'adresse comme une personnalité, et je ne vous rappelle point à l'ordre, mais elle est désobligeante, et je vous prie de la retirer.

M. Charles de Lameth. La question préalable, très ingénieusement proposée par M. de Bonnay, n'est point admissible; la discussion est commencée; elle n'est point fermée; il est impossible d'invoquer, soit l'ignorance, soit la parfaite connaissance de la cause. Mais de quoi s'agit-il? D'une déclaration, d'une protestation, ou d'un acte quelconque qui a inquiété le public et un grand nombre des membres de l'assemblée. Je ne sais pas quelle a été l'intention de M. Bouche, en proposant la motion que vous avez décrétée; mais nul ne peut douter qu'il n'ait eu pour objet de faire dire à M. le président s'il avait signé une protestation, ou tout autre acte, contre les décrets de l'assemblée. Vous avez dû voir, avec inquiétude, qu'il fût possible d'accuser votre président d'avoir manqué au respect qu'il doit à vos décrets; votre président qui ne veut pas même être soupçonné; vous avez demandé un serment solennel, qui n'est autre chose que le serment civique avec un peu d'extension; vous avez voulu que votre président s'engageât à ne rien écrire, rien souscrire, rien avouer qui tendit à mettre en question, soit le pouvoir, soit les inten

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