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douleur de la disgrâce; mais il n'en est effectivement rien. Le neveu ne ressemble pas à l'oncle. Le roi était content de M. de Paulmy, puisqu'il avait toujours tenu envers madame de Pompadour une conduite dont elle n'avait aucun sujet de se plaindre; l'oncle, au contraire, n'avait fait aucun mystère du mépris qu'il avait pour elle. Elle n'attendait que l'occasion de lui faire porter la peine de son ressentiment; et aucune ne pouvait être plus favorable que celle-là.

» M. de Paulmy-d'Argenson n'a pas occupé long-temps la place de son oncle; la force des circonstances vient de l'en chasser pour avoir montré trop de zèle à servir la haine de madame de Pompadour contre M. d'Estrées. Sa faveur n'a pu le garantir; tant il est vrai que, dès que les choses ont pris à la cour un train mal réglé, la faveur même des personnes les plus puissantes n'est plus d'aucune utilité: cela arrive surtout quand tout y est dirigé par les caprices d'une femme telle que la célèbre marquise. S'opposer à ses vues, la contredire, c'est le moyen sûr de trouver une disgrâce; suivre aveuglément ses volontés, c'est encore s'exposer aux mêmes dangers, parce que les suites d'une action sont toujours mises sur le compte de ceux qui la font, et rarement sur celui de ceux qui les ordon

nent.

>> Tel était positivement le cas du jeune Paulmy-d'Argenson : le pauvre homme tomba pour avoir voulu obéir. Secondé de M. Rouillé, il poussa la complaisance pour madame de Pompadour jusqu'à prendre le parti de M. de Maillebois contre M. le maréchal d'Estrées. Ce dernier s'étant justifié de la façon qu'il l'a fait, on fut obligé de les sacrifier tous deux aux cris et à la vengeance du public, qui fait souvent ici la loi au pouvoir le plus despotique, en l'obligeant de temporiser et de garder les mesures qu'il semble prescrire au roi. Mais ce qui a étonné le plus de monde, c'est que M. de Machault, garde des sceaux fut renvoyé de sa charge en même temps et le même jour que le vieux d'Argenson. Il était à la tête d'un parti opposé à ce dernier ministre, et chacun savait qu'il faisait corps avec ma

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dame de Pompadour : il est vrai qu'il montra quelque chaleur dans les représentations qu'il fit au sujet des dépenses excessives qu'exigeaient les petits soupers du roi, auxquels avait été adjoint le département des plaisirs. Il aurait voulu qu'elles fussent plus modérées; ou, qu'à l'exemple du grand couvert, on les mît sur un pied fixe auquel on fût obligé de s'en tenir. Cependant un prétexte aussi vain de la démission, que celui d'avoir déplu au roi et à la Pompadour, ou plutôt à la Pompadour et au roi, par la liberté de ses remontrances, n'aurait fait aucune impression sur sa personne, si on ne s'en était servi avec un air mystérieux qui annonçait qu'on était au fait de celui de la cour.» (Anecdotes du règne de Louis XV, publiées par Soulavie.)

Extrait d'une notice communiquée à Soulavie sur l'assassinat de Louis XV par Damiens.

« La ville de Paris envoie ici (à Versailles ) tous les jours trois ou quatre fois, pour savoir des nouvelles du roi; et M. le duc de Gesvres en envoie quatre fois par jour à M. le prévôt des marchands. Le jour que le roi fut blessé (par Damiens), dès que l'on sut cette nouvelle dans la ville, et que M. de Gesvres allait partir pour Versailles, il s'assembla dans la cour et à la porte un grand concours et une multitude de peuple, pour savoir des nouvelles du roi, et ils y restèrent jusqu'à cinq heures du matin, malgré la rigueur du froid, pour attendre l'arrivée du deuxième courrier. M. de Gesvres leur fit faire du feu dans la cour et dans la rue. Les spectacles finissaient quand la nouvelle arriva; mais, depuis le jour des Rois, il n'y a pas eu de représentation. M. le duc de Gesvres et M. le prévôt des marchands assurent également que la consternation a été très-grande dans Paris, et qu'elle dura encore long-temps après.

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Monseigneur l'archevêque ordonne dans le moment les prières de quarante heures; on fait des neuvaines à Sainte-Ge neviève, où il y a une affluence prodigieuse de peuple. Ce n'est

