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du courtisan 1. La reine surprit un jour la duchesse écrivant au président, qui venait de publier son Abrégé chronologique de l'Histoire de France; elle prit la plume de madame de Luynes, et écrivit au bas de la lettre cette apostille : « Je pense » que M. Hénault, qui parle très-peu pour dire beaucoup, ne doit guère aimer le langage des » femmes, qui parlent beaucoup pour dire très» peu. » Et au lieu de signer, elle ajouta : Devinez qui ? Le président répondit à cette apostille anonyme par ces vers ingénieux :

Ces mots, tracés par une main divine,

Ne peuvent me causer que trouble et qu'embarras.
C'est trop oser si mon cœur les devine,

C'est être ingrat, s'il ne devine pas.

Un soir, la reine étant passée dans le cabinet du duc de Luynes, prit successivement quelques livres pour en lire les titres; une traduction de l'Art de

Le docteur Quesnay riait de ce changement de décoration et s'égayait aux dépens des dévotes. « Cependant, lui disais-je, elles » sont conséquentes et peuvent être de bonne foi. -Ouì, di» sait-il, mais il ne faut pas qu'elles demandent rien. » (Journal de madame du Hausset.)

(Note de l'édit.)

Le président Hénault, qui ne voulait pas être fameux par ses soupers, mais qui l'est, à bien plus juste titre, par sa Chronologie, était surintendant de la maison de la reine. Il faisait le charme de sa société intime, comme il avait été dans sa jeunesse l'ornement de la cour de Sceaux, chez la duchesse du Maine.

plaire d'Ovide étant tombée sous sa main, elle replaça le livre avec vivacité, en s'écriant : « Ah, fi !

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Quoi! madame, lui dit le président, c'est >> Votre Majesté qui traite ainsi l'art de plaire?— » Non, monsieur Hénault, reprit la reine; j'esti» merais l'art de plaire, j'éloigne de moi l'art de >> séduire. >>

Madame de Civrac, fille du duc d'Aumont, dame d'honneur de Mesdames, était de cette société intime de la reine. Ses vertus et son amabilité l'y faisaient estimer autant qu'elle y était chérie; une mort prématurée l'enleva à sa famille et à ses amis. Le président Hénault lui rendait de respectueux hommages, ou plutôt il aimait à être l'organe de tous ceux dont une société aussi distinguée s'empressait d'environner ses qualités, ses vertus et ses souffrances. Quelque temps avant la mort de madame de Civrac, on lui ordonna des eaux minérales; elle partit de Versailles, déjà très-affaiblie par l'état de sa santé. Le désir de la distraire pendant la durée du voyage qui l'éloignait de tout ce qui lui était cher, inspira au président le plan d'une fête qui lui fut donnée dans tous les lieux où elle

On a de lui des couplets, des pièces de théâtre, et même une tragédie de Marius, jouée avec quelque succès en 1715. Mais ses tragédies sont au-dessous de ses chansons; et le président Hénault n'eût laissé que les souvenirs d'un homme aimable, sans la juste célébrité que l'Abrégé chronologique assure à l'écrivain. (Note de l'édit.)

devait se reposer ses amis partaient avant elle pour la devancer de quelques postes et préparer leurs déguisemens. En relayant à Bernis, l'intéressante voyageuse trouva un groupe de seigneurs costumés en anciens chevaliers français, accompagnés des meilleurs musiciens de la chapelle du roi. Ils chantèrent à madame de Civrac des couplets composés par le président; le premier commençait par ces vers :

Quoi! vous partez sans que rien vous arrête!
Vous allez plaire en de nouveaux climats !
Pourquoi voler de conquête en conquête,
Nos cœurs soumis ne suffisent-ils pas?

A Nemours, les mêmes personnes, en habits de villageois et de villageoises, lui donnèrent une scène champêtre dans laquelle on l'invitait à venir simplement jouir des douceurs de la campagne. Ailleurs, ils parurent en bourgeois et en bourgeoises, avec le bailli et le tabellion, et ces travestissemens, toujours variés et animés par l'esprit aimable du président, suivirent madame de Civrac jusqu'aux eaux où elle se rendait. J'ai lu dans ma jeunesse, cette ingénieuse et touchante fête ; j'ignore si le manuscrit en a été conservé par les héritiers de M. le président Hénault. La candeur et la religieuse simplicité du bon cardinal contrastaient avec l'esprit galant et aimable du président, et, sans manquer à ce qui était dû au vénérable prélat, on s'amusait quelquefois de ses simplicités. Il y en eut cepen

dant une dont le résultat heureux justifia le bon cardinal d'une chose tout-à-fait déplacée. Ne voulant pas oublier des homélies qu'il avait composées dans sa jeunesse, et tenant à ses productions autant que l'archevêque de Tolède lorsqu'il disgracia Gilblas, le cardinal se levait à cinq heures du matin; tous les dimanches pendant le séjour de la cour à Fontainebleau (cette ville était dans son diocèse), il allait officier à la paroisse; il montait en chaire, et récitait une de ses homélies : toutes avaient été composées pour ramener les gens du grand monde aux modestes pratiques qui conviennent aux vrais chrétiens. Plusieurs centaines de paysannes, assises sur leurs sabots, environnées des paniers qui avaient servi à apporter leurs légumes ou leurs fruits au marché, écoutaient Son Eminence, sans comprendre un seul mot de ce qu'il leur disait. Quelques personnes attachées à la cour, voulant assister à la messe avant de partir pour Paris, entendirent son Eminence crier avec une émotion tout-à-fait pastorale : « Mes chers frères, pourquoi » le luxe vous accompagne-t-il jusqu'au pied du >> sanctuaire? Pourquoi ces coussins de velours et >> ces sacs couverts de galons et de franges précèdent>> ils votre entrée dans le temple du Seigneur? Quit» tez, quittez ces habitudes somptueuses que vous >> ne devez considérer que comme une gêne tenant » à votre rang, et dont la présence de votre divin >> Sauveur doit vous dégager. » Les personnes, qui avaient entendu les homélies, en parlèrent dans les

sociétés de la cour; chacun voulut se donner le plaisir de les entendre : les dames du plus haut rang se firent éveiller à la pointe du jour pour entendre la messe du cardinal, et Son Eminence se trouva promptement avoir attiré un auditoire fait pour profiter de ses homélies.

MARIE LECKZINSKA ne put voir sans prévention la princesse de Saxe, qui épousa le dauphin en secondes noces; mais les égards, les respects, les soins de la dauphine, lui firent oublier qu'elle était fille du prince qui portait la couronne de son père. Cependant quelques preuves de profonds ressentimens ne peuvent échapper aux yeux des gens qui environnent sans cesse les grands; et, si la reine ne voyait plus dans la princesse de Saxe qu'une épouse chérie par son fils, et la mère du prince destinée à la succession du trône, elle n'avait point oublié qu'Auguste portait la couronne de Stanislas. Un jour, un officier de sa chambre s'étant chargé de lui demander une audience particulière pour le ministre de Saxe, et la reine n'étant point disposée à l'accorder, cet homme insista en se permettant d'ajouter qu'il n'avait osé demander cette faveur à la reine, que parce que ce ministre était un ambassadeur de famille. « Dites anti-famille, reprit la >> reine avec vivacité, et faites-le entrer. >>

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