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voir sacré et un plaisir qu'on ne peut exprimer. Elle apprenait par cœur presque tous les cahiers destinés à ses enfans. Sa mémoire avait été exercée de tout temps; elle savait assez bien le latin et était familière avec Horace. Chaque jour l'abbé Collet lui faisait répéter sa leçon d'éducation dans son oratoire. Cette princesse, qui avait du talent naturel, de l'esprit, de l'énergie et infiniment de caractère, ne se lassait de rien. A mesure que cette veuve infortunée avançait dans une lecture où les extraits de M. le dauphin étaient disséminés avec art, elle versait des torrens de larmes. On peut, sur cette simple ébauche, deviner quelle influence une telle éducation aurait eue sur de jeunes cœurs bien nés et guidés sans relâche par la meilleure des mères. Quelle différence d'une pareille institutrice aux éducateurs ordinaires! Combien des leçons si touchantes doivent être mieux accueillies que ces documens arides qui, le plus souvent, dégoûtent à jamais du travail auquel ils prétendent accoutumer.

» Madame la dauphine ne se bornait point à ces occupations relatives à l'éducation de son fils aîné; elle pensait à elle-même; elle pensait au bien de l'État. Elle avait un homme de confiance qui l'instruisait par écrit chaque semaine de ce qu'il fallait qu'elle fit: c'étaient ces propres expressions. Pomiez était chargé de lui remettre tout à elle seule. Elle avouait que le roi lui parlait de beaucoup de choses, et l'évêque de Verdun, Nicolaï, lui conseillait bien de tout écouter.

» Cet évêque allait être premier aumônier de madame la dauphine. Caractère ardent, ambitieux, factieux même, c'était lui qui, en qualité d'agent du clergé, fit cette réponse à M. de Machault, contrôleur-général... Vous sonnez le tocsin, lui disait le ministre.- Oui, monseigneur, quand vous mettez le feu partout..... Ce mot, dit en pleine audience, était vigoureux. On agitait alors la fameuse question des immunités du clergé, à l'occasion de laquelle Silhouette fit son livre: Ne repugnate vestro bono!

» Tel était l'état des choses en 1766, lorsque la cour se

transporta à Compiègne. Madame la dauphine n'avait point encore usé de la permission que le ror lur avait donnée de conserver son rang à la cour; elle avait voulu laisser écouler les six premiers mois de grand deuil'; mais le jour de Saint-Jacques, elle parut et tint désormais la cour les jours de chasse. Alors se déploya, dans quelques occasions, la vigueur de son caractère. Un jour, entre autres, qu'on lui servit deux œufs qui, avec le lait qu'elle prenait à la rigueur, formaient son dîner, Fun de ces œufs se trouva couvé. Elle se tourna du côté de M. Du Muy, son maître-d'hôtel, et lui dit ces mots : « Voyez, mønsieur, comme l'on me sert, » mais d'un ton si fier, qu'on en parla tout le voyage. On n'était plus accoutumé à entendre ces phrases des maîtres, qui tuent les hommes quand elles sont appliquées à propos. La vue de ce poulet formé fit horreur à la princesse ; il lui prit une quinte violente qui devint la ressource des partis furieux qui lui étaient opposés. »

On trouve dans le même ouvrage fes détails suivans sur le caractère et les penchans que montrait Louis XVI dans sa jeunesse.

« Le dauphin de France, fils de Louis XV, avait présidé pendant plusieurs années à l'éducation de ses trois fils, du duc de Berri, depuis Louis XVI, du comte de Provence et du comte d'Artois.

» Le duc de Berri avait un maintien austere, sérieux, réservé et souvent brusque, sans goût pour le jeu, les spectacles: et les plaisirs, véridique et jamais menteur, s'occupant à copier, et dans la suite à composer des cartes de géographie et à limer du fer.

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» M. le dauphin avait témoigné à cet enfant un sentiment de prédilection qui excita la jalousie des autres. Madame Adélaïde, qui l'aimait tendrement, lui disait en plaisantant pour vaincre sa timidité Parle donc à ton aise, Berri, crie, gronde, fais du tintamarre comme ton frère d'Artois; casse et brise mes porcelaines, fais parler de toi. Le jeune duc de Berri, toujours plus silencieux, ne pouvait sortir de son caractère. » (Mém. hist. et polit. du règne de Louis XVI, par Soulavie, tome II.)

Note (I), page 60.

«EN 1750 madame de Pompadour fut à l'Opéra, et put s'apercevoir de l'opinion que le public avait déjà conçue de sa personne.

» Vis-à-vis d'elle était son mari, M. Le Normand d'Étioles, et pourrait-on s'imaginer qui réunit les suffrages, ou de la favorite du roi ou du.....? Ce ne fut pas celle qui voit à ses genoux les grands, les prélats, les ambassadeurs, les généraux et cette suite de ministres qu'elle élève ou qu'elle humilie; ce fut le bonhomme d'Étioles qui fut l'objet des transports. Ah! le pauvre cher homme, comme il a été décontenancé! Je l'ai beaucoup étudié, beaucoup lorgné dans cette circonstance; il a pâli, il a rougi et rembruni d'une réception à laquelle il n'avait pas droit de s'attendre.

