Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

édits furent rendus malgré lui; et je crois très fermement que si ce ministre avait vécu de nos jours, il aurait été le premier à presser la liberté du commerce.

Il ne m'appartient pas, monsieur, de vous en dire davantage sur des choses dont vous êtes si bien instruit. Je dois me borner à vous remercier et vous assurer que j'ai pour vous une estime aussi illimitée que doit l'être. la liberté du commerce.

selon

vous,

CCCXIX.

A MADAME LA DUCHESSE DE CHOISEUL.

Lyon, 3 juillet.

Guillemet ignore si madame la duchesse est dans son palais de Paris, ou dans son palais de Chanteloup, ou dans sa chambre de Versailles. Quelque part où elle soit, elle dit et elle fait des choses très agréables.

Guillemet prend la liberté de lui en dépêcher qui ne sont pas peut-être de ce genre; mais comme elle est très tolérante, il s'est imaginé qu'elle pourrait jeter un coup d'œil sur une tragédie où l'on dit que la tolérance est prêchée.

Monseigneur son époux le corsique aurait-il le temps de s'amuser un moment de cette bagatelle? Guillemet en doute. Monseigneur a un nouveau royaume et un nouveau pape à gouverner, et force petits menus soins qui prennent vingt-quatre heures au moins dans la journée. Les détails me pilent, disait Montaigne, à ce qu'on m'a rapporté : voilà pourquoi Guillemet se garde bien d'écrire à monseigneur. Mais quand nous entendons parler de ses succès dans nos climats sauvages, notre cœur danse de joie.

Je vais bientôt, madame, quitter la typographie,

avant que je quitte la vie, selon le conseil de La Bletterie. Je suis comme l'apothicaire Arnoud qui se plaignait que l'on contrefît toujours ses sachets. Cela dégoûte à la fin du métier les typographes comme les apothicaires. Ainsi, madame, vous vous pourvoirez s'il vous plaît ailleurs. Il faut bien que tout finisse; il faut surtout finir cette lettre, de peur de vous ennuyer.

Daignez donc, madame, agréer le profond respect qui ne finira qu'avec la vie de GUIllemet.

P. S. Je ne sais comment je suis avec madame votre petite-fille depuis un certain déjeuner; je ne sais si elle aime encore les vers; je ne sais rien d'elle.

CCCXX.

A M. MARIN,

SECRÉTAIRE DE LA LIBRAIRIE.

A Ferney, ce 5 juillet.

Vous savez, monsieur, que vers la fin de l'année passée il parut une brochure intitulée Examen de la nouvelle Histoire d'Henri IV, par M. le marquis de B***.

On est inondé de brochures en tout genre, mais celleci se distinguait par un style brillant, quoique un peu inégal. Le titre porte qu'elle avait été lue dans une séance d'académie, et cela était vrai. De plus, tout ce qui regarde l'histoire de France intéresse tous ceux qui veulent s'instruire, et ce qui concerne Henri IV est très précieux. On traitait dans cet écrit plusieurs points d'histoire qui avaient été jusqu'ici assez inconnus.

1o On y assurait que le pape Grégoire XIII n'avait pas reconnu la légitimité du mariage de Jeanne d'Albret et d'Antoine de Bourbon, père d'Henri IV.

2o Que cette même Jeanne d'Albret avait pris la qualité de majesté fidélissime.

3o On affirmait que Marguerite de Valois eut en dot les sénéchaussées de Querci et de l'Agénois, avec le pouvoir de nommer aux évêchés et aux abbayes de ces provinces.

Il y avait beaucoup d'anecdotes très curieuses, mais dont la plupart se sont trouvées fausses par l'examen M. l'abbé Boudot en a bien voulu faire.

que

Ce qui me choqua le plus dans cette critique fut l'extrême injustice avec laquelle on y censure l'ouvrage très utile et très estimable de M. le président Hénault. Ce fut pour moi, vous le savez, monsieur, une affliction bien sensible quand vous m'apprêtes que plusieurs personnes me fesaient une injustice encore plus absurde, en m'attribuant cette même critique dans laquelle il y a des traits contre moi-même. Je demandai la permission à M. le président Hénault de réfuter cet ouvrage, et je priai M. l'abbé Boudot, par votre entremise, de consulter les manuscrits de la Bibliothèque du roi sur plusieurs articles. Il eut la complaisance de me faire parvenir quelques instructions; mais le nombre des choses qu'il fallait éclaircir était si considérable, et cette critique fut bientôt tellement confondue dans la foule des ouvrages de peu d'étendue qui n'ont qu'un temps; enfin, je tombai si malade, que cette affaire s'évanouit dans les délais.

