Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

étaient encore plein de charmes et d'esprit. Elle avait conservé de fort beaux cheveux dans l'âge le plus avancé : on prétendait que le fameux comte de Saint-Germain, qui avait paru à la cour de Louis XV comme un des plus célèbres alchimistes, lui avait donné une liqueur qui conservait les cheveux et les préservait de blanchir avec les années 1.

LOUIS XV avait, comme on le sait, adopté le système bizarre de séparer Louis de Bourbon du

[ocr errors]

<< Il venait souvent chez Madame ( c'est ainsi que madame du Hausset désigne continuellement la marquise de Pompadour) un homme qui était bien aussi étonnant qu'une sorcière : c'est le comte de Saint-Germain qui voulait faire croire qu'il vivait depuis plusieurs siècles. Un jour Madame lui dit devant moi à la toilette : « Comment était fait François I. ? c'est un >> roi que j'aurais bien aimé. - Aussi était-il très-aimable, dit » Saint-Germain, » et il dépeignit ensuite sa figure et toute sa personne, comme l'on fait d'un homme qu'on a bien considéré. « C'est dommage, ajouta t-il, qu'il fût trop ardent; je » lui aurais donné un bien bon conseil qui l'aurait garanti de » tous ses malheurs........... Mais il ne l'aurait pas suivi, car il » semble qu'il y ait une fatalité pour les princes qui ferme » leurs oreilles, celles de leur esprit, aux meilleurs avis, sur>> tout dans les momens critiques. Et le connétable, dit ma» dame, qu'en dites-vous ?—Je ne puis en dire ni trop de bien, »> ni trop de mal, répondit-il. — La cour de François Ier, était»elle fort belle? Très-belle; mais celle de ses petits-fils la » surpassait infiniment; et du temps de Marie-Stuart et de Mar

roi de France. Comme homme privé il avait sa fortune personnelle, ses intérêts de finances à part.

» guerite de Valois, c'était un pays d'enchantement, le temple >> des plaisirs ; ceux de l'esprit s'y mêlaient. Les deux reines » étaient savantes, faisaient des vers, et c'était un plaisir de >> les entendre. » Madame lui dit en riant: « Il semble que >> vous ayez vu tout cela.—J'ai beaucoup de mémoire, dit-il, et » j'ai beaucoup lu l'histoire de France. Quelquefois je m'amuse » non pas à faire croire, mais à laisser croire que j'ai vécu » dans les plus anciens temps. Mais enfin vous ne dites » pas votre âge, et vous vous donnez pour très-vieux? La com» tesse de Gergy qui était, il y a cinquante ans, je crois, am» bassadrice à Venise, dit vous y avoir connu tel que vous êtes aujourd'hui. Il est vrai, madame, que j'ai connu, il y a

"

[ocr errors]

>> long-temps, madame de Gergy. Mais, suivant ce qu'elle » dit, vous auriez plus de cent ans à présent? Cela n'est pas >> impossible, dit-il en riant; mais je conviens qu'il est encore >> plus possible que cette dame, que je respecte, radote. >> Vous lui avez donné, dit-elle, un élixir surprenant par ses » effets. Elle prétend qu'elle a long-temps paru n'avoir que >> vingt-quatre ans. Pourquoi n'en donneriez-vous pas au roi ? Ah! Madame, dit-il avec une sorte d'effroi, que je m'a» vise de donner au roi une drogue inconnue ! il faudrait que >> fusse fou. >>

»

»Je rentrai chez moi pour écrire cette conversation. Quelques jours après, il fut question entre le roi, Madame, quelques seigneurs et le comte de Saint-Germain, du secret qu'il avait pour faire disparaître les taches des diamans. Le roi se fit apporter un diamant médiocre en grosseur, qui avait une tache. On le fit peser; et le roi dit au comte : « Il est estimé six mille livres, >> mais il en vaudrait dix sans la tache. Voulez-vous vous char

» ger de me faire gagner quatre mille francs? » Il l'examina bien

Louis XV traitait comme particulier dans toutes les affaires ou les marchés qu'il faisait; il avait

et dit; « Cela est possible, et dans un mois je le rapporterai à » Votre Majesté. » Un mois après, le comte rapporta le diamant sans tache; il était enveloppé dans une toile d'amiante qu'il ôta. Le roi le fit peser, et, à quelque petite chose près, il était aussi pesant. Le roi l'envoya à son joaillier, sans lui rien dire, par M. de Gontaut qui rapporta neuf mille six cents livres ; mais le roi le fit redemander pour le garder par curiosité. Il ne revenait pas de sa surprise, et il disait que M. de Saint-Germaiu devait être riche à millions, surtout s'il avait le secret de faire avec de petits diamans de gros diamans. Il ne dit ni oui ni non; mais il assura très-positivement qu'il savait faire grossir les perles et leur donner la plus belle eau. Le roi le traitait avec considération, ainsi que Madame. C'est elle qui m'a raconté ce que je viens de dire. M. Quesnay m'a dit au sujet des perles. C'est une maladie des huîtres, et il est possible d'en savoir la principe. Ainsi M. de Saint-Germain peut grossir les perles, mais il n'en est pas moins un charlatan, puisqu'il a un élixir de longue vie, et qu'il donne à entendre qu'il a plusieurs siècles.

