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décrire ces précieuses étincelles de lumière dont notre dépouille mortelle est saupoudrée, et ces rayons de vertu qui au fond de nous-mêmes, pénètrent si vifs et si purs?

SONNET SPIRITUEL.

(2e partie.)

Si le son passager que l'air seul entoure et fait naître ; si le souffle qui le rassemble intérieurement et le fait émettre ensuite par notre voix imparfaite et mortelle, touche encore assez agréablement notre cœur, pour qu'il le tire et l'élève au-dessus des préoccupations communes, et pour qu'il allume notre pensée et pousse notre volonté

Tal potess' io ritrarle in queste carte,

Qual impresse l'ho in cor, che mille amanti
Infiamerei di casti fuochi eterni.

Ma chi potrria narrar l'alme cosparte

Luci del mortal velo, e quelli interni
Raggi della virtù sì vivi e santi ?

SONETTO 27.

(2a parte.)

Se'l breve suon, che sol quest' aer frale
Circonda e move, et l'aura, che raccoglie
Lo spirto dentro, e poi l'apre e discioglie,
Soavemente in voce egra e mortale;

Con tal dolcezza il cor sovente assale
Che d'ogni cura vil s'erge e ritoglie,
Sprona, accende 'l pensièr, drizza le voglie

à voler vers le ciel avec des ailes légères; qu'arrivera-til donc quand l'âme pure, écoutera avec amour et seulement avec l'oreille intérieure toujours dirigée vers le vrai et l'harmonie céleste? Là devant son créateur, où l'on ne s'écarte jamais du ton ni de la mesure, où le concert est toujours parfait?

SONNET SPIRITUEL.

(2o partie.)

Comme le petit oiseau à jeun qui entend et voit sa mère battant des ailes lorsqu'elle lui apporte à manger, et qui, après la joie mutuelle que ce petit repas a fait naître, se tourmente dans son nid par l'envie qu'il a de

Per gir volando al ciel con leggiere ale;
Che fia, quand' udirà con vivo zelo

La celeste armonia l'anima pura

Sol con l'orecchia interna intenta al vero
Dinanzi al suo Fattor nel sommo cielo,
U' non si perde mai tuono, o misura,
Nè si discorda il bel concento altero?

SONETTO 47.
(2a parte.)

Qual digiuno angellin, che vede cd ode
Batter l'ali alla madre intorno, quando
Gli reca il nutrimento, ond' egli amando
Il cibo, e quella, si rallegra e gode;

suivre sa mère en volant, et trouve pour la remercier par son chant, une focre qui lui dénoue la langue; de même, au contact chaud et vivifiant du divin Soleil (Dieu), dont je nourris mon cœur, je me sens l'esprit plus lucide que de coutume. Alors, poussée par l'amour intérieur, je prends la plume, et, sans que je sache moi-même ce que je dis, j'écris ses louanges.

E dentro al nido suo si strugge e rode
Per desio di seguirla anch' ei volando;
E la ringrazia, in tal modo cantando,
Che par ch' oltra il poter la lingua snode
Tal' io, qualor il caldo raggio e vivo

Del divin Sole, onde nudrisco il core,
Più dell' usato lucido lampeggia ;
Movo la penna, mossa d'all' amore

Interno; e senza ch'io stessa m'avveggia
Di quel, che io dico, le sue lodi scrive.

Certes il y a dans ces vers une grande élévation de pensée et beaucoup d'élégance de style; mais cette élégance dégénère parfois, il faut l'avouer, en recherche et en afféterie. C'est le défaut de Vittoria Colonna, dont le talent aurait acquis sans doute plus de fermeté et de grandeur si, au lieu d'être entourée de beaux esprits, tel que Bembo entre autres, elle eût composé sous sa propre inspiration. Les vers de cette dame illustre par sa naissance, par son alliance avec Pescaire et par son talent, excitèrent une admiration universelle en Italie, et l'on a vu avec quel profond respect en parlait le grand Michel-Ange. Dans le recueil des poésie de cet artiste,

il

y a plusieurs pièces adressées à Vittoria Colonna; car il n'est pas indifférent que l'on sache, pour saisir le véritable sens des poésies amoureuses et mystiques de cette époque et comprendre toute la singularité des mœurs de ce temps, qu'il existait entre la veuve du marquis de Pescaire et l'auteur du Moïse, un commerce tout spirituel d'amour platonique, qu'ils entretenaient par un échange de lettres et de vers. Condivi, disciple et ami de Michel-Ange, rapporte dans la vie qu'il a écrite de son maître « Que Buonarotti aima passionnément la marquise de Pescaire, dont l'esprit divin l'avait séduit, et qu'il fut tendrement (svisceramente) aimé d'elle. Il conserve de cette dame, ajoute le biographe, des lettres pleines d'un amour aussi chaste que tendre, telles que pouvait seulement les écrire une pareille femme. De son côté, Michel-Ange lui adressa un grand nombre de Sonnets composés avec autant d'esprit que de passion. » Enfin Condivi, venant à parler de l'effet que la mort de Vittoria produisit sur Michel-Ange, ajoute : « Que la douleur de l'artiste était si violente qu'elle le rendait parfois comme privé de sens. »

On trouve en effet dans le recueil de Michel-Ange, plusieurs Sonnets et Madrigaux adressés à cette dame; et pour donner ici une idée des relations spirituelles qui s'étaient établies entre eux, j'ajouterai la traduction seulement d'une de ces pièces, plus curieuse par la disposition de l'esprit de l'auteur, que par l'élégance du style:

« Je vais tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, dit-il, va>> riant la recherche de mon salut. Mon cœur, flottant » sans cesse entre le vice et la vertu, se sent défaillir » comme un voyageur fatigué qui s'égare dans les ténè» bres. Ah! devenez mon conseil: je vous donne carte

» blanche pour que vous y inscriviez vos saintes ins»tructions, et que vous préserviez mon âme des nou» veaux égarements où pourraient l'entraîner de der»nières fautes. Oui, dictez-moi vous-même la conduite » que je dois suivre, vous qui avez su me diriger vers » le ciel, par les plus belles routes! (1). »

Depuis le sceptique Laurent des Médicis, le platonisme et la poésie amoureuse étaient dégénérés en une manière d'être pour l'esprit qui s'adaptait également aux intelligences les plus disparates. Les personnes religieuses telles que Vittoria Colonna, Michel-Ange et bientôt après le Tasse, platonisaient saintement, tandis que d'autres, comme Bembo, par exemple et ceux de son école, ne considéraient et ne mettaient plus en usage la poésie amoureuse, que comme un jeu d'imagination. C'est en effet à partir de Bembo que les ennuyeux imitateurs de Pétrarque, dont je me garderai bien de parler, inondèrent non-seulement l'Italie, mais l'Espagne, la France et même l'Angleterre. Dans ces pays divers, la manie du sonnet devint déplorablement contagieuse; et pour suivre, au milieu de cet océan de compositions fades et insignifiantes, l'histoire des derniers génies qui obéirent. encore à leur insu, à l'impulsion donnée par Dante, il faut moins encore s'attacher au talent de tel ou tel versificateur habile, qu'à la disposition forte et sincère de l'âme de ceux qui, en ayant recours aux formes de la poésie amoureuse et mystique, ont cru y trouver des ressources pour mieux exprimer ce qu'ils sentaient.

Parmi tant de poètes fameux qui parurent en Espagne pendant le xvie siècle, je choisirai donc sainte Thérèze

(4) Ora su'l destro or su'l sinistro piede, etc, (MADRIGALE.)

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