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u'en avoir aucune; et, pendant ce temps, d'employer une seule personne, mais la bien choisir, pour conférer avec M. de B.... (M. de Bouille) sur les moyens et les mesures les plus convenables pour suivre la route indiquée à l'évêque de Châlons, et exécuter ensuite ce qui a été dit ci-dessus, lors du départ du maréchal de Broglic.

Les quatre ou cinq mois sont filés; les personnes pour qui le plan était évidemment mis par écrit, se sont montrées plus populaires que jamais pendant ces quatre à cinq mois; elles ont paru avoir beaucoup de confiance en leurs gens d'affaires: reste à savoir si elles en ont eu, et si une personne bien choisie n'a pas conféré avec M. de B.... sur les moyens de faire sortir le roi de Ja criminelle ville de Paris.

› Ce qui n'est pas équivoque, c'est que le Châtelet vient de rendre la liberté au sicur Augeard précisément après les quatre ou cinq mois filés, afin que s'il y a lieu à l'exécution du complot, il ne manque pas même le concours de celui qui l'avait créé.

› Que l'on veuille bien comparer maintenant le projet pour lequel le marquis de Favras a été pendu, avec celui du sieur Augeard; que l'on pèse la nature des preuves acquises contre ces deux accusés, et l'on frémira sur la différence inconcevable qui se trouve dans les deux jugemens qui les concernent....

› Il y a une parité effrayante entre les deux accusations. Passons aux preuves; il y en a de deux sortes: les preuves vocales et les littérales. On n'a trouvé, contre le marquis de Favras, que des preuves vocales fondées sur quatre dépositions de témoins.... Il y a contre le sieur Augeard preuve littérale, savoir: un mémoire dont il s'avoue l'auteur.... et ce mémoire est appuyé par la déposition du sieur Séguin, son dénonciateur....

› Mais le marquis de Favras était un faiseur d'affaires, un faiseur de plans, parmi lesquels il y en avait un pourtant qui avait pour objet la régénération des finances de l'État, et pour l'exécution duquel il est prouvé qu'il avait fait des démarches auprès de l'assemblée nationale. Il n'était, quoique aristocrate, qu'un pauvre hère, assez misérable pour s'être fait mouchard de la cour moyennant cent louis: et il est pendu,

› M. Augeard est fermier-général; il est secrétaire des commandemens de la reine, et il obtient son élargissement: ainsi,

>> Selon que vous serez puissant ou misérable,

Les jugemens de cour vous rendront blanc qu noir.>>

› Récapitulons ce qu'a fait le Châtelet comme tribunal de la nation: il a condamné à mort, en vingt-quatre heures, le nommé Adrien, pour avoir colporté des billets qui tendaient à susciter des attroupemens; et Adrien ne savait pas lire, et la loi martiale était portée. D'après cette loi, les auteurs des attroupemens non armés ne peuvent être condamnés qu'à une prison de trois ans.

› Il a condamné au bannissement le sieur Noble-Épine, garde national qui, après que le boulanger François eut été pendu, sépára la tête du tronc. Le jugement porte, ce qu'il aurait pu éviter en fuyant et en abandonnant son sabre. Il résulte du jugement même qu'il avait été forcé à cette action par les assassins du sieur François....

› Le Châtelet a condamné à un bannissement perpétuel l'infortuné Delcrost, pour avoir écouté des propositions qui lui étaient faites d'enrôlemens pour les pays étrangers, et la procé dure établissait son innocence: elle prouvait qu'il n'avait jamais eu ni la volonté, ni l'intention, ni le moyen de faire des enrôlemens pour l'Espagne.

Le sieur Rutledge) (1) est arrêté comme ayant porté ob

(1) Nous avons sous les yeux les pièces que fit imprimer Rutledge, c'est-à-dire ses interrogatoires et sa correspondance avec Necker. Il entra en relation avec le ministre en lui dénonçant les accaparemens des S. S. Leleu. Il en fut bien reçu; en conséquence, il lui présenta un mémoire sur les subsistances. Necker le chargea d'engager les boulangers à s'approvisionner eux-mêmes et à leur promettre un secours. Rutledge le fit, mais le secours ne vint pas. Au reste il adressa encore d'autres dénonciations entre autres contre l'intendant de Paris, contre Le Noir, etc. Plusieurs fois Necker invita Rutledge même en employant le nom du roi à ne rien publier sur les subsistances. Rutledge finit par soupçonn er Necker lui-même et le menaça. C'est à la suite de ces menaces, le 1a no. vembre, qu'il fut arrêté comme ayant cherché à former une coalition des boulangers contre le comité des subsistances, etc.

Lettre de Necker, 10 avril 1789. — J'ai reçu, Monsieur, la lettre que vous m'avez adressée, avec le mémoire pour les boulangers. Je le lirai

stacle aux approvisionnemens de Paris. Il se justifie; il crie hautement: Il faut la tête de M. Necker ou la mienne. Il inculpe le ministre adoré de manoeuvres criminelles contre cet approvisionnement. Il demande à grands cris de lui être confronté, ainsi qu'à madame Necker; et le Châtelet le retient d'abord, sans décret, assez long-temps pour lasser son courage, et il ne l'élargit enfin que sous un décret d'ajournement personnel afin de l'effrayer.

Le sieur Marat..., etc.

› Et Bezenval est élargi! Favras, dont on n'ose publier lá procédure, est mis à mort. Bezenval et ses complices sont déclarés innocens. Augeard, dont le crime est le même que celui de Favras, et contre lequel les preuves sont évidentes, obtient sa liberté au moment fixé par lui-même pour l'exécution de son complot. Où les faits parlent il ne faut point de réflexions.