» Je l'ai vu plusieurs fois : il paraissait avoir cinquante ans ; il n'était ni gras, ni maigre, avait l'air fin, spirituel, était mis trèssimplement, mais avec goût; il portait aux doigts de très-beaux diamans, ainsi qu'à sa tabatière et à sa montre. Il vint un jour où la cour était en magnificence, chez Madame, avec des boucles de souliers et de jarretières de diamans fins, si belles, que Madame dit qu'elle ne croyait pas que le roi en eût d'aussi belles. Il passa dans l'antichambre pour les défaire, et les apporta pour les faire voir de plus près, en comparant les pierres à d'autres, M. de Gontaut qui était là dit qu'elles valaient au moins deux cent mille livres. Il avait, ce même jour, une tabatière d'un prix infini et des boutons de manche de rubis, qui étaient étincelans

acheté au Parc-aux-Cerfs, à Versailles, une assez jolie maison où il logeait avec une de ces maîtresses obscures que l'indulgence ou la politique de madame de Pompadour avait tolérées, pour ne pas perdre ses droits de maîtresse en titre 1. Ayant réformé cet usage, le roi voulut vendre sa petite maison. Sévin, premier commis de la guerre,

On ne savait pas d'où venait cet homme si riche, si extraordinaire, et le roi ne souffrait pas qu'on en parlât avec mépris ou raillerie. On l'a dit bâtard d'un roi de Portugal.

» M. de Saint-Germain dit un jour au roi: « Pour estimer les >> hommes, il ne faut être ni confesseur, ni ministre, ni lieute > nant de police. » Le roi lui dit : Et roi? —Ah! Sire, dit-il, >> vous avez vu le brouillard qu'il faisait il y a quelques jours, on » ne se voyait pas à quatre pas. Les rois, je parle en général, » sont entourés de brouillards encore plus épais, que font naître » autour d'eux les intrigans; et tous s'accordent dans toutes les >> classes pour leur faire voir les objets sous un aspect différent » du véritable. » — - J'ai entendu ceci de la bouche du fameux comte de Saint-Germain, étant auprès de Madame incommodée et dans son lit. >> (Note de l'édit.)

[ocr errors]

« La tradition et le témoignage de plusieurs personnes attachées à la cour, dit M. de Lacretelle jeune, ne confirment que trop les récits consignés dans une foule de libelles relativement au Parc-aux-Cerfs. Il paraît que ce fut dans l'année 1753 que commença cet infâme établissement. On prétend que le roi y faisait élever de jeunes filles de neuf ou dix ans. Le nombre de celles qui y furent conduites fut immense. Elles étaient dotées, mariées à des hommes vils ou crédules.

» Les dépenses du Parc-aux-Cerfs se payaient avec des acquits au comptant. Il est difficile de les évaluer; mais il ne peut y avoir aucune exagération à affirmer qu'elles coûtèrent plus de

se présenta pour l'acheter: le notaire qui était chargé de cette commission en rendit compte au roi. Le contrat de vente fut passée entre Louis. de Bourbon et Pierre Sévin, et le roi lui fit dire de lui apporter lui-même la somme en or. Le premier commis réunit quarante mille francs en louis, et, introduit par le notaire dans les cabinets intérieurs du roi, il lui remit la valeur de sa maison.

Le roi, sur ses fonds particuliers, payait l'entretien des maisons de ses maîtresses, l'éducation de ses filles naturelles, qui étaient élevées dans des couvens à Paris, et enfin leurs dots quand il les

mariait.

Les hommes les plus entraînés par des mœurs dissolues n'en rendent pas moins hommage à la vertu des femmes. Madame la comtesse de Périgord était aussi belle que vertueuse; elle s'aperçut, pendant la durée de quelques petits voyages de Choisy, où elle avait été invitée, que Louis XV était fort

cent millions à l'État. Dans quelques libelles, on les porte jusqu'à un milliard. »

Nous craignons que M. de Lacretelle n'exagère un peu les torts et surtout les dépenses de Louis XV. On trouvera dans les éclaircissemens des détails fournis par madame du Hausset, sur le Parc-aux-Cerfs, et qui pourraient donner à croire que cet établissement n'était ni aussi considérable, ni aussi coûteux qu'on l'imagine Voyez la lettre (E).

(Note d l'édit.)

« ZurückWeiter »