Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

comme un déclamateur de très mauvaise foi. Pou moi, je vous avoue que je suis pour madame du De fand, qui disait que l'Esprit des Lois était de l'esprit sur les lois. Je ne vois de vrai génie que dans Cinna et dans les pièces de Racine, et je fais plus de cas d'Armide et du quatrième acte de Roland que de tous nos livres de prose.

Montesquieu, dans ses Lettres persanes, se tue à rabaisser les poëtes. Il voulait renverser un trône où il sentait qu'il ne pouvait s'asseoir. Il insulte violemment, dans ses Lettres, l'Académie dans laquelle il sollicita depuis une place. Il est vrai qu'il avait quelquefois beaucoup d'imagination dans l'expression; c'est, à mon sens, son principal mérite. Il est ridicule de faire le goguenard dans un livre de jurisprudence universelle. Je ne peux souffrir qu'on soit plaisant si hors de propos; enfin, chacun a son avis; le mien est de vous aimer et de vous estimer toujours.

CCXXXVII.

A MADAME DE POMMEREUL,

QUI AVAIT ADRessé a l'auteur la recette de l'élixir de longue vie, Avec une lettre mêlée de prose et de VERS.

A Ferney, le 29 décembre.

Madame, si je n'avais pas été très malade sur la fin de cette courte vie, je vous aurais sans doute remerciée sur-le-champ de la longue vie que vous voulez bien me procurer. Il faut que vous descendiez d'Apollon en droite ligne, vous et madame d'Antremont.

Vous ne démentez pas votre illustre origine;
Il est le dieu des vers et de la médecine,
Il prolonge nos jours, il en fait l'agrément.
Ce dien vous a donné l'un et l'autre talent:

Ils sont rares tous deux. J'apprends dans mes retraites
Qu'on a dans Paris maintenant

Moins de bons médecins que de mauvais poëtes.

CORRESPONDANCE. T. IX.

23

Grand merci, madame, de votre recette de longue vie. Je me doute que vous en avez pour rendre la vie très agréable; mais j'ai peur que vous ne très avare de

soyez cette recette-là. Le cardinal de Fleury prenait tous les matins d'un baume qui ressemblait fort à votre élixir; il avait beaucoup usé dans son temps de cette autre Je crois c'est ce qui recette que vous ne donnez pas. que l'a fait vivre quatre-vingt-dix ans assez joyeusement. Ce bonheur n'appartient qu'à des gens d'église : Dieu ne ainsi les pauvres profanes.

bénit pas

Quoi qu'il en soit, daignez agréer le respect et la reconnaissance avec lesquels j'ai l'honneur d'être, etc.

CCXXXVIII.

A M. LE COMTE DE ROCHEFORT.

1er janvier 1769.

Je présente mes tendres et sincères respects au couple aimable qui a honoré de sa présence pendant quelques jours l'ermitage d'un vieux solitaire malingre. Je ne leur souhaite point la bonne année, parce que je sais qu'ils font les beaux jours l'un de l'autre. On ne souhaite point le bonheur à qui le possède et à qui le donne.

Je me flatte qu'un jour Dixhuitans sera le meilleur comme le plus bel appui de la bonne cause. La raison et l'esprit introduiront leur empire dans le Gévaudan, et on sera bien étonné. La bonne cause commence à se faire connaître sourdement partout, et c'est de quoi je bénis Dieu dans ma retraite. J'achève ma vie en travaillant à la vigne du Seigneur, dans l'espérance qu'il viendra de meilleurs apôtres, plus puissans en œuvres et en paroles.

* Madame de Rochefort avait dix-huit ans. (É. de K.)

Quoiqu'on dise à Paris que la fête de la Présentation de Notre-Dame doit se célébrer au commencement de janvier, je n'en crois encore rien; car à qui présenter? à des vierges! cela ne serait pas dans l'ordre.

On parle de grandes tracasseries. Je ne connais que celles de Corse. Elles ne réussissent pas plus dans l'Europe que le Tacite de La Bletterie en France. Mais le mal est médiocre; et, après la guerre de 1756, on ne peut marcher que sur des roses. Pour le parlement, il fait naître le plus d'épines qu'il peut.

CCXXXIX.

A MADAME DE SAUVIGNI.

A Ferney, 3 janvier.