» Comme la marquise était de mon côté à sa loge, et comme personne n'a avoué sa mine, et ne s'est avancé pour la fixer, j'ai interrogé plusieurs personnes des loges opposées qui ont pu l'observer.

» Madame de Pompadour a eu un front d'airain : tout ce que l'on a cru observer, c'est qu'elle s'est mordu la lèvre supérieure et fort long-temps. Elle a soutenu l'insulte comme elle aurait soutenu une belle harangue ou bien une longue flatterie.

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Depuis cet événement, madame la marquise n'a pas manqué de faire dire à son mari qu'elle se trouverait à telle pièce, à tel concert, à tel lieu; c'est l'ordre tacite et convenu de ne pas s'y trouver lui-même, pour éviter les inconvéniens de cette nature. Le bonhomme d'Étioles s'y soumet à cause de Louis XV: cependant quand il exige que sa femme emploie sa faveur dans une affaire, ce qui est extraordinairement rare et toujours d'une indispensable justice, ou quand il veut l'empêcher de faire une opération qui n'est pas dans l'ordre, relativement aux `intérêts de la famille, il dit à l'abbé Bayle, qui est leur inter

médiaire « Dites à ma femme que j'irai au château, que je >> l'ai résolu, et que je ferai retentir les voûtes et les plafonds » de l'équité des choses que je demande et que j'exige.

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>> C'est ensuite le prince de Soubise qui arrange tout. Le pauvre d'Étioles ne savait pas au commencement comment il l'appellerait.

» Mademoiselle Poisson? Elle était son épouse légitime : il en avait eu un enfant, et elle n'était pas demoiselle quoiqu'elle ne fût plus sa femme.

» Madame d'Étioles ? Elle avait puni au commencement un imprudent qui avait négligé de la nommer suivant sa nouvelle qualification.

» Ma femme? Cette qualité fut réservée à M. Le Normand d'Étioles pour les occasions d'une menace. Elle voulait ravoir un jour le superbe portrait par La Tour, qu'il avait encore d'elle. « Allez dire à ma femme de venir le reprendre ellemême, » lui fit-il dire par l'abbé Bayle. Cet abbé m'a appris d'autres traits et circonstances que j'ai consacrés dans ce recueil. » (Anecdotes du règne de Louis XV, publiées par Soulavie.)

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Note (J), page 61,

"MADAME éprouvait beaucoup de tribulations au milieu de toutes ses grandeurs. On lui écrivait souvent des lettres anonymes où on la menaçait de l'empoisonner, de l'assassiner ; et ce qui l'affectait le plus, c'était la crainte d'être supplantée par une rivale. Je ne l'ai jamais vue dans un plus grand chagrin qu'un soir, au retour du salon de Marly. Elle jeta, en rentrant, son manteau avec dépit, son manchon, et se déshabilla avec une vivacité extrême; ensuite, renvoyant ses autres femmes, elle me dit à leur sortie : « Je ne crois pas qu'il y ait rien » de plus insolent que cette C***. Je me suis trouvée au jeu à

» une table de brelan avec elle, et vous ne pouvez vous ima

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giner ce que j'ai souffert. Les hommes et les femmes sem

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» blaient se relayer pour nous examiner. Madame de C*** a dit >> deux ou trois fois en me regardant : Va tout, de la manière la >> plus insultante; et j'ai cru me trouver mal quand elle a dit >> d'un air triomphant : J'ai brelan de rois. Je voudrais que vous » eussiez vu sa révérence en me quittant. —Et le roi, lui » dis-je, lui a-t-il fait ses belles mines? Vous ne le con» naissez pas, la bonne ;...... s'il devait la mettre ce soir dans >> mon appartement, il la traiterait froidement devant le monde » et me traiterait avec la plus grande amitié. Telle a été son » éducation, car il est bon par lui-même et ouvert. »—Les alarmes de Madame durèrent quelques mois, et Madame me dit un jour: « Cette superbe marquise a manqué son coup; elle a ef-. frayé le roi par ses grands airs, et n'a cessé de lui demander » de l'argent; et vous ne savez pas que le roi signerait pour >> un million, et donnerait à peine cent louis sur son petit » trésor.

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» Lebel, qui m'aime mieux qu'une nouvelle à ma place, soit » par hasard ou par projet, a fait venir au Parc-aux-Cerfs une » petite sultane charmante qui a refroidi un peu le roi pour » l'altière Vasti, en l'occupant vivement. On a donné à » des diamans, cent mille francs et un domaine. Jeannel ( in>> tendant des postes ) m'a rendu, dans cette circonstance, de » grands services, en montrant au roi les extraits de la poste » sur le bruit que faisait la faveur de madame de C***. Le roi a » été frappé d'une lettre d'un vieux conseiller au parlement, » du parti du roi, qui mande à un de ses amis : Il est juste que » le maître ait une amie, une confidente, comme nous tous tant » que nous sommes, quand cela nous convient; mais il est à dé» sirer qu'il garde celle qu'il a: elle est douce, ne fait de mal à » personne, et sa fortune est faite. Celle dont on parle aura toute » la superbe que peut donner une grande naissance. Il faudra lui » donner un million par an, parce qu'elle est, à ce qu'on dit, très-dépensière, et veut faire ducs, gouverneurs de province,

ور

» maréchaux, sesparens, qui finiront par environner le roi, et » faire trembler ses ministres. »

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