pas sans peine que le corps de ville, qui y va tous les jours, peut entrer. Les églises sont remplies; l'affection et l'inquiétude du peuple est aussi grande qu'en 1744, dans le temps de la maladie du roi. Une preuve non équivoque de ces sentimens, c'est que, malgré l'usage des soupers, la veille des rois, et de tirer des gâteaux en criant le roi boit, il n'y a pas eu un seul cabaret dans Paris où l'on ait entendu ces cris de joie; c'est de M. le prévôt des marchands que je le sais. Il n'y en a même point eu dans les maisons particulières; et les rôtisseurs, qui vendent dans ce temps-ci un dindon à chaque bourgeois, ont été fort étonnés de voir la provision de l'année leur rester. Le greffier de la ville s'étant rendu ici pour marquer au roi la joie de la ville sur sa meilleure santé, M. le duc de Gesvres le mena chez le roi. Il venait d'y arriver le greffier en chef du parlement de Rouen, pour assurer Sa Majesté des alarmes, du respect et de l'attachement de cette compagnie. M. de Richelieu avait déjà annoncé deux ou trois fois le député de Rouen; enfin M. de Gesvres en ayant parlé à Sa Majesté, à l'occasion de celui de la ville de Paris, le roi permit qu'ils entrassent tous deux. Ils furent admis dans le balustre; le greffier de Rouen fit une assez longue harangue : le roi ne l'interrompit point, mais s'étant mis à son séant quand il eut fini, il dit au député : « Je me >> porte fort bien; dites à mon parlement qu'il songe à me don" » ner des marques de son obéissance. » Immédiatement après, le député de la ville se présenta; le roi lui répondit en présence du député de Rouen : « Dites à ma bonne ville de Paris que je >> suis fort content de son zèle et de son affection, et assurez-la » de ma protection et de mon amitié. » On sait que dans cette circonstance les parlemens étaient dans une sorte d'état de désobéissance. La conduite des états de Bretagne leur fait beaucoup d'honneur. Il y avait eu de grandes difficultés sur l'enregistrement du second vingtième; et quoique l'on ait consenti que la province s'abonnât pour ses nouveaux droits, afin que la perception leur fût moins à charge, ils ont toujours refusé l'abonnement, parce qu'ils ne voulaient point payer ces droits.

La nouvelle de la blessure du roi a fait un changement total dans les esprits : les états ont écrit à M. de Saint-Florentin qu'il ne serait plus question d'aucune difficulté de leur part; qu'ils voulaient obéir à tout ce que le roi désirait d'eux, et ne s'occuper plus qu'à lui donner des preuves de leur fidélité, de leur attachement et de leur respect, en sacrifiant leurs biens et leurs vies mème pour son service. Ils envoient quatre députés qui doivent arriver demain ; cet heureux changement fait honneur aux sentimens de la noblesse bretonne qui compose` la plus grande partie des états.

» On ne peut en même temps refuser à M. le duc d'Aiguillon et à M. l'évêque de Rennes, qui agissent fort de concert, qu'ils ont profité habilement des circonstances et de l'impression qu'elles ont faite sur les esprits. Tout le monde convient que M. d'Aiguillon, depuis qu'il est en Bretagne, s'y conduitavec la plus grande application, et toute l'intelligence et la capacité possibles, tant dans les affaires qui regardent le militaire, que dans celles qui regardent l'intérieur de la province. Sa facilité pour le travail, le temps qu'il y donne, sa politesse, lui ont mérité l'estime et l'amitié de toute la Bretagne. (J'écris le dimanche, le 9 janvier 1757.)

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Monseigneur le dauphin a donné aujourd'hui une marque de bonté dont la nouvelle sera bien agréable aux Bretons. Il y a un monde prodigieux à son dîner depuis qu'il a commencé à dîner en public. Au milieu de la foule, il a aperçu M. le marquis de Poulpry, homme de condition de Bretagne, qu'il connaît médiocrement, et à qui peut-être il n'avait jamais parlé ; il lui a demandé s'il avait des nouvelles de Bretagne. M. de Poulpry ayant répondu que monseigneur le dauphin devait être instruit « C'est pour cela que je vous ai appelé, a répondu » monseigneur le dauphin, pour vous dire le plaisir avec le>> quel j'ai appris la conduite des états, que je n'oublierai ja» mais. Je vous prie de le leur mander. » (Anecdotes du règne de Louis XV pendant la faveur de madame de Pompadour, par Soulavie.)

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Note (C), page 33.

« Tout le monde parlait d'une jeune demoiselle dont le roi était épris. Elle s'appelait Romans et était charmante. Madame savait que le roi la voyait, et ses confidentes lui en faisaient des rapports alarmans. La seule maréchale de Mirepoix, la meilleure tête de son conseil, lui donnait du courage. « Je ne » vous dirai pas qu'il vous aime mieux qu'elle; et si, par un » coup de baguette, elle pouvait être transportée ici, qu'on lui » donnât à souper, et que l'on fût au courant de ses goûts, il » y aurait pour vous peut-être de quoi trembler. Mais les prin>> ces sont, avant tout, des gens d'habitude; l'amitié du roi est » la même pour vous que pour votre appartement et vos en>> tours; vous êtes faite à ses manières, à ses histoires; il ne se gêne pas; il ne craint pas de vous ennuyer: comment vou» lez-vous qu'il ait le courage de déraciner tout cela en un jour, » de former un autre établissement, et de se donner en spec>> tacle au public par un changement aussi grand de décoration?>> La demoiselle devint grosse : les propos du public, de la cour même, alarmaient Madame infiniment. On prétendait que le roi légitimerait son fils, donnerait un rang à la mère. « Tout >> cela, dit la maréchale, est du Louis XIV: ce sont de grandes » manières qui ne sont pas celles de notre maître. » Les indiscrétions, les jactances de mademoiselle Romans la perdirent dans l'esprit du roi. Il y eut même des violences exercées contre elle dont Madame est fort innocente. On fit des perquisitions chez elle, on prit ses papiers; mais les plus importans, qui constataient la paternité du roi, avaient été soustraits. Enfin la demoiselle accoucha, et fit baptiser son fils sous le nom de Bourbon, fils de Charles de Bourbon, capitaine de cavalerie. La mère croyait fixer les yeux de toute la France, et voyait dans son fils un duc du Maine. Elle le nourrissait et allait au bois de Boulogne, chamarrée des plus belles dentelles, ainsi que son fils qu'elle portait dans une corbeille. Elle s'asseyait sur l'herbe

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