Madame, il y a dans la lettre dont vous m'honorez, du 27 de décembre, un mot qui m'étonne et qui m'afflige. Vous dites que « monsieur votre frère vous menace, « et que vous ne devez plus rien faire pour empêcher « ses menaces d'être effectuées. »

Je serais inconsolable si, ayant voulu l'engager à se confier à vos bontés, j'avais pu laisser échapper dans ma dernière lettre quelque expression qui pût faire soupçonner qu'il vous menaçât, et qui pût jeter l'amertume dans le cœur d'un frère et d'une sœur.

Je vous ai obéi avec la plus grande exactitude. Vous m'avez pressé, par deux lettres consécutives, de l'attirer chez moi et de savoir de lui ce qu'il voulait.

Je vous ai instruite de toutes ses prétentions; je vous ai dit que, dans le pays qu'il habite, il ne manquait pas de prétendus amis qui lui conseillaient d'éclater et de se pourvoir en justice; je vous ai dit que je craignais qu'il ne prît enfin ce parti; je vous ai offert mes services; je

n'ai eu et je n'ai pu avoir en vue que votre repos et le sien. Non seulement je n'ai point cru qu'il vous menaçât, mais il ne m'a pas dit un seul mot qui pût le faire entendre.

Je vous avoue, madame, que j'ai été touché de voir le frère de madame l'intendante de Paris arriver chez moi à pied, sans domestique, et vêtu d'une manière indigne de sa condition.

Je lui ai prêté cinq cents francs, et, s'il m'en avait demandé deux mille, je les lui aurais donnés.

Je vous ai mandé qu'il a de l'esprit, et qu'il est considéré dans le malheureux pays qu'il habite. Ces deux choses sont très conciliables avec une mauvaise conduite en affaires.

Si le récit qu'il m'a fait de ses fautes et de ses disgraces est vrai, il est sans contredit un des plus malheureux hommes qui soient au monde.

Mais que voulez-vous que je fasse? S'il n'a point d'argent et s'il m'en demande encore dans l'occasion, faudra-t-il que je refuse le frère de madame l'intendante de Paris? faudra-t-il que je lui dise: Votre sœur m'a ordonné de ne vous point secourir; après que je lui ai dit, pour montrer votre générosité, que vous m'aviez permis de lui prêter de l'argent dans l'occasion, lorsque vous étiez à Genève? Ceux que nous avons obligés une fois semblent avoir des droits sur nous, et lorsque nous nous retirons d'eux, ils se croient offensés.

Vous savez, madame, que depuis quatorze ans il a auprès de lui une nièce de l'abbé Nollet. Ils se sont séparés, et il ne faut pas qu'il la laisse sans pain. Toute cette situation est critique et embarrassante. Cette Nollet est venue chez moi fondre en larmes. Ne pourrait-on pas, en fixant monsieur votre frère peut toucher

ce que

par an, fixer aussi quelque chose pour cette fille infortunée?

Je ne suis environné que de malheureux. Ce n'est point à moi de solliciter la noblesse de votre cœur, ni de faire des représentations à votre prudence. Monsieur votre frère prétend qu'il doit lui revenir quarante-deux mille livres de rente, et qu'il n'en a que six; je crois, en rassemblant tout ce qu'il m'a dit, qu'il se trompe beaucoup. Il vous serait aisé de m'envoyer un simple relevé de ce qu'il peut prétendre; cela fixerait ses idées, et fermerait la bouche à ceux qui lui donnent des conseils dangereux.

Il me paraît convenable que ses plaintes ne se fassent point entendre dans les pays étrangers.

Au reste, madame, je vous supplie d'observer que je n'ai jamais rien fait dans cette malheureuse affaire que ce que vous m'avez expressément ordonné. Soyez très persuadée que je ne manquerai jamais à votre confiance, que j'en sens tout le prix, et que je vous suis entièrement dévoué.

CCXL.

A M. L'ABBÉ AUDRA. (A Toulouse.)

Ferney, le 3 janvier.

Il s'agit, monsieur, de faire une bonne œuvre; je m'adresse donc à vous. Vous m'avez mandé lement de Toulouse commence à ouvrir les

que le par

yeux, que la plus grande partie de ce corps se repent de l'absurde barbarie exercée contre les Calas. Il peut réparer cette barbarie, et montrer sa foi par ses œuvres.

Les Sirven sont à peu près dans le cas des Calas. Le père et la mère Sirven furent condamnés à la mort par

« ZurückWeiter »