Elle me semble aujourd'hui se renouveler par une nouvelle Histoire du Parlement, qu'on m'attribue. Je n'en connais d'autre que celle de M. Lepage, avocat à Paris, divisée en plusieurs lettres, et imprimée sous le nom d'Amsterdam en 1754.

Pour composer un livre utile sur cet objet, il faut

avoir fouillé pendant une année entière au moins dans les registres, et quand on aura percé dans cet abyme, il sera bien difficile de se faire lire. Un tel ouvrage est plutôt un long procès verbal qu'une histoire.

Si quelque libraire veut faire passer cet ouvrage sous mon nom, je lui déclare qu'il n'y gagnera rien, et que, loin que mon nom lui fasse vendre un exemplaire de plus, il ne servirait qu'à décréditer son livre. Il y aurait de la folie à prétendre que j'aie pu m'instruire des formes judiciaires de France, et rassembler un fatras énorme de dates, moi qui suis absent de France depuis plus de vingt années, et qui ai presque toujours vécu avant ce temps, loin de Paris, à la campagne, uniquement occupé d'autres objets.

Au reste, monsieur, si on voulait recueillir tous les ouvrages qu'on m'impute, et les mettre avec ceux que l'on a écrits contre moi, cela formerait cinq à six cents volumes dont aucun ne pourrait être lu, Dieu merci.

Il est très inutile encore de se plaindre de cet abus, car les plaintes tombent dans le gouffre éternel de l'oubli avec les livres dont on se plaint. La multitude des ouvrages inutiles est si immense, que la vie d'un homme ne pourrait suffire à en faire le catalogue.

Je vous prie, monsieur, de vouloir bien permettre que ma lettre soit publique pour le moment présent; car le moment d'après on ne s'en souviendra plus, et il en est ainsi de presque toutes les choses de ce monde.

CCCXXI.

A M. LE COMTE D'ARGENTAL.

7 juillet.

Rien n'est plus sûr, mon cher ange, que les lettres de Lyon; vous pouvez d'ailleurs les adresser à M. Lavergne,

banquier, ou à M. Scherer, aussi banquier, tantôt l'un, tantôt l'autre. Cela est inviolable et inviolé, et je vous en réponds sur ma vieille petite tête.

Permettez-moi de réfuter quelques petits paragraphes de votre exhortation du 29 de juin, en me soumettant à beaucoup de points. Les Sermons du père Massillon sont un des plus agréables ouvrages que nous ayons dans notre langue. J'aime à me faire lire à table; les anciens en usaient ainsi, et je suis très ancien. Je suis d'ailleurs un adorateur très zélé de la Divinité; j'ai toujours été opposé à l'athéisme; j'aime les livres qui exhortent à la vertu, depuis Confucius jusqu'à Massillon; et sur cela on n'a rien à me dire qu'à m'imiter. Si tous les conseils des rois de l'Europe étaient assemblés pour me juger sur cet article, je leur tiendrais le même langage, et je leur conseillerais la lecture à dîner, parce qu'il en reste toujours quelque chose, et qu'il ne reste rien du tout des propos frivoles qu'on tient dans ces repas, tant à Rome qu'à Paris.

Quant à l'Histoire dont vous me parlez, mon cher ange, il est impossible que j'en sois l'auteur; elle ne peut être que d'un homme qui a fouillé deux ans de suite dans des archives poudreuses. J'ai écrit sur cette petite calomnie, qui est environ la trois centième, une lettre à M. Marin pour être mise dans le Mercure, qui commence à prendre beaucoup de faveur. Je sais, à n'en pouvoir douter, que cet ouvrage n'a pas été imprimé à à Genève, mais à Amsterdam, et qu'il a été envoyé de Paris. Je sais encore qu'on en fait deux éditions nouvelles avec additions et corrections; car je suis fort au fait de la librairie étrangère.

Il est bon, mon cher ange, que l'on fasse imprimer sans délai, jour et nuit, sans perdre un moment, ces

« ZurückWeiter »