> Quel est celui qui négocie entre la cour et le Châtelet pour faire punir les faibles quoique innocens, et absoudre les puissans quoique coupables? si vous ne le voyez pas, citoyens, il est inutile de le nommer.» (Révolutions de Paris, no 35.) C'est M. la Fayette que Loustalot désigne ici.

Écoutons maintenant parler Desmoulins, il va nous révéler un nouveau scandale: le Châtelet venait de décréter Danton.

>Quelle propriété, quelle liberté reste-t-il à celui qui n'a pas là liberté individuelle, et qui ne peut compter sur la propriété de sa personne! disait M. de la Chalottais. Le procureur-général dé la Lanterne pourrait commenter ce texte, et donner comme un

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avec attention. Mais, en attendant, je vous demande avec instance, en mon nom et particulièrement de la part du roi, de ne lui donner aucune espèce de publicité, ni à aucun autre ouvrage sur les subsistances. Lettre de Rutledge à madame Necker. 7 octobre 1789. Seul et sans défense je ne crois pas devoir me rendre dans l'hôtel habité par un ministre dont ma conscience me rend le dénonciateur.... J'ai trop d'honneur pour vous cacher mes démarches. Je vous offre, madame, de vous en faire franchement part chez M. de Lessart; je m'y rendrai sans défiance, parce que je l'honore et le respecte. Je suis même assez attaché à M. Necker pour lui présenter l'alternative de la dénonciation à faire contre lui, ou de celle à intenter contre les de Montarau, Leleu, etc. Ces derniers m'ont fait l'outrage de m'offrir de l'argent..........., etc.»>

autre un beau réquisitoire à l'occasion du décret de prise de corps de M. Danton; mais avant de requérir l'exécution de la loi martiale du sage Minos, qui permettait l'insurrection et la Lanterne, lorsque les magistrats du Châtelet s'étaient rendus prévaricateurs et criminels de lèse-nation, il convient d'abord d'essayer les voies de douceur et de faire une première proclamation....

› Le Châtelet n'a pas craint de décréter M. Danton, cet illustre président du district des Cordeliers; il vient de le décréter de prise de corps pour une opinion avancée dans l'assemblée de son district. Le Châtelet croit-il donc que lorsqu'il méprise ainsi les saints décrets de l'assemblée nationale, nous respecterons ses décrets de prise de corps?.... Obéir au Châtelet, n'est-ce pas désobéir à l'assemblée nationale, je ne sais plus quelle loi romaine, fort sage à mon avis, autorisait les citoyens, dans des cas semblables, à ne tenir compte du jugement du Châtelet et à appeler au peuple. >

En effet, le district des Cordeliers prit le 18 mars, un arrêté pour protéger Danton. Le fait dont on l'accusait était celui de toute l'assemblée. On lui imputait d'avoir dit, le jour où M. de la Fayette envoya une armée pour arrêter Marat, qu'il fallait repousser la force par la force.

› Sur la dénonciation faite à l'assemblée générale, dit cet arrêté, que le Châtelet de Paris vient de rendre des décrets contre plusieurs membres du district, et notamment, un décret de prise de corps contre M. Danton, son ancien président et son mandataire à l'hôtel-de-ville, sur l'imputation à eux faite, par deux huissiers, d'avoir tenu des discours prétendus incendiaires dans une assemblée générale, imputation démentie par la signature de plus de trois cents membres qui composaientalors cette assemblée, lesquelles signatures sont consignées dans un acte qui a été signifié aux officiers du Châtelet dans la personne de leur greffier.

› L'assemblée considérant que la liberté la plus entière doit régner dans les assemblées légales, et que chacun doit avoir la faculté d'y manifester son vou, et d'y exprimer son opinion sans

avoir à redouter d'autre autorité que celle de l'assemblée dont il est membre....

› Considérant que les citoyens ne seraient bientôt plus en sûreté dans le sein même de leurs assemblées, s'il se trouvait des ennemis du bien public assez audacieux pour empoisonner, par une interprétation maligne, les discours les plus innocens, s'il se trouvait des juges assez mal intentionnés pour sévir contre eux sous ce dangereux prétexte, bientôt le despotisme le plus tyrannique prendrait la place de la liberté, et l'on verrait sacrifier les citoyens qui auraient manifesté leurs opinions avec force et énergie....

› L'assemblée générale a arrêté qu'il serait présenté une adresse à l'assemblée nationale, pour etc...., qu'il serait nommé des commissaires, à l'effet de se rendre dans les cinquante-neuf autres districts pour y dénoncer l'attentat... En effet, plusieurs districts adhérèrent à cet arrêté.

>

Quelle est cette prétendue liberté, crie Desmoulins, cette liberté civile et politique dont on nous berce? Si j'en use dans la rue, on déploie le drapeau rouge; si j'en use dans mon district, on lance un décret de prise de corps. Les districts n'ont-ils donc pas été ouverts pour que les citoyens qui ont à faire des pétitions bonnes ou mauvaises, les y proposent sans craindre la loi martiale? Et que nous criait le Châtelet, que nous criait la commune, dans le temps des motions du Palais-Royal, sinon? vous avez soixante districts où vous pouvez pérorer et tonner tout à votre aise contre les abus. Mais, aujourd'hui, où donc voulez-vous que je me retire! où pourrai-je publier ma pensée, si ce n'est dans mon district? Le premier des droits de l'homme et du citoyen est de pouvoir dire ce qu'il pense. Mais la publicité des opinions sur la place publique pouvait être dangereuse : qu'a fait la loi pour concilier les droits de l'homme avec la tranquillité publique? Elle nous a dit à tous : retirez-vous dans vos districts, et là, dites tout ce qu'il vous plaira; la peine du préopinant qui aura dit une sottise, sera d'être rappelé à l'ordre, et non pas d'être fusillé ou décrété. ›

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